samedi 30 janvier 2016

Moineau d'hiver au nord

Pour qui ne le sait pas, il fut un temps où j’ai envié plusieurs « snowbirds » qui partaient six mois dans le sud. Il fut même un temps, à peu près à la même époque, avant l’ère des blogues et des réseaux sociaux, où je me demandais si je ne pourrais pas prendre une année sabbatique et faire le tour de la France ou, comme deux professeurs que j’ai connus, quelques mois aux États-Unis et quelques mois en France. En véhicule récréatif, il va sans dire, ou au moins dans des campings, je n’ai jamais pensé voyager autrement après l’achat d'une petite caravane portée de sept pieds et demi en 1994.

Il y a toute une différence entre lire les récits des autres, leur envier leur voyage, examiner ses horaires, ses moyens financiers et plonger tête baissée dans la réalisation de ses rêves.

J’ai envisagé plusieurs possibilités comme tout vendre, mais avant de déménager ou même de partir six mois à l’aventure, je me suis permis de faire un essai, plusieurs essais. Voir combien de temps je pourrais… 

Début mai 2003, donc départ vers l’ouest avec intention de visiter le nord-ouest des États-Unis et de revenir par le Canada, sans date de retour. Ce qui fut fait. Je croyais réellement partir jusqu’en septembre au moins. Au parc Yellowstone, j’ai accusé les hauteurs de mes malaises physiques, mais je réalisais surtout que j’étais loin, à sept jours de tout ce que j'ai chez nous et que je n'ai pas ailleurs. Donc, j’avais un chez nous, je devais bien l’admettre. Après Calgary, l’artiste peintre avec qui je voyageais venait d’être acceptée dans une galerie. Nous n’avions plus qu’une hâte : rentrer chez nous. Total 44 jours. 
Nous savions des lors que nous ne partirions jamais 365 jours.

Mais c’était l’été, il restait à nous prouver combien de temps nous pourrions être des moineaux d’hiver. 

En 2008, début février, direction Georgie. Malgré les no-seums, nous avons adoré notre séjour au Blythe Island campground. Nous n’oublierons les sentiers, les marécages, l’accueil des préposés. Nous avons écourté notre séjour, tellement on avait hâte de parler à des francophones. Dès que j’en voyais arriver au poste d’accueil, je me ruais quasiment dessus pour leur souhaiter la bienvenue. Total : 58 jours

Nouvel essai en 2009 en variant un peu les campings, total 59 jours.

En 2014, nous avons carrément choisi un camping avec activités, avec Québécois, avec tout ce que nous aimons. Et pas avant mars. Nous avons tout aimé et pourtant.. total 57 jours.

Il n’a quand même pas fallu attendre dix ans avant de comprendre qu’on ne sera jamais des «snowbirds» et que nous ne partirons jamais plus de deux mois.

Nous sommes presque en février 2016, chaque matin, je jette un coup d’œil à deux ou trois forums et cinq ou six blogues de caravaniers, je suis heureuse de voir leurs photos, de lire leurs récits, mais ça ne me donne pas envie de partir parce que je n’ai plus besoin de faire d’essais ou de tenir une liste des pour et des contre. Je suis bien chez nous, je suis mieux chez nous que partout ailleurs, même s’il fait froid, même si ça me prend dix minutes à m'habiller pour sortir.

Être dehors, marcher dans des sentiers chez soi, sur son terrain, suivre les traces des lièvres, des dindons sauvages, espérer le cri d'une mésange. N'entendre que le vent dans les feuilles. Tout en étant à un kilomètre du village, de la civilisation, des services, ce qui rassure, je dois bien l'admettre.

Prunelle (notre véhicule récréatif) est là, ses fenêtres bien protégées contre les petits cailloux sournois, qui attend, comme nous, le printemps et le retour des moineaux d’été. Quoiqu’il n’est pas dit que nous ne devancerons pas un peu ce printemps en allant à sa rencontre… au mois de mars. Surtout si le temps continue d’être doux, merci El Niño, il sera peut-être aussi hâtif en Caroline du Sud, qui sait!

Et puis, fin février, il y aura le Salon du live de l'Outaouais: quelques nouvelles à ce propos dans une dizaine de jours. 

vendredi 15 janvier 2016

Carnet du prochain roman (5)
ou la plainte du travailleur solitaire

Certains jours, après avoir relu quelques pages, j’ai le goût de lâcher.
Un jour, je trouve que j’y mets trop d’heures pour le peu que ça avance.
Une autre fois, je ne trouve pas de solution à mon histoire qui devient incohérente : pourquoi est-elle partie en Gaspésie? Comment a-t-elle pu arriver là alors que le couple ne possède qu’une auto? 
Une autre fois, je trouve que ça ne vaut pas la peine, je ne pense qu’à ça et rien d’autre ne m’intéresse, ce qui n’est pas sain.

Quand il ne reste que le seul entêtement comme raison de le terminer! Et je n’en suis même pas à le terminer, tout juste à l’avancer.
Tant de jours, de mois, d’années pour quelque chose qui se lira en quelques heures, au mieux, quelques jours et qui restera en librairie tout juste trois mois!
Qu’est-ce qui vaut la peine dans ce travail? La fierté? Comment être fière de l’acharnement?

Je sais aussi pourquoi je bloque, pourquoi je résiste. C’est comme si cette histoire ne m’intéressait plus. Je ne la trouve pas si intéressante pour continuer à la conter. Il me vient l’idée de couper là et tout conclure dans un long épilogue ou un chapitre : dix ans plus tard. Qu’on en finisse de ce premier jet. 

Je voudrais déjà écrire autre chose ou plutôt, je voudrais finalement que cette histoire soit déjà écrite et que je n’aie plus qu’à la corriger, la peaufiner. Enlever les répétitions, améliorer le vocabulaire, enrichir les dialogues, que les clichés deviennent des idées géniales. Ça, j’aime. Mais écrire l’histoire, pour moi, c’est pénible. 

Quand je lis un roman ou que je regarde un film, une fois que j’ai compris, que j’ai « vu » la scène, que je sais ce que pense ou ressent le personnage, je suis prête à passer au chapitre suivant. Pour les romans des autres, je peux passer par-dessus les longueurs, aller voir plus loin. Mais quand j’écris, je ne peux pas. Et c’est à ce moment-là, quand ça ne me tente plus d’écrire cette histoire que je résiste. J’attends que le goût me revienne. Ça peut prendre plusieurs jours. 

Et quand ce n’est pas l’histoire qui ne veut pas être écrite c’est la technique qui accroche. Ça ne m’était jamais arrivé. Pourtant je n’en suis pas à mon premier livre. Et comme je n’ai jamais suivi de cours sur le sujet, je ne suis consciente de la possibilité que ça ne survienne que depuis un certain atelier d’écriture, et depuis que d’autres auteurs en parlent dans leurs blogues : le problème du narrateur, le changement du point de vue. 

Dans ma trilogie, dès le début, je savais que je n’utiliserais pas le « je ». Le narrateur omniscient me venait tout naturellement… et sans même connaitre le terme. Dans Les Têtes rousses, il y eut bien une rupture quand je suis passée du personnage de Bridget à celui de sa fille Jenny, mais à force de réécriture et d’ajouts de transition, je crois — enfin, j’espère — que le lecteur a réussi à se détacher de l’une pour accepter la génération suivante. Dans Les têtes bouclées, Léopold était le personnage central autour duquel gravitaient d’autres personnages secondaires, mais dont le lecteur pouvait suivre aussi l’histoire, de l’intérieur si je puis dire.

Pour le troisième tome, je savais qu’il serait question de la mère et de la fille, mais si j’ai réussi dans les cent premières pages à alterner entre l’une et l’autre, comme des vies parallèles, voilà, que, bang, au chapitre 17, les deux font un face à face, atterrissent au même endroit en même temps. Le chapitre commence avec la fille et il se termine avec la mère. Un paragraphe une, quelques lignes l’autre. Plus rien ne va.

Et arrive ce qui devait arriver : je bloque. Les deux veulent agir, parler, penser en même temps. Qu’est-ce que je fais? Je reprends tout depuis le début? Je travaille fort pour séparer les voies devenues siamoises et leur inventer des séquences où elles seront seules en scène? Je continue et on verra plus tard? Ne pas régler le problème tout de suite, est-ce l’envenimer?

Je me sens débutante. Incompétente. Et ce n’est pas un devoir de cinq ou six pages que je pourrais jeter et recommencer. Cent soixante-quatorze pages à revoir. Et pas de professeur pour me tenir la main, pour me dire : 
      — mais non, ce n’est pas si grave, regarde là, tu peux corriger là et là. Pas besoin de tout reprendre, seulement ce chapitre. Et puis tu pourrais faire en sorte que…

         — Oui, oui, j’écoute. Faire en sorte que?

lundi 11 janvier 2016

L'info lettre du distributeur Prologue

Dans mes courriels, une info-lettre qui me ravit.
Pour certains, ce n'est peut-être rien, mais pour moi, c'est beaucoup, parce que la première fois.
Au milieu d'une vingtaine d'auteur-e-s qui, comme moi, verraient très bien leur roman en séries ou en film, j'en suis certaine. Producteurs, vous avez l'embarras du choix.

Merci Prologue.
voir cette info-lettre >>>





dimanche 10 janvier 2016

Carnet du prochain roman (4)


Certains jours, la petite musique ne joue que des notes dissonantes.

Certaines heures, la tête écrit plus que le cœur. Les tripes que tout le monde veut nous voir mettre sur la table étaient probablement indisposées. Comme si l’humain vivait vingt-quatre heures sur vingt-quatre sur un air endiablé et le cœur battant! Dans nos histoires, il faut laisser souffler le lecteur aussi, lui non plus ne peut pas soutenir — comme à ses 18 ans — le rythme de sensations fortes tout au long de sa lecture.

Tout un art ou une science ou au moins tout un travail que de mettre ses tripes sur la table et qu’au final, le plat soit bien cuisiné, bien équilibré et non pas une simple coupe de boucher — la meilleure soit-elle — simplement cuite dans un poêlon.

Aujourd’hui était un jour de boucherie, de cacophonie. 

Je devais avoir l’esprit ailleurs. Dans ma vie. Parce que je n’arrête pas de vivre pour écrire. Et même bien concentrée, même si je ne regarde pas le temps qu’il fait dehors, que je ne pense pas à la brassée de lavage que je devrais faire, le téléphone sonne parfois, une amie peut avoir besoin de mon écoute. 

J’ai essayé de lire de bons textes pour me remettre sur la bonne voie. Mais les bons textes ont leur propre musique, leurs propres saveurs. J’ai lu quelques pages de Wildwood de Johanne Seymour à qui j’envie son parcours de scénariste et de réalisatrice parce que je suis certaine que ce qu’elle a appris lui sert aujourd’hui à rendre son histoire mieux structurée. Alors que moi je peine chaque jour, à chaque chapitre pour que le tout soit un beau concerto, un bon mijoté. Le fait que dans ce roman paru en 2014, il soit question d’une adolescente québécoise qui vit dans les années 1968 m’a un peu troublée. Québec – 1968 – adolescence : comme dans mon prochain roman. Pendant quelques minutes, j’ai paniqué, comme j’avais un peu paniqué devant Fanette qui venait de l’Irlande. Mais aujourd’hui, je me raisonne plus rapidement : ce n’est pas parce que le sujet a déjà été traité que je ne peux pas jouer dans les mêmes plates-bandes. De toute façon, tous les sujets ne l’ont-ils pas été, tout le monde aborde les mêmes thèmes : la vie, l’amour, la mort, la jeunesse, l’âge mûr. S’il y a une époque dont les Français sont friands, c’est la Deuxième guerre mondiale et ça n’empêche pas les écrivains d’y ajouter leur version personnelle encore aujourd’hui. 

Sans prétention, j’ai donc relu quelques pages des Têtes bouclées et des Têtes rousses pour retrouver ma propre petite musique et marcher dans mon propre et unique sillon. 

Aujourd’hui est un autre jour. Écoutons pour voir si ce sera Wagner ou Chopin. Led Zeppelin ou les Beatles, Charlebois ou Vigneault.

dimanche 3 janvier 2016

De ma fenêtre

Premier billet de l’année 2016. Le silence revenu dans la chaumière n’est pas nécessairement signe de calme dans ma tête. Celui, indispensable, qui me permettrait le retour à l’écriture. Il me semble que je passe plus de temps à « me remettre à l’écriture » qu’à écrire. Comme si c’était une saison à part, hors du temps, qu’il fallait tout arrêter pour se concentrer sur cette seule activité. Au temps où je « travaillais », je n’avais pas à arrêter de vivre pour être fonctionnelle. Je me levais, je m’habillais, je déjeunais, je partais (en janvier, souvent je devais pelleter un brin afin de pouvoir sortir de la cour) et une fois rendue devant mon bureau, après un rapide bonjour aux collègues, ça y était je me mettais au travail. Pas besoin de réchauffement, pas de procrastination, pas de détour, pas de grandes questions existentielles. Parce que j’étais sur l’automatique? Parce que j’étais préparée et que je n’avais pas de doute? Parce que ce que je faisais était important, utile, rentable? Ça devait être fait, j’avais été employée pour un travail et je le faisais. Tandis qu’écrire? Sans échéance précise…

Pourquoi ce n’est plus du tout le cas? Parce que je n’ai pas de patron, pas de paie à gagner, pas de preuves à faire, pas de travaux à remettre? Pourtant, je ne suis pas devant une page blanche. J’ai des feuilles imprimées devant moi. Je n’ai qu’à relire, à améliorer, à corriger, à ajouter, à voir à ce que la scène soit plausible.

Ce matin, regard vers la fenêtre. Petite neige qui tombe. Les branches des arbres sont abondamment recouvertes, chargées sans être lourdes. Tout est noir et blanc. Féerie silencieuse. Distraction, perspective de promenade dans la forêt. En raquettes, enfin. 

Distraction aussi à repenser aux dernières journées : aux fêtes de famille. Quelques nouvelles réjouissantes pour les uns, des difficultés pour les autres. Des histoires d’enfants, des histoires de lutins. Des cadeaux et de la boustifaille. Du champagne de France et du Pinot noir de Suisse, et de joyeuses conversations. Du « racontage » de souvenirs. Beaucoup de bavardage. De quoi entretenir une grippe qui traîne depuis Noël. Qui me fait des nuits où je dors assise plutôt que couchée. Qui me fait des yeux lourds. Mais aussi se reposer en lisant Paul dans le Nord, se divertir en regardant un film datant de 1967, Loin de la foule déchaînée (trouver que le titre ne convient pas vraiment), voir dans le personnage de Julie Christie une vague ressemblance avec la Scarlett O’hara si orgueilleuse. 

Et donc l’esprit bien loin de mon roman.

Pourtant, il ne s’écrira pas tout seul ce roman. Comment font les écrivains qui écrivent en trois mois et même douze? Ont-ils des employés qui pellettent, qui préparent les repas, qui font le lavage, qui font l’épicerie? Probablement qu’ils ne bloguent pas! Ni ne regardent par la fenêtre.

Alors, laissons la rêverie, détournons la tête de la fenêtre, fermons la porte du bureau et, le cœur content des fêtes passées en famille, le corps heureux de sa promenade en raquettes... allons écouter ce que Mireille Deguire veut nous raconter aujourd’hui.

Eh! oh! Mireille, es-tu là, es-tu prête? M'attendais-tu? Me voici.

lundi 28 décembre 2015

Clavier 0, bouchon 1

Noël est passé. Trois fêtes en trois jours. De quoi nous étourdir, nous changer les idées, nous émouvoir. De quoi nourrir l’estomac et le cœur. L’esprit un peu aussi quoique pour les cadeaux plus intellectuels, chez nous, il faudra attendre au jour de l’An.

Je croyais me remettre à l’écriture dès dimanche, mais qui dit voir du monde, recevoir, sortir, dit beaucoup d’énergie, beaucoup d’embrassades, beaucoup de microbes. Donc dimanche, plutôt repos, toux, pastilles, tangerines, bouillon de poulet et eau. Emmitouflée dans une couverture chaude, les yeux fermés, somnoler devant un livre — L’affaire Céline ou Cendres au Crique-à-la-Roche de Jean-Louis Fleury —, qui n’a changé que deux fois de pages.

On s’y mettra le lundi. Surtout que le lundi, c’est piscine et qui dit piscine, dit le temps de penser au roman, aux scènes aux dialogues. En tout cas, moi, j’écris en nageant. Dans ma tête, bien sûr.

Sauf que ce lundi, je n’y vais pas pour aggraver mon rhume qui se résorbe. Et puis ce lundi, il faut passer la souffleuse, ramasser la neige tombée samedi. Pour la première fois de l’hiver. Évidemment, elle refuse de partir. Alors plutôt que de prendre une petite demi-heure, avec la hâte de me remettre à l’écriture puisque l’énergie m’est revenue, il m’a fallu plus de deux heures de patience, de recherches, de lecture — le livre d’instruction qui ne correspond jamais tout à fait à notre modèle évidemment — pour noyer le moteur, inspecter l’huile, chercher la bougie, aller pelleter pendant que le moteur se « dénoie », rentrer boire de l’eau parce que je tousse encore, re-starter, re-patienter, re-lire, penser à la tempête de mardi qui vient et me demander qui pourrait bien me dépanner… et oh! bonheur, l’Esprit saint, le petit Jésus, la fée des souffleuses ou je ne sais quoi dans mon cerveau fut bienveillant avec moi et vint à mon secours : j’ai retrouvé la petite clé de contact rouge sous la poussière de roche qui couvre le sol de ma remise où est rangé le dit engin qui, une fois nanti de son petit bouchon de plastique, fut trop heureux de ronronner du premier coup. 

Le fautif ne s'enfuira plus, il est désormais attaché!
Mais après tous ces efforts, croyez-vous que je puisse me remettre dare-dare à l’écriture. Que non!  

Donc réchauffement, écriture automatique. Devant un cahier, devant le clavier. Me couper les ongles trop longs qui accrochent les touches, fureter dans mes courriels bien silencieux ces jours-ci, commenter un ou deux sujets sur un forum de caravaniers partis dans le sud. Résister à l'envie d'aller voir s’il n’y aurait pas des aubaines pour ce sud tentant. Résister à tous les détours qui ne mènent pas directement à mon roman. 

Tiens, écrire un billet de blogue, c’est un bon exercice préparatoire.
Ce que je fis.
Ce qui est fait.
Et maintenant, ouvrons notre fichier Les têtes

Ah! Zut, c’est l’heure de diner!

mercredi 23 décembre 2015

Joyeuses fêtes 2015


Dans ce tableau de Louise Falstrault,
il y a tous les mots de souhaits de santé, d'amour, de paix de Claude Lamarche



mercredi 16 décembre 2015

Carnet du prochain roman (3)



Quand sur les cent cinquante pages que contient actuellement ton manuscrit, tu avais plus de cent pages avec un personnage qui vivait jusqu’à la fin et que tout à coup, tu décides de le faire mourir (j’entends déjà les lecteurs s’exclamer « pas encore un! ») autour de la page 75, tu as du travail!

Tu imprimes alors la première page de chaque chapitre, tu prends des notes, tu déplaces, tu biffes, tu coupes, tu changes le titre du chapitre, tu déplaces encore. Tu imprimes la nouvelle table des matières et tu sais que demain, tu auras du travail sur la planche, mais au moins tu y vois plus clair.

Et tu espères que c’est ton dernier mort!

lundi 14 décembre 2015

Carnet du prochain roman (2)

Quelques pages avant la fin, elle reniflait, elle s’essuyait les yeux. Quand elle eut tourné la dernière page, j’ai voulu voir ce qui la faisait pleurer. J’ai relu, je me suis souvenue de cette scène. Pourtant, moi, elle ne m’avait pas fait pleurer. Alors, j’ai compris que j’avais réussi. J’avais écrit une fin émouvante, qui émouvait le lecteur alors que pour moi, ce n’était que des mots. Personnellement, ce ne sont pas sur ces pages que j’ai versé quelques larmes. Donc l’émotion de l’auteur n’est pas nécessairement gage de l’émotion du lecteur, ce que j’ai cru pendant longtemps. Chacun réagit selon son expérience de vie, ses souvenirs. Et, comme chez les membres d'une famille, étrangement, personne n'a les mêmes.

Le genre de réaction qui me donne des ailes.
Puis, à défaut de longue marche sur une plage, vint ensuite la piscine.

Oui, la piscine. Une heure d’exercices et de nage. Depuis plusieurs années, je me suis rendu compte que mes personnages en profitaient pour m’accompagner. Sans autres distractions ou stimuli extérieurs, les idées s’éclaircissent, les solutions surgissent. Comme en méditation.

Exemple, ce matin, je me demandais bien ce qui pourrait arriver entre la fin de l’Expo 1967 et la loi 63 sur la langue française en 1969. Entre deux mouvements de bras, l’idée m’est venue : pourquoi ne pas faire comme dans les autres romans : des parties. La première partie se terminerait en 1967 et la deuxième recommencerait en 1969. Plutôt que d’inventer des scènes inutiles, pour remplir seulement, mieux vaut reprendre plus loin dans le temps quitte à composer un ou deux paragraphes de transition.

Pour la énième fois, j’ai également entrevu un nouvel épilogue.
Pour la énième fois, je crois avoir scellé le sort de deux personnages. 
Et pour la énième fois, j’avais hâte de sortir de l’eau pour tout consigner.

jeudi 10 décembre 2015

Carnet du prochain roman (1)


J’ai commencé un carnet où il est question de mon prochain roman. Ou l'art de prendre une pause pour mettre un peu d'ordre dans sa tête. Un peu comme je l’ai fait pour Les têtes rousses. J’ai toujours aimé lire comment est né un livre, ce qui se passe dans la tête de l’auteur pendant l’écriture du livre. Comme C’est bizarre l’écriture de Christiane Rochefort qui fait suite à son roman Printemps au parking. Ou le blablablog de Katherine Pancol, truffée de citations ou de promenade sur la plage où elle écoute ses personnages.

Certains jours, je ne vois pas pourquoi j’écrirais une suite aux Têtes rousses et aux Têtes bouclées. À quoi bon? Tant de travail, si long avant d’être publiée, si peu de retombées, tant de temps pendant lequel mon esprit est absorbé par cette tâche. Certains jours, je voudrais me sentir libre, me sentir en vacances, me demander le matin : « qu’est-ce que je fais aujourd’hui? » Et le lendemain, je poursuis, je reprends, tout simplement.

Ce que je sais : en novembre 2006, après deux ans d’écriture et de recherches, j’avais écrit quelque quatre cents pages dans Word. Un manuscrit qui contenait toute mon histoire : de Bridget en 1846 à la fin qui se situait alors autour de 1972. En 2011, Les têtes rousses sortaient en librairie, un roman qui se passait de 1847 à 1899. En 2015, Les têtes bouclées couvraient la période de 1899 à 1963. 

Il me restait donc de mon manuscrit initial une soixantaine de pages, celles où il est question des années 1963 à 1972. Je dois doubler et même tripler les pages. Sauf que ça ne coule pas aussi bien que dans le deuxième tome. Je n’arrive pas à insérer des scènes. Je ne peux quand même pas faire arriver certains événements alors qu’ils n’ont pas eu lieu. Exemple parler du Parti québécois avant 1968, année de sa création. Ou un des personnages ne peut pas emprunter de l’argent sans l’autorisation de son mari avant que la loi soit passée. Ou un autre personnage ne peut pas terminer son cours classique à Basile-Moreau alors que le collège est devenu cégep.

Et puis, j’ai ajouté une difficulté en choisissant d’alterner les narratrices. Un chapitre Dominique et le suivant Mireille. J’ai peur que la structure soit lourde. Dans un roman, je déteste pourtant quand l’auteur passe d’un personnage à l’autre comme Jeffrey Archer dans les Clifton, comme Suzanne Aubry dans les Fanette. Parfois une coupure si le chapitre est trop long. Daniel Grenier a réussi un tour de force dans L’année la plus longue. Réussirai-je?

Il me semble que je n’avais pas eu tant de difficultés avec les deux premiers. J’ai beau avoir un plan, une chronologie devant moi, je prends-perds du temps à copier et aller coller ailleurs, au chapitre suivant pour rectifier l’ordre des scènes. Sans compter que je me retrouve avec deux pages dans un chapitre et dix dans le suivant. 

Et la première version avait été écrite au présent, il reste donc encore quelques verbes à mettre au passé. Connaissant ma faiblesse pour la concordance des temps... 

Bref, j’avance à pas de tortue alors que j’ai plutôt le tempérament d’un lièvre. En zigzaguant. Imprimer parce que j’y vois plus clair sur papier, corriger, transcrire. Et ajouter des scènes, des émotions. Je suis encore loin de l’étape du peaufinage de style.

Et vous, tenez-vous un carnet parallèle? Qui tient un blogue où il est question du roman qu'il est en train d'écrire?

mercredi 9 décembre 2015

Émotion pour un événement qui s'est passé il y a 168 ans


Quand, dans un livre (maintenant accessible par Internet, donc pas besoin de te rendre aux archives de Montréal) qui date de 1930, et où il est question d'événements survenus il y a 168 ans, que dans ce livre, tu reconnais le nom de la tante (par alliance) de ton arrière-arrière-grand-père, Benjamin Deguire... quand ce  nom, cité cinq ou six fois dans chacun des quatre volumes, tu l'as aussi très souvent vu dans le cahier bleu que ta mère t’a remis il y a maintenant plus de onze ans… tu es encore émue comme si c’était une tante proche que tu aurais connue... et beaucoup aimée. 

Premières postulantes canadiennes : Le 15 août, Mlle Émilie Fortier, plus tard, sœur Marie-du-Carmel. Le 15 septembre, Mlle Marie Gohier, sœur Marie-de-Sainte-Madeleine. Le 15 novembre, Mlle Esther Leduc, sœur Marie-de-Bon-Secours toutes trois cousines. 
[…]Les récits de ces excellentes religieuses ont enrichi le dossier des documents; par le fait même, elles ont procuré à l’annaliste actuelle, le plaisir d’écrire la partie la plus intéressante de cette histoire.
Une personne dont tu as parlé dans ton roman, Les têtes bouclées. Et dans le prochain, il en sera encore question, parce que tu l'as aussi fréquenté ce Basile-Moreau, qui s'appelait alors couvent Notre-Dame-des-Anges, où Esther Leduc est entrée en 1847.

La lettre et la photo de sœur-Marie-de-Bonsecours proviennent du cahier bleu de ma grand-tante religieuse et la couverture des Annales est une capture d’écran du fichier pdf provenant de la BANQ.
http://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/1987057

samedi 5 décembre 2015

Coup de poing. Coup au cœur. Coup de maître.

« La fiction, c’est terminé pour vous [les romanciers]. Les séries offrent un romanesque un territoire autrement plus fécond et un public infiniment plus large. […] Laissez aux scénaristes ce qu’ils savent mieux faire que vous. Les écrivains doivent revenir à ce qui les distingue, retrouver le nerf de la guerre. […]Pourquoi crois-tu que les lecteurs et les critiques se posent la question de l’autobiographie dans l’œuvre littéraire? Parce que c’est aujourd’hui sa seule raison d’être : rendre compte du réel, dire la vérité. […] L’écrivain doit questionner (1) sans relâche sa manière d’être au monde, son éducation, ses valeurs, il doit remettre sans cesse en question la façon dont il pratique la langue qui lui vient de ses parents […]. Tes livres ne doivent jamais cesser d’interroger tes souvenirs, tes croyances, tes méfiances, ta peur, ta relation à ceux qui t’entourent. C’est à cette seule condition qu’ils feront mouche, qu’ils trouveront un écho. »
Delphine de Vigan, D’après une histoire vraie

Coup de poing. Coup au cœur. Coup de maître. Je suis abasourdie, estomaquée, hébétée, interloquée, médusée, sidérée. Nommez toutes les nuances de « complètement envahie » par la lecture de ce roman. 

Comme je suis en cours d’écriture, j’avais arrêté de suivre l’activité littéraire, je ne voulais pas être tentée. Ma curiosité fut plus forte. Ce livre m’intriguait, je me demandais pourquoi il était si bien accueilli. Et puis, en voyant qu’il remportait le prix Prix Renaudot et le Goncourt des lycéens 2015, contrairement à mes habitudes en ce qui concerne les prix dont je me méfie, j’ai succombé. J’ai été voir s’il était disponible sur Numilog. Il l’était. Signe que je devais en profiter. J’ai laissé l’écriture, le ménage, la promenade du jour et j’ai plongé. 

Faut-il dire que je ne suis plus polar ni thriller depuis des années. Ce que le roman n'est pas malgré l'impression d'enquête. Belle lurette que je recherche beaucoup plus l’émotion, l’intimité que les sensations fortes. Et pourtant dans ma façon de lire, on aurait dit que j’étais entraînée dans un tourbillon aussi frénétique qu’efficace. Il faut dire aussi qu’en lisant ce genre de phrase : « La relation à l’Autre ne m’intéresse qu’à partir d’un certain degré d’intimité » j’étais conquise. Je me sentais dans le bon livre. Je m’identifiais en partie à ce « je » qui parlait de L. alors je sentais, malgré les intrigues et les mystères, que ce serait plus le livre d’une relation, ce qui n’était pas pour me déplaire.

Espérons seulement que ma rencontre avec ce roman ne me hantera pas au point de m’empêcher de poursuivre l’écriture de mon histoire. Que mon immense admiration pour la réussite de ce tour de force ne me « fasse taire à jamais » ni même quelques semaines comme L. a rendu impuissante la narratrice du roman de Delphine de Vigan.

Espérons que la citation au début de ce billet (et il y aurait bien eu une dizaine d’autres paragraphes que j’aurais pu citer), qui m’a fait si forte impression, me propulse vers un meilleur livre et non pas un jugement dévalorisant sur mon écriture. Je ne vise même pas d’arriver à la cheville de l’auteure, mais au moins au meilleur de moi-même.

(1) L’écrivain doit questionner : ça m’a fait du bien de voir qu’un prix Renaudot pouvait contenir un calque : il aurait fallu lire « s’interroger sur ».

mardi 1 décembre 2015

Et si...



Écrire serait si triste si l'on ne déviait jamais de son plan.
Giorgio Agamben

La citation d’aujourd’hui correspond à ma semaine d’écriture : je tuerai un personnage (il se noiera dans une rivière ou un lac, à son choix) tout simplement parce que mon histoire ressemblait trop à la mienne. Et je ne veux pas. Parce que je ne veux pas que les têtes fortes collent trop à ma vie. Mes personnages réclament une vie plus mouvementée, plus dramatique, plus intéressante. Comme Léopold Deguire dans Les têtes bouclées, je m’amuse à me demander : « Et si… »

dimanche 29 novembre 2015

Dimanche

Dimanche. Le dimanche pour moi n’a jamais été et ne sera jamais comme les autres jours. Je n’ai ni devoirs à remettre ni leçons à apprendre comme au temps lointain de mes années de collégienne, mais, le dimanche, j’ai encore des relents de fille studieuse. Envie de m’assoir sagement à mon bureau, écrire, réfléchir, me recueillir. L’après-midi, lire au salon, un Vivaldi en sourdine. Depuis belle lurette, plus de messes le matin, plus de retour à la ville après une fin de semaine à la campagne puisque je demeure à la campagne, mais encore le goût d’un rôti mijoté de pommes de terre pilées. Envie parfois de visite. 

Dimanche langoureux ou plutôt indolent. 

Dans mon cerveau émotionnel se placent les diverses pièces du casse-tête de mon prochain roman, mais quand vint le temps d’écrire, de poursuivre, quelques mots seulement. Comme un résumé. Tout est dit en trois pages. J’écris toujours aussi courtement, comme un billet de blogue ou une chronique de journal. La nuit, les personnages deviennent somnambules, bavards. Ils se promènent, me hantent. Le jour, ils se taisent, ils attendent, me surveillent. 

Petit bélier qui va toujours trop vite, qui va à l’essentiel. À lire ou feuilleter les romans des autres, je vois bien que l’histoire peut aussi se résumer en quelques lignes. La beauté et la richesse de la lecture résident donc dans le style, dans l’agencement des mots, dans la lente narration. Saurais-je calmer les ardeurs de mon signe de feu toujours pressé de passer au texte suivant? Saurais-je lui insuffler la délicieuse langueur du dimanche?

lundi 23 novembre 2015

Contente

Contente. 

À vingt minutes de chez moi. 

Deux jours, de 10 heures à 17 heures. Sans flafla. Sans grand temps mort. Lunch à 3 $. Belle organisation. Merci à Lise Poirier et Lorraine Sabourin pour l'invitation.

Vendus plus de « vieux » livres que de récentes publications. Les ventes ont dépassé les 100 $ qui vont directement dans mes poches.

Sujets de bavardage allant de l’Irlande aux patronymes, en passant par les soldats de Carignan et même de l’enseignement. Parler avec amour de la Petite-Nation. J’ai reconnu dans les yeux et les sourires des gens les mêmes heureux souvenirs des étés au lac Simon. Parler de mon père reconnu pour son travail en histoire. Parler de ma mère connue au CHSLD. Parler à d’anciens élèves.

Des voisins de kiosques sympathiques, dont quelques ami-e-s. Des rires, de l'entraide. Des visiteurs tout aussi intéressés aux bijoux, aux meubles, aux tuques en alpaga qu’aux mitaines en castor. Et aux livres. Il n’y avait que les miens!

En conclusion, que je me le tienne pour dit:  je ne suis pas moins auteure parce que j’ai choisi Ripon plutôt que Montréal.

Très contente bis, ter.

vendredi 20 novembre 2015

De la lecture à l'écriture

Tu sais qu’il est temps de retourner à l’écriture quand tes lectures ne te satisfont plus. Que tu passes d’un roman à l’autre à la recherche d’un tu-ne-sais-pas-trop-quoi. Comme si tu ramassais des framboises et que tu cherchais toujours si la talle voisine ne serait pas plus abondante ou de meilleure qualité.

Quand tu lis un livre après l’autre, de style aussi différent que Six degrés de liberté de Nicolas Dickner et La vie des elfes de Muriel Barbery. Qu’il n’y a entre les deux qu’un seul point commun et encore c’est en cherchant bien : les chapitres alternent entre divers personnages. Que tu trouves que le premier est tout plein de détails qui t’agacent, comme dans une peinture hyperréaliste, jusqu’à écrire les chiffres entre parenthèses « deux (2) ans, trois (3) mois et dix-sept (17) jours » ou divulguer le mot de passe « 5+e’@> » 0~#8vcP », ce dont tu te fous complètement. Mais où l'auteur veut-il en venir? L’histoire va-t-elle enfin commencer, mais bon laissons-nous aller, on verra bien. Quant à l’autre roman, les phrases, en comparaison, deviennent absconses, surtout si on les sort de leur contexte, comme « La vraie foi, on le sait, se soucie peu des chapelles, elle croit en la collusion des mystères et broie de son syncrétisme candide les tentations trop sectaires »...

Quand il y eut avant la lecture de Madame Victoria de Catherine Leroux lu en entier avec admiration pour l’idée originale, mais que tu as abandonné Au péril de la mer de Dominique Fortier  faute de ne trouver dans la description du mont Saint-Michel que très peu d’intérêt. Ce qui fait appel à ma raison seule, ce qui ne me touche pas, même si le style atteint des sommets dignes d’un prix littéraire ne suffit pas à la poursuite de ma lecture.

Pas ces temps-ci.

Tous ces signaux et sauts d'un livre à l'autre, comme si c'était une course, indiquent qu’il est temps de délaisser la lecture et de me mettre plutôt à l’écriture. À trouver mes histoires, à plonger dans mes phrases. Visiblement, celles des autres — les phrases comme les histoires — commencent à me lasser. À regarder les autres courir, à juger leur performance, je vois bien que mes pieds trépignent d’impatience. Je ne ferai sûrement pas mieux, je peinerai, je travaillerai, je bifferai, je corrigerai, je délaisserai, je reprendrai, mais je n’aurai plus cet air niais du chien vagabond qui cherche dans les cours des voisins la pitance qu’il pourrait trouver chez lui s’il cessait de la chercher ailleurs. 

Comme le yin et yang, la lecture et l’écriture sont complémentaires chez moi. Encore faut-il que je cherche l’équilibre et ne me vautre pas seulement dans la lecture en croyant que mon écriture s’améliorera par le miracle des vases communicants ou celui de l’Esprit saint.

Bref, finies les lectures étourdissantes, toutes grisantes soient-elles, je passe à la phase suivante. Des têtes rousses et bouclées m’attendent.

Peut-être qu’ainsi, un jour, je me sentirai à la hauteur pour m’asseoir derrière une table au Salon du livre de Montréal!

mardi 17 novembre 2015

Feuille qui tourbillonne

Ces jours-ci, je suis vraiment feuille au vent. Et la feuille s’est détachée de son arbre, ne retrouve plus ses racines, elle virevolte, va entre ciel et terre, va de peur à compassion, de noir triste à rouge sang. 

En fait je me sens étourdie. 
Comme trop. 

Je ne parviens même plus à discerner la réalité. Un personnage de téléroman qui meurt, de vraies personnes qui sont tuées à Paris ou celles qu’on a oubliées dans le Grand Nord me dardent tout autant. Je souffre, je pleure et mon cœur s’égare. Ma raison ne raisonne plus. Je ne sais plus quoi penser, quoi demander au premier ministre nouvellement élu. Ni même à Dieu, à tous les dieux. 

En fait, je suis tellement feuille au vent que je n’ose plus écouter ou lire, sachant que je suis du genre à croire que tout est possible, le meilleur comme le pire. Croire que ce qu’on me répète cent fois, mille fois finit par être ce qui est vrai. Croire que ce qu’on ne me dit pas n’existe pas. Ou est de moindre importance. 

Feuille qui roule plus facilement, plus allègrement vers Paris que vers Moscou. Feuille qui a vu souvent la France et jamais la Syrie. Feuille qui rêve plus qu’elle ne connait. 
Feuille si peu piétinée en comparaison à d’autres.

Et pourtant, quand elle a mal au ventre, aux dents, aux oreilles, plus rien n’a d’importance. Sinon attendre que le mal se résorbe. Alors, imaginez une feuille en guerre! Une feuille devant l’étranger, devant les milliers d’arbres dont elle ne sait rien, qui lui cachent le soleil.
Devant les vents forts, je ne suis pas le roseau qui plie, plutôt le pin sec qui craque. Je suis vertige et je chancelle.
Seuls le silence et le petit bosquet connu parviennent à faire couler à nouveau la sève dans la nervure centrale.

Et quand je retrouve un certain équilibre, parce que le vent baisse ou que je retire du tourbillon,  je retourne ou reviens ou m'agrippe, c’est selon, à des endroits plus sûrs, à des routes plus droites où je sens mes pas plus assurés. 

vendredi 13 novembre 2015

Petits bonheurs passés et à venir

Après plusieurs semaines d'intenses préparatifs, le souper-bénéfice du Centre d'action culturelle de la MRC Papineau fut un succès: atmosphère festive, repas succulent et servi rondement. Bénévoles, organisateurs et invités ont été très satisfaits. 

C'est donc le coeur léger mais le corps un peu fatigué que nous sommes parties nous changer les idées... à Baie Saint-Paul. Souvent, par le passé, nous options pour Myrtle Beach ou la Floride et même l'Espagne, mais cette fois, rendez-vous obligent, nous avons choisi de rester au Québec.

Et comme l'automne est doux
comme la neige n'est pas encore arrivée
comme on aime les arts visuels et le fleuve
on a roulé jusque dans Charlevoix.

Nos petits bonheurs des trois jours:
l'exposition dédié à Bruno Côté
la découverte des œuvres de Diane Lelièvre
la chambre de l'auberge Le domaine Belle plage, dont la fenêtre donnait directement sur la baie
les couleurs et tout ce que peut apporter u lever de soleil, à quelques pas de l'auberge
le pique-nique extérieur, un 10 novembre
la rencontre d'une amie très chère au retour.



Nous sommes donc reposées, revigorées, de belle humeur et prêtes pour:
l'auteure au Salon des métiers d'arts de Ripon, les 21 et 22 novembre
et l'artiste à l'événement Petits formats gros cadeaux au Centre d'action culturelle de Papineau.





jeudi 29 octobre 2015

Qui avez-vous connu que vous ne pensiez jamais rencontrer?

Si je me suis intéressée a la généalogie (des Deguire particulièrement), ce n’est que pour écrire un roman sur ces deux Irlandais que furent mes arrière-arrière-grands-parents du côté de ma mère.

Entre le jour où j’ai commencé à chercher, en 2004 et le jour où il y eut une fête qui rassemblait une centaine de descendants Deguire en août 2015, j’ai eu le bonheur de vivre deux belles rencontres. Deux surprises. Deux retrouvailles que je n’avais même pas souhaitées ni cherchées.

Lisa Deguire en 2006
D’abord un courriel reçu en 2005 ou 2006 qui commence par « je suis la fille de Jules Deguire…» Au prénom de Jules, le cœur me manqua, comme si un vent fort me retournait dans une autre époque. C’était le frère de ma mère. Un frère de huit ans son cadet et un frère soldat, donc si je l’avais vu deux ou trois fois dans ma vie, c’était beaucoup. Je savais pourtant qu’il avait trois filles, dont une que j’avais entrevue quand j'étais adolescente, si ma mémoire est bonne. La petite devait avoir entre sept et neuf ans. Et là, voilà quarante ans plus tard qui cherche sa tante Michelle, ma mère.

Comme je n’avais aucune autre cousine du côté de ma mère, c’est avec plaisir que j’entrai en contact avec elle, que je lui permis de rencontrer sa tante, de voir notre grand-père en photo. Dans les années qui ont suivi, nous nous sommes rencontrées quelques fois. À défaut de souvenirs communs, nous avions des noms, des dates et des ancêtres dont on pouvait parler.

La deuxième découverte fut une tout aussi belle surprise. Une chance comme à la loterie.

Antoine Duchesne
Contexte : mon roman Les têtes rousses est déjà publié, Victoria Deguire était déjà un personnage, je l’avais fait vivre dans un roman.

Pour les besoins du roman, je n’avais pas parlé des neuf enfants de Benjamin Deguire. Bien sûr, il fallait que je parle obligatoirement de Philéas puisque c’est lui qui a épousé Jenny Lynch, fille de mes personnages principaux, les Lynch. Mais des frères (morts à la naissance de toute façon) et de ses sœurs, j’ai choisi de parler très peu d’Alice (dans le deuxième tome surtout), et pas du tout, sinon peut-être que de les nommer, d’Odila, Délia et d’Éva. Je n'avais retenu que Victoria parce que je trouvais qu'elle avait plusieurs points communs avec "ma" Jenny. J'en ai fait des amies avant qu'elles deviennent belles-sœurs.

Isabelle Duchesne
Alors quand vous apprenez que sa petite-fille, Isabelle Duchesne, fille d'Alma Dépocas vous retrouve et vous envoie des photos, vous êtes surprise. Recevoir des nouvelles de la petite-fille de Victoria, ça tenait de la chance. Mais plus improbable encore, que cette Isabelle dont je ne soupçonnais même pas l'existence puisque je m'étais arrêtée aux enfants de Victoria sans chercher plus loin, soit demeurée à quinze minutes de chez moi pendant des années, sans que nous ne le sachions ni une ni l’autre, quel hasard! Je n’en suis toujours pas revenue.

Je soupirais d’aise en me rappelant que le personnage de Victoria dans Les têtes rousses n’était pas une vilaine, mais je me demande encore si ce que j’ai fait de sa grand-mère a plu à Isabelle Duchesne.

Il m’a fait doublement plaisir de voir Isabelle, ses filles, et son frère Antoine, à la rencontre des Deguire qui a eu lieu en août. C’était ma plus proche parente, puisque ma cousine Lisa n’avait pu venir.

Je parle ici de deux rencontres. En fait je pourrais en souligner une troisième qui fut fort intéressante également. Mais comme les enfants ne veulent pas être identifiés sur Internet, je ne peux fournir de détails. Je croyais en avoir glissé un mot dans ce blogue, mais après recherches, je n’ai pas trouvé. Je peux quand même dire que ça s’est passé entre 2011 et 2012. Je cherchais des descendants de mes ancêtres irlandais Bridget Bushell et Denys Lynch. Un seul s’est manifesté, mais il fut un précieux collaborateur dans mes recherches. Il m’a conté son enfance, montré des photographies, m’a parlé de sa grand-mère Mabel, m’a offert de me promener dans Saint-Henri, ville de nos grands-parents. Et j’ai eu le bonheur de rencontrer toute la famille (enfants, sœurs, neveux) lors d’un repas de cabane à sucre. Souvenir mémorable.

Petit tableau pour situer tous ces parents:


Et vous, avez-vous déjà rencontré des personnes que vous n'aviez jamais imaginé voir? 

mercredi 21 octobre 2015

Lâcher prise avec des mandalas

Il y a quelques jours encore, je ne connaissais pas.
Étant plus livres que loisirs créatifs, je n'avais jamais remarqué. Hier, chez Omer de Serres, j’ai vu l’abondance.
Je n’ai pu résister parce que ça correspond exactement à ce dont j’ai besoin ces jours-ci.

M’évader, ne pas penser, juste colorier. Comment quand j’avais cinq ans. Comme une enfant. 

Oublier ma couronne « décimentée » au beau milieu de ma bouche. Belle à voir… pour l’Halloween!
Oublier les horaires chargés des denturologistes occupés jusqu’à la mi-novembre.
Lâcher prise pour les activités sociales à venir.
Lâcher prise sur la piètre visibilité de mon roman.

Délaisser la lecture de « Virginia Woolf, qui êtes-vous? » de Phyllis Rose. J’aime bien les biographies, mais la vie de Virginia Woolf n’a rien pour me garder le moral haut et gai! Ne jamais oublier que je suis un caméléon et donc sensible aux humeurs des gens qui m’entourent, qu’ils soient réels ou fictifs.

Délaisser aussi l’écriture du troisième tome des Têtes... le temps de trouver jusqu’où les personnages veulent aller, le temps de voir si l’auteure a toujours envie de poursuivre, de retrouver une motivation pour l’écrire. Hier encore, je lâchais tout. Je renonçais. Je me serais contentée d'écrire un épilogue que j'aurais publié sur mon site. Un fichier pdf offert gratuitement. À quoi bon écrire si ce n’est que pour quelques exemplaires vendus à des connaissances?

Donc les mandalas. Je ne connaissais ni le mot ni le but.
Les mots méditation, art-thérapie et zen m’ont interpellée. Et qu’importe si le but n’est pas atteint. L’exercice me plaît. Je n’ai jamais été artiste des couleurs, mais j’ai toujours aimé le loisir de la peinture à numéros (au grand dam de l’artiste peintre avec qui je vis. Probablement comme si elle se mettait à lire un livre pour les 5 à 9 ans!), alors forcément les mandalas ont tout pour combler mon besoin de distraction.

Et vous, quelles sont vos distractions pour libérer votre esprit de tous ces petits tourments qui vous assaillent?

Et si par hasard, vous connaissez un denturologiste libre immédiatement…