samedi 29 octobre 2016

Le blogue: danger d'accoutumance
ou écrire pour le simple plaisir
de publier un billet aux dix jours

Émotion d’auteure en lisant la première impression de Dominique Fortier quand elle a reçu le Prix du Gouverneur général pour son roman Au péril de la mer :
« Chaque fois que je termine un livre, je suis certaine que c’est le dernier. Ou qu’il n’intéressera personne. » 
Parce que je sais fort bien que mes romans n’auront jamais la qualité, ni la promotion, ni le tirage, ni les prix que les siens ont depuis quelques années. « Je connais ma classe, je connais mon rang » disait Flore dans le téléroman Le parc des Braves. Alors comment peut-on à ce point, Dominique Fortier et moi (déjà, apposer son nom à côté du mien!) ressentir la même chose, avoir déjà dit les mêmes mots? Comme si justement nous étions de la même classe et du même rang. Il faut croire que je n’ai pas encore compris (que je ne comprendrai peut-être jamais) que j’ai tout faux en termes de comparaison. Classerai-je toujours, jusqu’à la fin de ma vie, les gens, les créateurs surtout, comme si j’étais encore à l’école : premier, deuxième, dixième et dernier? À toute évidence, ce que l’on ressent n’a rien à voir avec la quantité, la visibilité ou la qualité d’une œuvre.

Pourtant, en théorie, je le sais que tous les êtres humains, où qu’ils vivent, quoi qu’ils fassent, peu importe leur âge, leur race, leur couleur peuvent ressentir la même chose. Peut-être que cette phrase de Dominique Fortier m’a frappée encore plus ces jours-ci parce que 1 — je révise mon manuscrit, donc je suis auteure toute la journée. Même quand je ne suis pas devant mon écran, j’y pense. La nuit, je me réveille, avant même de regarder l’heure, je replonge dans mon roman et je trouve des phrases, je cherche la métaphore ou un meilleur enchaînement. Le soir en regardant la télévision, telle phrase prononcée par un acteur me fait sauter d’un bond de mon fauteuil. Une idée vient de surgir, une phrase s’impose, je dois la consigner. Auteure vingt-quatre heures je dis. Tou-te-s les auteur-e-s deviennent donc membres de ma famille auxquels je m’identifie, auxquels je me compare, avec qui j’entre presque en relation.

Parce que 2 — mon roman Les têtes bouclées est finaliste au Prix Coup de cœur littéraire de l’Outaouais. Deuxième fois seulement que je suis confrontée (je sens que ce n’est pas le bon mot à employer, mais c’est le premier qui m’est venu à l’esprit, inconsciemment je serais « aux prises avec une situation difficile »?) à ce genre de situation. En 2011, Le roman Les têtes rousses était finaliste au prix littéraire Le Droit (journal de l'Outaouais et Est Ontarien), pas gagné. Cette année, Les têtes bouclées n’ont pas été finaliste au prix du Droit, mais le roman a été retenu par un jury pour le Prix Coup de cœur littéraire de l’Outaouais décerné par l’Association des auteurs et auteures de l’Outaouais. Comme disent tous les finalistes de tous les concours, j’ai déjà ma récompense d’avoir été choisie par un jury. Flattée, encouragée. Grand sourire.
Le gagnant ou la gagnante sera choisie par les votes des lecteurs dans les bibliothèques. 
Le résultat du vote sera connu le 18 novembre.

De plus, ce prix (du public en quelque sorte) sera remis lors des Culturiades de l’Outaouais (soirée de reconnaissance pour les créateurs professionnels et les organismes artistiques et culturels de l’Outaouais) où d’autres prix seront également remis, mais eux, par vote d’un jury. De quoi mêler tout le monde. Mais de quoi avoir une plus grande visibilité également.

D'ici là, quoi? Attendre? Même pas. Inviter les lecteurs et les lectrices à aller voter? Mais encore? Insister? Pas mon genre. Donc rester soi-même. Oublier. Vaquer à mes habituelles occupations. 

Si, entre la nomination et le résultat du vote, il n’en était plus question, je l’oublierais presque, mais de voir son nom (à côté de tous les finalistes des Culturiades) chaque semaine dans un journal, dans un hebdomadaire, dans une infolettre, sur Facebook de l’entendre par des amis, de leur dire que non, je n’ai pas gagné, je suis « juste » finaliste, de voir la petite boite de vote à la bibliothèque, de voir les gens s’approcher, demander c’est quoi cette boite, cette affiche… bref, ça donne de l’importance au prix. Ça ravive… ça ravive quoi en fait? C’est ce que je ne sais pas vraiment. Pas clairement. 

J’en parle pour en parler. Pour écrire un billet parce que ça fait une dizaine de jours. Comme un manque. Pour donner des nouvelles. En réalité, je ne sais pas quoi en penser. Je ne sais pas vraiment ce que je ressens. Et est-ce si important de savoir?

J’ai mieux à faire en poursuivant la révision de mon roman. Ma priorité. Même si, souvent, écrire non plus je ne sais pas trop pourquoi!

Avez-vous déjà été finaliste? Qu'avez-vous ressenti? 

mardi 18 octobre 2016

Walt Disney, il y a dix ans!

Il y a dix ans, quelques jours avant l’Halloween, donc fin octobre, j’étais à Walt Disney, une des premières grandes sorties de mon Pruneau, ce véhicule récréatif dont je n’aimais pas la couleur ni la forme, mais que j’ai adoré pour ce qu’il m’a permis de voir, de vivre. 

Ce matin, un caravanier me rappelait ce voyage et voulait voir mes photos. Oups, photos disparues sur mon site de voyage. Sans doute bien d’autres liens obsolètes (avant les noms de domaines, vous rappelez-vous les geocities.com, les 5 Mo gratuits de Sympatico?). À cette époque (dix ans en technologie équivalent bien à trente ans de vie), j’utilisais Picasa. Bien occupée à vivre un bel été, je n’ai pas vu passer l’avis disant que Picasa-album-web fermait en mai 2016. Archives paraît-il dans Google-photos. Sauf qu’entre-temps, toujours technologie oblige, mon courriel de xittel n’est plus fonctionnel et je m’embrouille dans mes comptes Google. Bref, plus de photos. Rien ne se perd, paraît-il, sur ce web universel, sauf que je ne retrouve rien. Heureusement, j’ai mis en pratique ce que je n’ai jamais cessé de dire à tout le monde : tes photos d’abord sauvegardées chez vous. Sur disque dur, CD, clé USB, qu’importe, mais en ta possession, pas dans les nuages. 

Fouille intensive, je finis par trouver. Pas le texte, pas les légendes, mais au moins les photos. 

Pendant le tri et le redimensionnement, je m’attarde à revivre ces beaux moments. Dix ans! physiquement, je n’ai pas trop changé. De lunettes, de couleur de cheveux, mais le reste, assez semblable. Comme je pense descendre dans le sud bientôt, peut-être pourrais-je y retourner, à ce Walt Disney enchanteur, qui représente les vacances, le plaisir, l’oubli, le laisser-aller? 

J’aimerais bien. 
Femme de devoir, je travaillerai plutôt mon manuscrit. Mais je me suis fait plaisir, le temps d’un après-midi venteux et pluvieux. Voici donc un album sans paroles d’une semaine en octobre 2006.

Lien vers le site de mes voyages>>>
Si vous voyez d'autres liens inactifs, n'hésitez pas à me les mentionner.

jeudi 6 octobre 2016

Octobre: mois de récolte

Pendant des années, des douze mois de l’année, ce fut le mois d’avril qui retenait mon attention, qui embellissait mes meilleurs souvenirs, ne serait-ce que parce que je suis née au mois d’avril. Mais depuis quelques années, je dirais plutôt que c’est octobre. Le 7 encore plus particulièrement. Des événements, dont un au moins aurait pu être plus joyeux, mais tous furent forts, marquants.

L’adage qui dit jamais deux sans trois, dans mon cas serait plutôt, cette année du moins, jamais deux sans cinq. Et le mois n’est pas fini.

Un mois de récolte. Abondante cette année.

1er octobre : annonce dans un journal que mon roman Les têtes bouclées est finaliste au Prix Coup de cœur littéraire.
3 octobre : Dans le bulletin de l’Areq Petite-Nation, septembre 2016, Irénée Monfils a écrit un petit billet sur mes deux romans.
3 octobre : nouvelles de l’éditeur au sujet du prochain roman Les têtes dures, rendez-vous pris, le 14, avec la directrice littéraire qui me suggérera des corrections. Révision et peaufinage en vue.
5 octobre : message privé sur Facebook d’une blogueuse qui veut me rencontrer pour ses premiers billets sur Les têtes bouclées, finaliste au Prix coup de cœur. Rendez-vous au téléphone pris pour le 11.
6 octobre, conférence au Centre d'archives nationales de l'Outaouais sur mes recherches qui ont mené à la publication des deux romans.
Si je retourne en arrière, le 7 octobre 2011 : sortie en librairie des Têtes rousses (et biopsie au sein, mon cerveau a plutôt retenu cette dernière nouvelle qui m'ôtait toute envie de  fêter)
Le 8 octobre 2015 : sortie en librairie des Têtes bouclées.

Je ne cherche pas l’explication à cette accumulation de dates autour de mes romans, mais je constate.
                    « Le hasard, ce sont les lois que nous ne connaissons pas. »
Émile Borel 
Et alors que je croyais avoir mis un point final à mon dernier roman et passer à autre chose que l’écriture stressante de fiction, je vois bien que cela ne signifie pas pour autant le point final des livres. Ils ont une vie propre ces petits fruits!

Les lecteurs qui désirent voter — et peut-être gagner 500 $ — pour le Prix Coup de cœur, rendez-vous à votre bibliothèque municipale. Vous y verrez une belle affiche (illustrateur: Christian Quesnel, celui-là même qui a aussi illustré Les têtes bouclées) et les coupons de participation sont déjà rendus, me dit-on.

Personnellement, mon panier de récolte est déjà bien rempli. 

mercredi 5 octobre 2016

Louise Falstrault: vingt ans de passion

Lors de son souper-bénéfice, le samedi 5 novembre 2016, le Centre d’action culturelle de la MRC Papineau présentera, entre autres activités, une rétrospective de la carrière de Louise Fasltrault.


Vingt ans. Si on considère que sa première présence publique a eu lieu en décembre 1996, à la une du journal La Petite-Nation, cahier des Fêtes, cela fera vingt ans en décembre.

Mais bien sûr, elle avait commencé à peindre avant. L’artiste, qui n’a jamais souhaité se mettre de l’avant, ne considérait pas ses tableaux du dimanche comme des œuvres vendables. À peine montrables. Vingt ans plus tard, il lui arrive encore de le penser. Mais elle ne regrette rien de ses choix, elle ne renie rien de son parcours qui l’a menée bien loin de sa Petite-Nation inspirante.

Avant même d’écrire, comme tous les enfants, elle dessinait ou plutôt, elle coloriait. Jouer avec les couleurs, sa force, son plaisir. Peintre d’atmosphères plus que de lieux, l’artiste a toujours su comment les mêler pour créer des clairs-obscurs. Au pinceau d’abord, à la spatule ensuite, mais à l’huile, toujours. Sauf pour ses tableaux abstraits.

Dès qu’elle a fait construire son atelier, en 1996 justement, elle a senti qu’elle quittait l’amateurisme et acceptait enfin de montrer ses tableaux. Et même de les vendre. Elle se joint à d’autres artistes peintres de la région comme Louis Boekhout, Marthe Blain, Jean-Yves Guindon, Lise Poirier. Elle multiplie les expositions et, en même temps, elle se sent un devoir de communauté, elle cherche à faire connaitre la région de la Petite-Nation. Aller ailleurs, mais aussi faire venir les intéressés, les amoureux de l’art. Louise Falstrault sera dans les fondateurs des Créateurs de la Petite-Nation, dont les tournées ont eu leurs jours de gloire avec souvent plus de 2000 visiteurs pendant la seule fin de semaine de la fête du Travail. 

Les meilleures années, elle peint plus de 150 tableaux qu’elle expose sur les cimaises des galeries d’art d’Ottawa, de Montréal, de Baie Saint-Paul et même de Calgary. Elle participe au symposium de Montebello, de Port-au-Persil, de Kamouraska, et surtout celui qu’elle n’oubliera jamais, dont elle parle encore, celui de Baie-Comeau. En compagnie d’artistes peintres, elle apprend, elle partage. Elle se fait des ami-e-s. Et elle peint encore et toujours. 

Depuis quelques années, l’artiste a ralenti le rythme, elle est rentrée chez elle. Son sens du communautaire, son besoin d’aider la collectivité et de participer au développement des arts, la conduit à s’engager au Centre d’action culturelle de la MRC Papineau.

En une dizaine de tableaux et en quelque quatre-vingts photos numérisées (diaporama ci-dessous), les convives présents au souper-bénéfice du Centre d’action culturelle pourront prendre connaissance des vingt ans d’une carrière qui, comme toute celle des créateurs, ne finit jamais. Un parcours qui bifurque, qui va ça et là, en plus petits pas, qui va moins loin, mais pas moins passionnée. Tout aussi colorée, toujours.

Pour prendre part au souper-bénéfice du Centre d’action culturelle de la MRC Papineau, on peut se procurer, les billets par courriel à centreculturel@videotron.ca ou par téléphone au 819 983-2027.

Les vingt ans de carrière de Louise Falstrault

jeudi 29 septembre 2016

Du style, de la ponctuation et des jugements

Quand donc ces virgules sont-elles devenues des points? Par quelle glissade les pronoms ont-ils disparu? Quand donc, les écrivains ont-ils passé outre les règles qu’ils ont apprises au primaire : sujet-verbe-complément. Une virgule et non un point avant mais-ou-et-donc-car-ni-or?

Je n’ai rien vu venir. Où est-ce arrivé en premier? En France, au Québec? Sûrement pas aux États-Unis. Quoique je ne lis je n’ai lu que des traductions, genre John Grisham, Jeffrey Archer. Qui fut le premier ou la première qui a osé? Qui a choisi la liberté comme le jour où on a décidé de « reconstruire » un dessert, qu’il soit pouding chômeur ou savarin. 

Je ne suis ni professeur ni étudiant à la maîtrise. Lectrice et observatrice seulement. Je tire donc aléatoirement, tout en ratissant large. Aussi large que mes lectures me mènent. Comme je ne suis plus à l’âge d’un cours universitaire pour étudier l’évolution du style littéraire, je folâtre ou feuillette dans plus accessible, là où je me fais croire que je n’ai pas d’âge : sur Internet. Je lis ailleurs, je cherche, je farfouille, je lis autre.

J’ai eu un haut le cri quand j’ai lu voulu lire Le jeune homme sans avenir de Marie-Claire Blais sans point aucun pendant des centaines de pages. Ou sans paragraphes.
Ce serait donc toujours ainsi, l’émergence de ces sons, ces images, quand, pensait Daniel, tout spectacle de la douleur vous pénètre, fût-elle celle que subissait un moineau, un poussin appelant sa mère quand le balayait la poussière des rues, tout enfant, si petit soit-il, de cet univers souvent en détresse, réclamait le cœur aussitôt perforé de Daniel, son regard haletant, cette patience bien qu’inutile, laquelle semblait sans limites, de voir et de souffrir par l’autre, même l’infiniment petit dans sa lutte, ainsi dans cet aéroport dont on venait d’annoncer la fermeture, les vols sans départs ni arrivées, on ne savait encore pour combien de temps,
À ne point pouvoir lire du Marie-Claire Blais, j’ai appris plus sur la lectrice que j’étais (et que je suis encore un peu) que l’auteure qu’elle est devenue. Et je m’en désole. 

Et puis quelques années plus tard, j’ai lu facilement La dévorante de Lynda Dion qui a utilisé le même processus. Je comprends donc qu’on ne peut pas aimer toutes les musiques.

Si je comprends bien l’écriture a suivi la musique : on écrit comme on joue. Comme on l’entend, comme on lit. Visiblement.

D’autres, comme Marie NDiaye dans Les trois femmes puissantes, jouent encore selon la méthode classique. Et appassionato.
Était-ce parce que cet homme débraillé avait perdu toute légitimité pour porter sur elle un regard critique ou déçu ou sévère, ou parce que, forte de ses trente-huit ans, elle ne s’inquiétait plus avant toute chose du jugement provoqué par son apparence, elle se dit en tout cas qu’elle se serait sentie embarrassée, mortifiée de se présenter, quinze ans auparavant, suante et fatiguée devant son père dont le physique et l’allure n’étaient alors jamais affectés par le moindre signe de faiblesse ou de sensibilité à la canicule, tandis que cela lui était indifférent aujourd’hui et que, même, elle offrait à l’attention de son père, sans le détourner, un visage nu, luisant qu’elle n’avait pas pris la peine de poudrer dans le taxi, se disant, surprise : Comment ai-je pu accorder de l’importance à tout cela, se disant encore avec une gaieté un peu acide, un peu rancuneuse : Qu’il pense donc de moi ce qu’il veut, car elle se souvenait de remarques cruelles, offensantes, proférées avec désinvolture par cet homme supérieur lorsque adolescentes elle et sa sœur venaient le voir et qui toutes concernaient leur manque d’élégance ou l’absence de rouge sur leurs lèvres.
Et puis il y a écrire comme on parle. La déesse des mouches à feu de Geneviève Pettersen.
C’était toujours pareil : ma mère sautait sur mon père, il la laissait s’énerver pis fesser un peu, pis il l’accotait dans un mur pour l’arrêter. Là, elle devenait encore plus folle. Elle lui crachait souvent dans les yeux pis elle le traitait de noms. Après une couple de minutes, elle finissait par se calmer. C’est là que mon père la lâchait. Il la laissait aller tranquillement parce que des fois elle faisait semblant d’être calme pour pouvoir lui en recrisser une.
Je ne conclus rien, je ne juge point, j’observe, je l’ai déjà dit. Nous (les auteurs québécois) n’en sommes plus à chercher notre identité, nous nous sentons universels, même si quelques Français – académiciens, libraires, éditeurs, journalistes — nous jugent encore à l’ère folklorique et croient que nous sommes mi-américains mi-français dans notre écriture, comme en tout. On n’a plus de preuves à fournir. On peut écrire comme on veut pourvu que les éditeurs veuillent bien nous publier et les lecteurs nous lire.

Quant à moi, même si j’ai quitté les bancs d’école il y a une bonne quarantaine d’années, je vois bien que je traîne encore ce préjugé défavorable pour tout ce qui n’est pas classique et soigné.

Mais justement, je me soigne, comme on dit. En cherchant des extraits pour ce billet, je vois que la lecture est encore la meilleure guérison : plus je lis, plus j’accepte les styles familiers, moins je classe, moins j’étiquette. Le plaisir seul guide mes choix et j’oppose à mes vieux jugements un peu d’ouverture d’esprit. Et je ne ferme plus un roman seulement parce que j’ai vu le mot « canceller », pas plus que je fermerais le livre si un jour j’aperçois « kiffé la teuf! » (aimer la fête, m’a appris Anne-Marie Beaudoin-Bégin dans La langue rapaillée) ou de lire les jeunes jouer au « gouret de salon » dans un livre étasunien traduit en France.

Je ragerais, je soupirerais, je sourcillerais, mais je poursuivrais. Ce que je n’aurais pas fait il y encore quelques années.

Et puis, dans mes recherches, j’ai constaté, une fois de plus, que d’autres ont déjà réfléchi à la question. Là>>> Ils ont même abordé les nouvelles technologies en abordant l’écriture du web et ces raccourcis des gazouillis dit twits : # et @ auxquels je m’habitue mal, faute de les utiliser. C’est comme les textos à la télévision : comme si je portais mes lunettes toute la journée. Grrr….

Et pourquoi pas une fin ouverte, sans conclusion. Parce qu’il n’y en a pas. L’écriture est sans fin.

dimanche 25 septembre 2016

Huston, Didierlaurent et Ouellette: bonheur de lire

Commencer la lecture d’un livre est toujours un acte qui me remplit de bonheur. C'est choisir de voyager vers un pays dont on a plus ou moins entendu parler, mais qu’on n’a jamais visité. 

Anticipation.

Il y eut d’abord la curiosité insatiable, la joyeuse fébrilité, la savoureuse attente.
Il y eut même avant l’écoute : quelqu’un — une blogueuse, un lecteur, un critique, qui en a dit du bien. Si la personne n’avait pas aimé, j’aurais quand même été intéressée de me faire ma propre idée.
Un couteau à deux tranchants que cet avis d’aimer ou ne pas aimer. On risque d’être déçu, de se demander ce que l’autre a bien pu trouver dans ce roman.
Il y a les préparatifs : où on le lira, quand, comment. Un café ou un cahier de notes sur la table. Ou les deux. La lecture de la quatrième de couverture, peut-être même un petit coup d’œil dans Google pour connaitre l’auteur-e. 
Et finalement on plonge. Soit les premières pages sont un délice et me voilà partie pour un temps que je ne verrai pas passer, soit les premières pages me laissent plus songeuse que ravie et déjà les questions surgissent et le doute s’infiltre : je poursuis ou j’abandonne?

En ce qui concerne Le liseur de 6 h 27, j’ai délaissé après le premier chapitre. Mais seulement parce que L’empreinte de l’ange de Nancy Huston a gagné en intérêt. Je croyais l’avoir lu il y a une bonne dizaine d’années. Il faut croire que non. Je n’aime pas tous les livres de Nancy Huston ou plutôt — parce que tout ne se résume pas à j’aime ou pas —, ils ne m’intéressent pas ou ne me touchent pas tous au même degré. Je bute sur certains, tel Les variations Golberg, et je plonge délicieusement dans d’autres, dont Bad Girl, Instruments de ténèbres. Et L’empreinte de l’ange.

Mon propos dans ce billet, ce n’est pas de résumer ce que je lis ni de rédiger une critique. Il suffit de «googler» un titre pour avoir des centaines de critiques très bien faites par des lecteurs, des blogueurs et quelques journalistes. Personnellement, je me sers de mon blogue pour essayer de comprendre ce que je ressens. De dire ce qui me passe par la tête, tout simplement. Un blogue d’états d’âme, j’avoue. Bien égoïstement.

Donc l’histoire : Safie, la bonne Allemande qui, paf, comme ça, tombe en amour d’un seul regard (un peu invraisemblable, non? Mais qu'est-ce que j'en sais moi... ce n'est pas parce que ça ne m'est jamais arrivé...), le flûtiste voyageur Raphaël qui, lui aussi, désire la jolie blonde aussitôt engagée, et le luthier hongrois Andras. Une femme silencieuse, un homme patient, un amant juif.
Je lis rarement pour l’histoire, mais si le style me happe, me retient, m’entraîne. Et écriture rare, me semble-t-il, l’auteure-narratrice parle de l'histoire dans l'histoire, et la fin surprend en ce sens.
«Mais, si c’est le cas, ça s’est passé en dehors de l’histoire. La vérité de l’histoire, c’est qu’elle [Safie] a disparu.»
L’important c’est que si les émotions sont présentes, l’histoire m’intéresse. Ce fut le cas. 

Et je suis revenue au deuxième chapitre du Liseur de Jean-Paul Didierlaurent. Nouvel auteur pour moi. Éloge d’une membre de mon Cercle de lecture. Une fois passée l’impression de décousu entre des courts textes lus à haute voix dans un transport en commun et la longue description d’une machine qui détruit des livres, c’est l’originalité des personnages qui m’a captivée. Un gardien qui parle en alexandrin, un ex-employé qui cherche — et trouve — ses jambes coupées ont été plus intéressants que le liseur lui-même. Humour léger qui fait du bien. Lecture pour laquelle on n’a pas besoin de se casser la tête ni même d’avoir du silence autour de soi. Lecture très agréable.

Normalement, j’aurais dû passer au troisième livre emprunté à mon Cercle de lecture : Survivre, survivre de Michel Tremblay. Ce fut sans compter la rentrée littéraire qui annonce la venue prochaine du tome 5 de la série Feu de Francine Ouellette. « Je le veux, je le veux, j’ai tellement aimé les quatre précédents. Fais-le venir à la bibliothèque » entendis-je aussitôt l’annonce faite. 

Ah! mémoire, mémoire, tu me fais défaut. Oui, je me rappelle d’en avoir parlé. Je me rappelle qu’il s’agissait d’une saga historique qui se passait dans ma région, qui remontait au temps de Champlain et des Algonquins. Mais c’est tout. 
Je m’empresse donc d’aller voir à la BANQ pour rafraîchir cette mémoire défaillante. Les quatre tomes sont réservés jusque tard en octobre. Il reste la bibliothèque municipale. Oh! bonheur (toujours ce bonheur de trouver un livre comme un cadeau de fête), les deux premiers tomes y sont. 
Je feuillette, je consulte les cartes, je vois des noms, tels Tessouat, Oueskarini, Kichesippi, Petite-Nation, La lièvre, l’Outaouais bien sûr. Depuis longtemps, ces noms me sont familiers parce que mon père a écrit sur l’histoire de la Petite-Nation. 

J’aime beaucoup l’écriture de Francine Ouellette : riche, fluide, soignée. Le lecteur entre dans la tête et le cœur des personnages. Rien à voir avec l’Histoire apprise à l’école: les bons Hurons d'un côté, les mauvais Iroquois de l'autre et surtout, les Robes noires qui possèdent LA Vérité. Un roman, mais très documenté, très fouillé, très réussi. Qui me donne envie de canoter sur la rivière du Lièvre et celle de la Petite-Nation pour suivre les traces de Loup-Curieux ou Lynx-des-Neiges.

Tout comme L’empreinte de l’ange, je croyais avoir lu. Peut-être le premier tome seulement? Réussirai-je à lire les quatre tomes avant la sortie du cinquième?

Écriture-facile va se taire un peu et va retourner à sa lecture.