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samedi 7 décembre 2024

Comme un miroir



«Nous avons enfin pris connaissance de la vraie nature de l’existence humaine : la parole sans emballage fonctionnel, dans sa pluralité et sa liberté. De formes, de genres, de ponctuations, de syntaxes, d’adverbes et de brides délacées.
Rien ne sera catégorisé. Tout sera diffusé. [...] Nos jours deviendront fragments d’écriture.»
Anne Hébert, si tu veillais ma tristesse, Anne Peyrouse
«Écrire, c’est l’inassouvi à quoi nous redonnons place.
Nous ne serons jamais rassasiés d’écriture. L’écriture n’est pas là pour ça. Elle ne comble pas. Elle cerne l’inassouvi. Elle le désigne sans plainte ni peur.
Écrire c’est savoir qu’on est un être fini, limité, et porteur pourtant de quelque chose d’immense.
C’est accepter de s’installer dans ce hiatus et y trouver son propre souffle.
Cela met en branle tout l’être.»
Vers l’écriture, Jeanne Benameur


Ça y est, c’est revenu. (voir note 1)
Ça finit toujours par revenir.
Lire et, après quelques lignes, quelques pages, vouloir écrire. Écrire comme. Écrire sur le même sujet : les livres, l’écriture, les écrivains. Soi. Moi.
Sauf que je n’ai pas d’histoire en route. Je ne suis pas une conteuse d’histoire, pas de personnage qui s’impose. Que moi. Ma vie. Les bientôt 75 ans de ma vie.

Il a suffi que je lise quelques lignes de Jeanne Benameur et d'Anne Peyrouse, et c’est parti tout seul.
Écrire. Sans forme précise, juste comme les pensées surgissent.
«Rien ne sera catégorisé. Nos jours deviendront fragments d’écriture.»
Relire, oui; retravailler, réécrire, oui pour que de méandre tortueux, torrent ou ravin, l’ensemble coule jusque dans le cœur des lecteurs (et oui, oui, des lectrices).

Mais encore faut-il écrire sur... Sur mes lectures? Mes voyages? Ma région? Je le fais déjà sur mon blogue, sur mon site.
Prendre le risque d'écrire sur les gens autour de moi, les gens à l’intérieur de moi. Transformés, déformés. Forcément. Plutôt les morts que les vivants pour ne blesser personne.
Dominique Fortier écrit sur Emily Dickinson ou Herman Melville.
Julia Kirninon sur Gertrude Stein.
Martine Delvaux sur Hollis Jeffcoat, Joan Mitchell et Jean Paul Riopelle.
Anne Peyrouse sur Anne Hébert. Sa mère littéraire. J'aurais plutôt des soeurs littéraires. En quittant le miroir, en regardant par les fenêtres, je trouverais bien. Je les nommerai.
De tous, Anne Hébert remporte. Souvenir de ma Belles-lettres, du huit clos dans les Chambres de bois, de Kamouraska, des fous de Bassan. Des lieux aussi, de la France, du Québec.

Pourquoi veux-je plus? Encore. Parce que ledit blogue va disparaitre avec moi?
Ce n’est pas de littérature dont j’ai besoin, mais de psychanalyse? Pour comprendre une bonne fois pour toute pourquoi je veux tant un "vrai" éditeur, et lâcher prise ou aller voir ailleurs si j’y suis. Dans le sentier de raquettes ou de vélo. Sur la plage. Ou une libraire!
Je me dis que c’est trop tard. Je me dis tant pis.

Finalement toute ma vie, j’aurai eu besoin d’une obligation. Un devoir. Qu’on me dise quoi faire.
Alors si personne ne m’appelle, ne m’oblige, ne me veut... Je ne fais d’efforts que si on me signifie clairement, contrat en main, que oui, on veut les publier tous mes fragments inclassables. Sinon, je frustre, je procrastine, je me dis à quoi bon. Je continue pour moi seule.

Et, finalement, sereine, je me réjouis de me voir dans le miroir d’une Jeanne Benameur, d’une Anne Peyrouse. Le temps de quelques pages.

Note 1:
En 2018, c'était là aussi: Je deviens elles >>>

Mise à jour/ajout:
Si j'avais une mère littéraire, ce serait Louky Bersianik. J'avais 26 ans lors de la publication de L'Euguélionne. J'ai pris deux années de sabbatique et j'ai écrit. Elle, devant.
J'en parlerai jusqu'à la fin de ma vie.  Une fois, en 2017 >>>

samedi 25 février 2017

L’Euguélionne à FemmExpo 2017

Le Centre d’action culturelle de Papineau organise encore cette année l’exposition, FemmExpo. Sous le thème On ne naît pas femme, on le devient une citation de Simone De Beauvoir (Le deuxième sexe), l’exposition présentera les œuvres de 38 femmes provenant de partout en Outaouais et d’ailleurs. 

À gauche, couverture du livre de Louky Bersianik en 1976.
À droite, sculpture de Louise Falstrault, intitulée L'Euguélionne,
en collaboration avec l'artisan du fer, Olivier Dufresne.

Comme femme, comme fille de… comme sœur de…
Comme auteure 
Je me sens à la fois fille et mère de l’Euguélionne
Peut-être seulement, finalement, une lointaine cousine
D’aujourd’hui et d’hier
Femme de cette terre, je suis de la même espèce qu’elle
Elle est venue d’ailleurs et elle cherchait sa planète positive
Je suis de l’eau d’ici et elle, elle est de l’au-delà
Je suis de fiction et de mémoire
J’ose m’en prévaloir

Je ne saurais écrire le millième de ses mots et les miens n’auront jamais la portée des siens ni leur empreinte. 
Mais je me réclame de cette filiation. Je porterai longtemps sa profonde trace, et n’en laisserai sans doute qu’une pâle traînée. Mais je ne saurai jamais me taire, pas plus qu’on ne peut arrêter de penser. Ou de respirer.

Je serai toujours gênée de tirer vanité ou prétention de cette monumentale Euguélionne, mais je n’en rougirai pas pour autant. Et puis, c’est elle qui a dit : « prétendez être et vous serez ». Il est important de perpétuer de toutes les façons son héritage. 
Pas seulement un jour par année, le 8 mars, mais les trois cent soixante-cinq. 
Même sans le dire, même sans marcher, même sans créer. 
Mais aussi en l’écrivant, en le criant, en le chantant, en marchant, en créant.


Je ne remercierai jamais assez Louky Bersianik ni celles qui parlent encore d’elles comme France Théorêt, Nicole Brossard, Louise Dupré Élaine Audet, et tant d’autres. 
Je suis de Simone de Beauvoir et de Marie Cardinal. Très peu de Marie-Claire Blais ou d’Anne Hébert. Plutôt de Françoise Loranger et de Claire Martin. 
De L’Euguélionne, assurément. 

D’autres femmes sont nées, d’autres écrivent, d’autres offrent leurs voix, mais je n’oublierai jamais d’où je viens. 

L'Euguélionne est le titre et personnage principal du roman de Louky Bersianik publié au Québec en 1976.
Je suis née en 1976. 
J’avais 26 ans et j’ai voulu devenir écrivaine.


Pour cette exposition présentée à Saint-André-Avellin du 4 mars au 28 avril 2017, Louise Falstrault, elle aussi a vu L’Euguélionne dans cette sculpture qu’elle a réalisée en collaboration avec Olivier Dufresne, artisan du fer.

Voici comment elle la décrit :

L’Euguélionne
De clé pour ouvrir la vie
De rondeurs et de courbures en ventre, en seins, en tête
De liens, debout, de bouts de bois
De spirales intestinales
De rouge sang, de rouge cœur
De plexus bleu, de mère bleue
De verre, vers la lumière
De couronne de cuivre, temps chalcolithique
Femme atypique
Femme de fer, femme à faire