Dernier jour de septembre. J’aime bien les débuts de septembre, comme un recommencement, comme un cahier tout neuf, comme une promesse. J’aime moins octobre, une fois les belles couleurs de l’automne passé, comme un ours qui doit entrer dans sa caverne, comme les feuilles qui tombent, les nuages qui se noircissent, les journées qui rapetissent, comme une fin.
Demain, vendredi 1er octobre pourtant, ça sera un beau jour, j’essaie de m’en convaincre, j’y crois de plus en plus depuis le courriel d’un éditeur qui se dit intéressé à mon roman. Demain, je lui remets ma dernière version. Dernière comme dans la dernière fois que j’imprime mon manuscrit parce que la suite ce sera le livre imprimé?
Ce n’est pourtant pas ce jour qui devrait être le plus beau, c’est celui où j’apposerai ma signature en bas d’un contrat. Mais je veux souligner chaque petit pas qui m’y mène. Je veux ressentir, laisser monter en moi cet espoir, cette possibilité qui ressemble à un début septembre et non à un automne décevant. Mais rien ne monte, ni enthousiasme, ni crainte. Comme au neutre et depuis longtemps. Trop eu de refus, trop de relevailles, trop d’essais.
Depuis 2004 que je travaille ce roman. 2004 : six ans.
Le samedi 13 novembre 2004, j’ouvrais un cahier tout neuf et j’écrivais à la main : « Puisque j’aime les biographies, que j’ai écrit la vie de mon père, je pense écrire la vie de mes ancêtres maternels ».
Ce cahier est presque plein. De dates, de noms, de remarques, de lettres de refus, de courriels échangés, de questions, de doutes, de recommencements. Des petites joies de courte durée.
Même si certaines personnes voient déjà le livre en librairie et me voient déjà en train de leur signer leur dédicace, je sais qu’il reste encore plusieurs étapes :
il faut que le manuscrit soit accepté
il faut que le contrat soit signé
il faut que le roman soit révisé par le directeur littéraire
il faut que le roman soit monté
il faut que le roman soit imprimé
Alors peut-être l’an prochain, à l’automne 2011, le livre sera en librairie. Et une autre année avant de recevoir une quelconque redevance.
Il sera quand alors le beau jour où dans mes mots, dans mon cœur qui bat, dans ma tête qui tourne, je sentirai la joie?
Pour l’instant je vois un peu de lumière, je sens beaucoup d’espoir. Mais pas encore la joie qui s’est effritée tout au long de ces six ans, à force d’être contenue.
(photo: une toute petite partie des différentes versions du manuscrit)