Les derniers mois, j’ai préféré publier des billets où je
montrais plutôt les photos prises que parler des livres lus ou des textes que j'aurais pu écrire. J’ai quand même lu quelques livres empruntés à la bibliothèque.
Tout le monde sait qu’il y a des événements bizarres dans la
vie, des coïncidences que j’observe, mais que je ne cherche pas nécessairement
à expliquer. Il y a quelques mois à l’annonce de la publication du dernier
roman d’Arlette Cousture, j’avais parlé de ma déception devant le titre anglais
« Pearl’s pub » (c'était là>>>). Ce n’était pas le seul, mais celui-là m’avait
touchée d’autant que mon admiration pour l’œuvre de cette auteure était sans
borne.
À quelques occasions, lors de mes brefs et rares visites
dans les librairies, je me risquais quand même à le feuilleter. Le cœur continuait
à me faire mal en voyant le choix (de l’éditeur? De l’auteure?) des notes en
bas de page pour la traduction des très nombreux passages en anglais, choix qu’Arlette
Cousture m’avait expliqué avec arguments défendables, je dois bien l’admettre. La
graphiste en moi, autant que la lectrice, accrochait à ce procédé.
Malgré ces irritants, je fus bien heureuse que la
bibliothécaire me montre fièrement sa dernière acquisition et m’en propose la
lecture.
La coïncidence — j’y viens — tient au fait que j’ai commencé
(et achevé tellement l’attente est longue) la lecture de Pearl’s pub dans cette
ville de l’Est ontarien où le français est en baisse constante : Orléans,
près d’Ottawa.
Mes oreilles entendaient un peu de français, surtout de l’anglais
et, le plus souvent, un mélange des deux pendant que mes yeux lisaient la même
mixture. Heureusement que je n’avais rien d’autre à faire que d’attendre que
les techniciens réparent mon véhicule récréatif parce qu’il est certain que j’aurais
laissé Angélique, Violette et encore plus Margaret/Marguerite à leurs amours.
À mon avis, Suzanne Aubry (et son éditrice, parce que je
demeure convaincue que c’est un choix qui ne revient pas qu’à l’auteure seule)
a beaucoup mieux réussi à faire comprendre aux lecteurs la difficulté d’une
Irlandaise à parler le français quand elle arrive dans un pays francophone: quelques mots ici et là en gaélique, de petites phrases vraiment courtes,
écrites en italique, qui tiennent en une ligne, ce qui fait que nos yeux sautent
l’italique et vont directement à la traduction qui suit immédiatement le
gaélique. Un procédé qui suffit amplement à expliquer la situation des
nouvelles arrivantes. Au besoin l’auteure complétait certaines informations dans la narration.
La lecture des Fanette glisse facilement alors que celle
Pearl’s Pub est fort ardue. Nos yeux s’y perdent à devoir descendre chercher d'abord la bonne ligne, puis lire la traduction des notes et devoir remonter au texte principal. Encore pire, quand la
pauvre Margaret tente de glisser des mots en français dans sa phrase, on a envie de passer par-dessus tout le passage.
Vous voyez, je ne parle même pas de l’histoire, tellement je
suis frustrée de la simple lecture. Histoire qui est très bien ficelée par
ailleurs, pleines d'émotions et de justes observations sur ce Montréal de la
fin du 19e siècle.
Quant au titre, je reste sur mes positions, bien d’autres,
en français, auraient mieux convenu. Je sais que l’auteure en avait proposés,
alors j’en veux à l’éditeur de n’avoir pas su faire preuve de plus d’imagination
d’autant que ce fameux pub, on ne l’entrevoit qu’aux trois quarts du roman,
donc ledit titre ne reflète même pas l’ensemble du livre… à mon humble avis
toujours.
Sur l’heure du diner, je suis sortie manger et j’ai
poursuivi ma lecture. De devoir commander mon repas en anglais en entendant vaguement la
télévision en anglais, d’être assise à côté de voisines qui se racontaient leur
fin de semaine en français, je ne peux nier que j’étais tout à fait dans l’atmosphère
du roman d’Arlette Cousture. Sauf qu’à ce que je sache, celle-ci est québécoise et son livre s’adresse à un
lectorat francophone. En France, où l’anglais est porté fièrement ces
années-ci, peut-être sera-t-il mieux apprécié?
Je ne sais vraiment pas pourquoi je suis si sévère envers ce
roman -- d'autant que je le répète, l'histoire est très intéressante-- ou pourquoi l’irritation née du titre en anglais, accentuée par le
procédé des phrases traduites ou du choix de les utiliser si nombreuses me font oublier le bonheur de lire une bonne
histoire, mais c’est comme ça. Je pourrais me taire, j’ai l’habitude de passer
sous silence ce qui me déplaît et trouver plutôt ce qui est bien dans mes
lectures (ou dans ma vie en général), mais c’est comme ça… cette fois-ci. J’en
suis la première désolée.
(illustration empruntée à l'éditeur)