samedi 27 mai 2023

Mots et photos



« ll y a un mois son frère est mort. Plus jeune qu’elle, il n’aura pas connu le luxe d’additionner les années. C’est son départ qui a mis la promeneuse en mouvement. Sa vie à elle exigeait une coupure. Sinon on ravale sa peine, puis on revient à ses pantoufles. À son existence engluée. »

La promeneuse, Lise Blouin 

« Notre mère aurait pu s’accommoder de cela, je crois. Deux.
Quiteria et moi. Des jumelles, simplement jumelles, normales.
Précieuses. Adorables. Elle et nous, une petite équipe.
Mais pas neuf.
Neuf, ce n’est plus une équipe. Ou alors elle n’en fait pas
partie. Neuf, c’est assourdissant. Neuf, c’est impossible, c’est sa
vie qui s’achève, une vague après l’autre. Qui ne lui appartient
plus. »
N’ayons pas peur du ciel, Emma Hooper  


« Je suis là et heureuse dans un monde où l’on se bat pour s’en souvenir. J’ai Maxime, mon mari, que j’aime. Il me fait souffrir au quotidien pour être certain que je reste en vie, m’abandonne à petit feu pour me préparer à sa mort, me trahit parfois pour me rendre plus forte, m’ignore pour que je me dépasse et qu’il puisse enfin m’apercevoir. Il dort à quelques mètres de la pièce d’où je t’écris. Il y a l’Autre. Qui ne mérite pas son nom de baptême dans mon histoire. Et il y a toi. »
Debout de vos absences, Mélanie Noël  

« Il était prévu que je m’efface, comme chacune fait la nuit, que je m’assoupisse, qu’à l’obscurité je dévoue mon temps, exempté de vigilance sur les chemins de la léthargie, que je me livre à un rêve au nom de la catharsis, prisonnière de l’inconscient de jusqu’au matin. Et alors que j’étais au lit dans le noir, nulle part entre la veille et le lendemain, le repos me parut absurde par trop d’agitation. J’étais exalté soudain. Excité sans raison. À défaut de sommeil, l’urgence de vivre transperça ma personne comme l’aiguille de la foudre dans le nuage éteint. Je devins incapable de m’engourdit dans les sables mouvants du lit, dormir c’est aussi renoncer à la vie, une mort profane, on dort ainsi qu’on démissionne, tel un suicide fugitif, mais ce soir-là, j’avais soif d’éclore, et comme les écorchés vifs, je me désolidarisai de toute forme de mort. »
Nue, Salomé Assor  


En lisant les extraits des livres ci-haut nommés, je n’ai qu’une hâte : lire la suite.

J’ai compris cette nuit, entre 4 et 6 heures — heures pendant lesquelles je suis souvent réveillée, heures où tant d’écrivains se lèvent pour travailler, heures, comme l’écrit si bien Salomé Assor, où trop d’agitation, excitée sans raison — pourquoi ce sont ces livres-là que j’aime en tout premier et non d’autres.

On n’y entend pas le son du ruisseau ni le bruit d’une cascade lointaine. On n’y voit pas le soleil rougeoyant à travers les nuages, les montagnes violacées qui annoncent la chaleur du jour.
Tout de suite des personnages. Tout de suite, et pendant plusieurs pages, des pensées.

Je veux bien que les auteur·e·s fassent appel aux cinq sens pour des descriptions plus prégnantes. Personnellement, quand je lis, je ne veux pas nécessairement voir ou entendre ou goûter.

Quand je veux voir, je ne lis pas, je regarde des photographies ou je me remémore des lieux aimés.
Quand je veux entendre, j’écoute de la musique.
Cette nuit, j’ai pris plaisir à me remémorer la belle chute aperçue sur la route 323 près de Tremblant. Je la voyais. Comme une image, comme une photo. Je n’ai eu nullement besoin de mots.
Et j’ai réentendu la petite cascade du ruisseau Sam près de chez nous. Quelle musique apaisante. Je n’ai eu nullement besoin de mots.
Alors quand je lis, je saute très souvent, presque toujours les descriptions. Dans les livres, je veux des personnages, des relations, des émotions. Pas un film.

Pourtant, oui, quand j’ai écrit mes romans, il y avait du soleil ou des tempêtes ou des cris. Mais je le sais maintenant, c’était pour plaire aux lecteurs, aux éditeurs. Comme une norme. Une prescription technique. Une règle apprise dès ma cinquième année dans ces chères compositions que je détestais : décrivez l’automne.

Aujourd’hui, très contente de lire des textes sans trop de descriptions. Direct au but.
Pourtant, paradoxe ambulant, j’ai beaucoup aimé Adrienne Mesurat de Julien Green. Tout le contraire... et puis peut-être pas tant : de longues descriptions des états d’âme, ce n’est pas comme faire le tour interminable de la maison ou du jardin.
 
Et merci à Biblio-Outaouais de nous offrir l’onglet « Suggérer un achat ».
Petits bonheurs du jour. Je me sens gâtée. 
Aujourd'hui, j'aime les mots. Demain, j'aimerai les photos.

mardi 2 mai 2023

Je voudrais l'aimer encore!



Je voudrais encore l’aimer. Au moins la voir. La fréquenter.
Comme je l’ai déjà aimée. Tant aimée, tant fréquentée avant qu’elle devienne ce qu’elle est... infréquentable.

De nuit en tout cas. De jour, on peut encore s’en accommoder. Si on accepte de la payer.
Elle a tant à offrir.

Mais elle est devenue inaccessible. Indisponible.
Même hors saison, même la semaine, même quand les gens normalement sont au travail.

À croire que tous les retraités veulent la fréquenter et l’aimer autant que moi, en même temps que moi?

Et ce qui est disponible ne nous convient pas, ne nous convient plus.
Ou bien je ne comprends pas la technologie!
Y a-t-il un truc? Comment changer les points rouges en petits ronds verts?

« Réserver », qu’ils disaient!
Mais il n’y a rien à réserver. Tout ou presque est déjà « non disponible » ou ne répond pas aux critères.

Sépaq, 
je voudrais tant t’aimer encore. Pour cela, encore faudrait-il que je te voie, que je te fréquente, que tu veuilles de moi.

Source des photos: Internet, souvent site de la Sépaq.

vendredi 14 avril 2023

Lire, mais dehors

Cinq heures du matin, le vent du nord-est annonçait le mauvais temps.
Âpre froidure qui s’infiltrait par la fenêtre ouverte.
Bruits de tonnerre et grésil. Suivra le verglas.
Le printemps qui tardait. Les nuits de pleine lune.
Rien pour avoir envie de se lever.
Mon esprit déjà sur le pied de guerre : les phrases se pointent déjà.

Lire au lit?
Ou me lever et écrire tout ce qui me passe par la tête.
Sans point ni virgule
Sans paragraphe
Ou sans enchaînements évidents, cohérents pourtant.
Comme ce que je lis ces jours-ci.

Comme Philippe Haeck — je ne connais-sais pas — découvert cette semaine.
Dans Nous sommes des énigmes
« Aux âmes curieuses, à qui a envie d’une seconde naissance, aux poires juteuses, cette courtepointe de pièces ramassées ici et là, sac à outils, l’ouvrir n’importe où — il n’y a que du milieu. Voir de différents angles comment le monde la vie nous malmènent réjouissent, ce qui arrive ou pas dans ma vie, répondre à quelques questions—dis-moi ce qui t’émeut, comment tu penses, avec qui tu vis, si tu as peur de mourir, comment ça se passe vieillir.»
Entre deux phrases, en association d’idées sans doute, des citations, des extraits de ses lectures.
Une bibliothèque à lui seul.
Vérification dans Biblio Outaouais: autre livre de lui, de 2018 : Il y a tant d’il y a
Même style. Mêmes personnages d’Adam et Ève.
« M’attirent âmes entremêlées, amitiés, cœur à cœur, complicités, conversations tranquilles, intimités, paroles allant loin, tête-à-tête. Que l’étude serre, regarde, prenne le monde. Malgré des encornages de bélier-capricorne, des erreurs d’aiguillage, Adam et Ève ont encore envie de vivre ensemble à cause d’une histoire d’amour [...] »
J’en suis là. À lire des extraits question de savoir si je vais emprunter le livre, si je vais l’acheter.
Et si même je vais le lire.
Et même une fois en main, il arrive qu’après cinquante pages, un autre m’attire déjà.

Il fut un temps où je prenais le temps de publier un billet de blogue sur mes lectures. Et comme tant bien des domaines, je ne tiens pas longtemps. Pas assidue, pas disciplinée. Paresseuse au sens où je me demande si ça vaut la peine. Besoin d’écrire oui, mais de moins en moins besoin de retravailler le texte en vue d’une publication quelconque. D’autres occupations plus urgentes, ou plus intéressantes.

Je ne sais plus très bien comment parler des livres que je lis. À part qu’ils me donnent envie d’écrire à mon tour. Pas tous, certains. Jusqu'à copier le style. Comme un jeu, voir si je peux encore.

Pour lire ou écrire, encore faut-il prendre le temps. Que je pense n’avoir plus. Ou en tout cas moins.
Surtout quand l’hiver est fini.
Après le verglas, le printemps, la première grive — merle d’Amérique. La première outarde — bernache. Les rivières débordent. Dehors. Gratter, pédaler.

Les mésanges n’ont plus rien à manger.
L’écureuil les en a privé.
Le bleu du ciel m’interpelle plus que les phrases de Philippe Haeck.
J’y reviendrai sûrement ou je lirai sur ma galerie, dehors.
Penser à sortir mes chaises d'été.

dimanche 19 mars 2023

Encore le livre bleu des Deguire


Le matin, avant même de me lever, je me sens capable de tout.
Je vois grand, je vois beaucoup.
Tout me tente.

Ces jours-ci, comme c’est encore l’hiver, ce sont surtout des activités à l’intérieur qui m’attirent. Ça tourne autour de la recherche sur ordinateur.
Je prépare des escapades à Cape Cod et dans le Rhode Island, le tour de l’Abitibi Témiscamingue. Je cherche quoi faire, où coucher. Je prends des notes manuscrites. J’adore toujours écrire à la main dans des cahiers.
J’ai des cahiers pour la généalogie, les voyages, mon journal. D’ailleurs que ferai-je de tous ces cahiers? Je les jette? Qui pourrait bien les lire, je ne les relis pas moi-même?

Aussi le « Livre bleu », comme je l’appelle, m’obsède. Ce « Livre généalogique de la famille » qu’a tenu ma grand-tante à partir du 1er janvier 1918. Livre qui m’a beaucoup – énormément — servi dans mes recherches pour l’écriture de mon roman Les têtes rousses. En 2004.
Je croyais en avoir fini de ce livre, je voulais le donner au Musée des Sœurs Sainte-Croix, mais je ne parvenais pas à les joindre. Jusqu’à la semaine dernière.
J’étais toute enthousiaste en recevant leur courriel. J’avais même pris rendez-vous.

Et me voilà prise d’un doute. D’un questionnement comme moi seule sait y faire :
Est-ce que je fais bien? Suis-prête à y renoncer? Est-ce le meilleur endroit? Ne serait-il pas mieux dans une société de généalogie? Qu’adviendra-t-il? Servira-t-il à quelqu’un? Contient-il de si précieux renseignements? Et les droits de consultation? Et les droits d’auteurs? N’importe qui pourra publier les photos, réécrire les pages sans mentionner la source?

C’est comme laisser aller le fruit d’un travail ou un peu donner au suivant. Mais aussi peut-être le regretter si j’éprouve un jour le besoin de trouver des info que je sais n’être que dans ce livre.

C’est comme nos sites Internet, que deviennent-ils après notre mort?
Le site Internet de Gilles Deguire, www.mesancetres.ca, est encore sur le Web. Si précieux pour qui cherche des informations sur les Deguire. Comment savoir combien de temps encore?

D’une idée à l’autre, je me demande si, à partir des informations contenues dans le « Livre bleu » je ne devrais pas écrire une monographie sur MES Deguire. Même que dans ma fébrilité du matin, je pense même des monographies, au pluriel. Sur les Deguire, les Falstrault, les Nantel, les Lamarche. Mais je retombe les pieds sur terre. Le peu d’informations que j’ai sur ces derniers patronymes est déjà tout sur mon site Internet. Que pourrais-je en dire de plus?

Toujours contribuer à une certaine pérennité. De ma vie, par une trace. Sans en juger l’utilité ou l’importance.

Après tout, je fus très heureuse de trouver la monographie des Lynch à la Société canadienne-française. Société intéressée elle aussi à acquérir le livre de mon aïeule.
Re-doute, re-questions. Suis-je prête à le laisser aller? 
Avant de prendre une décision, j’ouvre à nouveau le livre bleu. Précautionneusement, délicatement. Après tout le livre a plus de cent ans. Sera-t-il numérisé? Comment le contenu sera-t-il sauvegardé?

Ai-je bien gardé toutes les photos? Et toutes les pages importantes?
Plusieurs de ces photos sont déjà sur mon site >>>.

Je relis encore quelques lignes de cette « Biographie de Papa & Maman » écrite en 1915 par Annie Deguire, alors sœur Marie de Saint-Philéas. Adolescente, je pleurais chaque fois en lisant cette histoire d’orphelins.

Retour à la case monographie écrite. Et si je transcrivais cette histoire?

Et comme chaque matin, l’esprit s’essouffle, la fébrilité s’apaise.
Aujourd’hui, je m’habille en mou, je ne sors pas, j’écris.

vendredi 17 février 2023

Je suis de neige et de mots

Je ne suis pas du chemin Roxham
Je ne suis pas de Colombie ni d’Algérie
Ni de guerre ni d'agression
Je ne suis pas de Paul Daraîche ou d’Elvis Presley
Ni du temps de Balzac ou de Mozart
Ni même des Beothuks ou d’Évangéline

Seulement d’avril 1950
D’un vendredi saint qui reviendra cette année
Des sœurs Sainte-Croix et des sacrements de l’Église
De cette province que mes parents auraient voulu pays
De cette Petite-Nation que j’ai choisie

Je ne peux parler au nom de personne
Tout juste du mien
Dois-je pour autant me taire?
N’ai-je pour autant rien à dire?

Devant mes yeux, la plupart du temps des grands pins rouges
Et le blanc de la neige ou les érables colorés
Parfois un renard, souvent des mésanges et des écureuils

Comme Claude Gauthier, je suis de lacs et de rivières
Je suis un beau voyage 
 
Mes ami·e·s et ma famille sont de nature et de battures
De mer et de terre
De livres et de cahiers
D’art et de musique

Mon amour est de corps et d’esprit
De mes mots et de ses tableaux
De rires et de larmes
Du meilleur et du pire
Du temps et des silences
D'espace et de voyages
De toujours et à jamais
Je l’espère chaque jour.

mercredi 15 février 2023

Entre ciel et terre

L’automne dernier j’avais vu ce concours :
Concours «Écrire l’arbre»
Un appel de textes invite les personnes à célébrer un arbre qu’elles affectionnent particulièrement.
«Des professeures et professeurs du Département d’études littéraires organisent un concours d’écriture ouvert à toutes et à tous, consistant à soumettre «un texte consacré à un arbre réel qui pousse sur le sol québécois et avec lequel on entretient un lien privilégié, ou que l’on souhaite spécialement mettre en valeur.»
Pour ce concours, sans hésiter, j’avais choisi d’écrire sur les pins rouges avec lesquels je vis depuis cinquante ans.
Mes pins.

Je n’ai pas gagné.
Bien hâte de lire le texte primé.
Je publie donc le mien, ici.

Entre terre et ciel

Ils m’arrivaient à l’épaule.
Ils avaient cinq ans, j’en avais vingt.
Ils grandissent encore. Une couronne de branches par année. Des branches qui, faute de lumière, deviennent moignons après quelques saisons.
Et je les ai aimés tout de suite.

Ces petits cônes déjà élancés sont tous nés la même année : 1967.
Je reconnais des pins, j’ai appris qu’ils étaient rouges. Plus petits que leurs cousins, les pins blancs. Une plantation encouragée par le gouvernement, aménagée par une famille et un mouvement 4H.

Les palmiers et les figuiers du sud m’ont tenu compagnie certains hivers, les arbres géants de l’Ouest canadien m’ont impressionnée, les tuckamores sauvages de Terre-Neuve m’ont attendrie.

En revanche, mes pins rouges, oui, mes pins — nous nous sommes apprivoisés —, sont devenus mes amis, mes amours. À la fois apaisement et admiration depuis cinquante ans.

Pendant mes convalescences solitaires, je leur ai confié mes peurs et mes larmes. Mes mains sur l’écorce rude, les yeux fixés sur les aiguilles jumelles qui cherchent le ciel, le calme est revenu. Chaque fois.

Ils m’ont enveloppé de leur courage, de leur force et m’ont parlé de leur longévité. Leurs cimes m’ont bercée de leurs valses rassurantes.

Ils me protègent du soleil trop ardent l’été, et des violentes bourrasques de neige, en hiver.

Ils enveloppent maison, remise et atelier. Lors d’expositions, on accroche des tableaux sur les fûts, et on installe des sculptures sur des troncs. En marchant dans les allées, les visiteurs ont l’impression d’entrer dans le chœur d’une cathédrale. Je conte l’histoire de ce cloître et j’explique les embranchements des pins.

Ceux plus exposés au soleil surveillent le grand champ de pommes de terre d’en face et rougeoient lors des plus beaux couchers de soleil. Ils accueillent les geais bleus, les phébis et les mésanges qui viennent parfois s’aimer. En croassant, les mainates se perchent sur les cimes. Les écureuils bruns s’offrent un buffet de cônes à volonté. J’aime tout d’eux même si je n’ai encore goûté aux jeunes pousses doubles ni distillé leur résine, parait-il bienfaisante.

Mes grands pins n’ont jamais connu les champignons ou les papillons nocturnes. Laqués de pluie ou lourds de givre, ils resplendissent de santé. Depuis quelques années, dans les rares éclaircies, des bouleaux et des érables, le rouge et l’ocre colorent le décor forestier dans une magie de clair-obscur.

En cinquante ans, j’en ai fait couper quelques-uns. Les plus près des bâtiments. J’en ai vendu. M’en ont-ils voulu? Je ne les ai jamais connus revanchards. Je les ai coupés pour ne pas étouffer, pour respirer. Dociles, ils ont servi de charpente pour un atelier d’artiste.

Ils m’ont fait peur le 21 mai 2022, à 16 heures 13. Sous la force du vent, certains ont craqué, cassé. Dans le sol sablonneux, leurs racines étalées n’ont pas suffi à les retenir. Cruel destin, pourquoi ce vent violent -- nommé derecho nous a-t-on appris -- vous a-t-il abattu en trois secondes? Vous, les pins rouges, les résistants. Pourquoi vous, plus que tout autre espèce, plus que les feuillus fluets? Pourquoi vous, mes amours, mes fidèles? Vous deviez me survivre un bon 150 ans encore. Je vous voyais en maisons, en sculptures, au moins en poteaux de ligne. Finir en copeaux de bois, en bois de chauffage, quelle déchéance!

Chez nous en tout cas, plusieurs d'entre vous avez supporté l'épreuve.
Vous m’avez montré votre vulnérabilité. Je sais maintenant votre fragilité à l’enracinement.

Je vieillis, vous êtes encore jeunes.
Bientôt, je m’endormirai à vos pieds.
Je vous regarderai grandir encore.

D’en haut cette fois.



mardi 14 février 2023

De l'amour des mots




14 février
Je devrais parler d’amour.
Je vais parler de l’amour des mots alors.

Comme souvent quand je suis seule, devant la mer, la nuit, en auto, à vélo, les mots affluent.
Pour raconter, pour me questionner, pour revoir les scènes, l’événement. Pour évacuer les émotions. Pour reformuler les phrases que je n’ai pas dites ou celles que je n’aurais pas dû dire.

Lors de mon retour de Gatineau, seule dans mon auto, j’avais déjà un titre de blogue : Hier. Peut-être Hier encore. Comme la revue du Centre régional d’archives de l’Outaouais.

J’ai vu Michèle Bourgon, elle lançait son livre Rendez-vous!
J’ai reconnu Raymond Ouimet — justement un des rédacteurs et responsable de la revue Hier encore.
Puis, j’ai croisé Claude Larouche du Comité du patrimoine de Ripon à qui j’avais parlé le matin même puisque je m’occupe de monter leur bulletin L'écho des montagnes..
Et belle surprise, j’ai reconnu Lysette Brochu que je n’avais pas vu depuis... belle lurette.

Avec moi : cinq écrivains, cinq retraités, trois ex-professeurs. Je les connais tous. Ils ne se connaissent pas tous.
C’était hier.
Quand nous nous réunissions dans des ateliers d’écriture.
Quand nous nous voyions au Salon du livre, en tant qu’auteur. e. s.
Quand les éditions Vents d’Ouest et les éditions Vermillon existaient.
Quand on était publiés en Outaouais. Quand on espérait l’être pendant des années.
Avant que Michel Lavoie et Jacques Flamand ne décèdent et que les maisons d’édition ferment.
Avant.

Aujourd’hui, on écrit encore. Pour soi bien souvent.
On envoie parfois nos manuscrits chez des éditeurs reconnus. On attend. On espère. On réussit parfois.
Sinon, on envisage le plan B : l’auto-édition.
Ils s’informent, me questionnent sur les étapes, le prix. Je leur réponds : révision, montage, impression, distribution. Je peux m’occuper du montage. Leur donner des noms d’imprimeurs.

Hier, je les côtoyais comme auteure.
Aujourd’hui je les rencontre en tant que graphiste et lectrice.
Hier, c’était le lancement de Rendez-vous!, un livre de nouvelles écrites par Michèle Bourgon.
Demain, peut-être celui de Claude Larouche ou celui de Raymond Ouimet.
Dans dix jours, le Salon du livre, si je les rencontre à nouveau, ce sera comme visiteurs.
Nous parlerons de livres, du français, de l'édition en Outaouais.
Parce qu’hier, comme aujourd’hui, nous sommes des amoureux des mots.

Site de Lysette Brochu >>>
Blogue de Raymond Ouimet >>>
Blogue de Michèle Bourgon >>>
Page Facebook de Claude Larouche >>>

mardi 7 février 2023

Janvier en couleurs


En janvier, la Floride. Encore une fois. Une dernière fois?

À quinze minutes de la mer. Le boardwalk en vélo. Un « studio Pet friendly » sympathique. Des restaurants avec terrasses, des vraies.

La ville aussi.




Quand même des petits coins plus tranquilles.





Et puis une visite au RV Resort où nous avons passé quelques mois d’hiver. Le plus beau coucher de soleil du mois.

  

Un retour au pays blanc. La froidure mais aussi l’émerveillement. Encore.



mercredi 30 novembre 2022

Autour du 30 novembre 2022

30 novembre 2022: entre dates et écrivains.

Jacques Lamarche en 2000
Mon père aurait eu 100 ans.

100 ans aussi, demain, pour le terrible feu de Terrebonne. Je le sais parce que mon père a toujours dit qu’il était né le soir du feu de Terrebonne (en fait, il est né la veille) et qu’à cause de ce feu, son oncle n’avait pu venir à l’hôpital voir sa sœur.

Un autre événement qui s’est produit autour de sa date d’anniversaire : l’écrasement d’un avion à Sainte-Thérèse de Blainville. Ses deux meilleurs amis, Mona Langlois et Albert Roy, sont morts ce jour du 29 novembre 1963. (Ci-dessous, lien vers la photo)

Cette semaine, Nicole Brossard a reçu le prix Gilles-Corbeil. Ma famille l’a connue en 1969, au début de sa carrière. Elle a été la première lectrice d’un de mes manuscrits.

Mon père a-t-il rencontré Antonine Maillet? Probablement, mais hier, j’ai écouté l’entrevue qu’elle a donnée à André Robitaille. Julie Mainville en parle dans le blogue télé de Radio-Canada. Elle a retenu la même phrase que moi :
J’avais besoin de cette espèce de respect que donne la distance. J’avais besoin de la perspective et de la nostalgie. On n’écrit pas si on ne s’ennuie pas, si on n’a pas quelque chose à dire qui vient de très loin.
Ce matin, donc je dois être nostalgique. Envie de me rappeler ce que le 30 novembre représente pour moi. Envie de relire sur ces écrivains: leur vie, leurs livres. 

Lien vers écrasement de l’avion >>>
Lien vers l’entrevue d’André Robitaille avec Antonine Maillet >>>
Lien vers Jacques Lamarche>>> 

samedi 29 octobre 2022

Exercice pour se remettre en forme

Ceci est un exercice. Écrire ce n’est pas comme la bicyclette, c’est plutôt comme la course à pied : il suffit d’arrêter d’écrire quelques jours pour être rouillée, devoir recommencer à presque zéro parce que l’esprit est un peu engourdi. Et probablement ne pas trop savoir où on va. Y aller quand même. Quitte à s’arrêter plus souvent.

Donc le dernier mois, dix jours de Covid, de menus travaux d’automne (ai-je dit menus? Ce fut de gros travaux, suite du derecho de mai, mais menus pour moi qui ne fut qu'une aide) et des jasettes entre amies m’ont occupée le corps et l’esprit. Malgré tout, quelques lectures m’ont comblée! Mais lire, c’est un peu comme écrire : faut avoir la tête à ça.

Annie Ernaux a remporté le Prix Nobel, en feuilletant son livre lu en 2015, Écrire sa vie, je m’aperçois que je n’ai pas lu Mémoire de fille. Ce qui fut fait. Il est vrai qu’elle se répète, mais quel·le auteur·e ne le fait pas? Suis heureuse de constater qu’elle n’aime pas les étiquettes:

« Lorsque quelqu’un referme un livre qu’il a lu, il ne se demande pas s’il a lu un roman ou un récit, il sait juste s’il a lu un bon ou un mauvais livre. »


Ce qui me donne à penser que je lis pour les mêmes raisons que j’écris : pour comprendre ma vie, et si possible LA vie. J’ai lu des livres de philosophie, de psychologie. Mes préférés ces années-ci : les récits. De vie.

«[...] nous n’avons qu’une vie alors, lire celle d’un autre humain agrandit et prolonge la nôtre. Pourquoi ? Pour reprendre le contrôle.
Écrire c’est reprendre le contrôle. Le contrôle sur le vécu vécu.» 
(Aline Apostolska dans un article sur Annie Ernaux)


Dans cette thématique du « je », j’ai enchaîné avec La lettre aérienne de Nicole Brossard. À lire lentement.
« Je se censure partout dès qu’il s’écrit »

Visiblement, je cherche un miroir. Voir ma vie écrite dans un livre pour voir où elle va après avoir retrouvé ce qu’elle a été ailleurs que dans mes souvenirs. Plus je vieillis, plus il n’y a que moi qui m’intéresse. Plus de temps à perdre avec ce qui ne me rejoint pas.

Entre deux récits de vie, je me suis laissé tenter par Les marins ne savent pas nager. J’ai beaucoup aimé les 200 premières pages. Le décor de l’île : je me revoyais à Terre-Neuve. Le vocabulaire très riche et très autre siècle. Toute mon admiration à l’auteure pour son travail original. Mais pas de conflit à résoudre, pas d’attachement réel aux personnages. Donc pas d’identification à part cette île dans laquelle j’irais bien habiter... deux semaines. Y lire sûrement.

Je suis revenue à plus personnel, j’ai enchaîné avec Quand viendra l’aube de Dominique Fortier.
Quand je lis : « je ne vois pas quand les mots reviendront; j’ignore s’ils reviennent jamais ou s’ils ne font que nous visiter une fois pour tourner les talons, dépités, quand on tarde à leur ouvrir la porte », ça me pousse à « ouvrir la porte » pour voir si mon besoin d’écrire s’est envolé.

Au lieu de me dire que Dominique Fortier a été chanceuse d’avoir été assistante de recherche de François Ricard, chanceuse d’avoir poursuivi des études en littérature, je me demande plutôt en quoi j’ai été chanceuse dans ma vie. La liste est longue certes et chaque « chance » m’a menée là où je suis et a fait de moi ce que je suis. Mais (toujours ce mais qui dit le doute et fait croire a une insatisfaction) quelles autres chances aurais-je pu avoir pour être... Et chaque fois je me demande être qui? Qui aurais-je tant voulu être? Je cherche dans les livres ce « qui », ce « je ».

Dans ce récit, Dominique Fortier nous parle de la mort de son père, de sa fille, de ses promenades dans le Maine... et de son écriture. À la fin elle se demande :
« Ces pages tracées pêle-mêle pendant des semaines dans les heures d’avant l’aube auront-elles éclairci quoi que ce soit? Je n’en suis pas sûre. À qui sont-elles aujourd’hui destinées? Je ne saurais pas davantage le dire. Aurai-je réussi à ménager entre les lignes l’espace nécessaire pour que l’on arrive malgré tout à y déchiffrer ou à y déposer des bribes de sa propre histoire? Je l’espère, sans trop oser y croire. »
Je lui ai répondu Oh que oui! Parce que si je n’ai pas de fille, mon père est mort, j’adore la mer, et évidemment... les mots.

Puis, sans me souvenir comment, je suis passé à Hantises de Frédérique Bernier.
« [...] En attendant d’être plus courageuse que sa peur, on convoque ses auteurs, on se pare des références qui tapissent sa bibliothèque intérieure, espérant que l’écho des voix admirées couvre les réverbérations muettes et criardes de la terreur qui s’agite en soi. Dire ne semble admissible qu’en rétrospective, quand l’aventure est derrière soi, alors que, rescapée de la grotte, on sait que l’on n’y laissera pas sa peau et sa raison. »
(Hantises, Frédérique Bernier)

Il y a aussi :
« Dévorant Les vagues de Virginia Woolf, il y a de cela plus de quinze ans, j’ai le souvenir de m’être dit, comme si je me révélais alors à moi-même une vérité capitale, que vivre avait valu la peine ne serait-ce que pour cela, pour avoir lu ce livre. Ces pages qui m’avaient secouée, mise sens dessus dessous comme un raz de marée, venaient justifier mon existence. »

Et comme je n’ai pas réussi à être happée à ce point par les livres de Virginia Woolf (n’en ai terminé aucun, sauf Une chambre à soi), peut-être ne suis-je pas comme ces lecteurs et lectrices — dont Frédérique Bernier, visiblement — pour qui un livre réussit à justifier l’existence. Ou je n’ai pas encore trouvé LE livre. Alors je cherche. Je trouve par petits bouts. Des extraits ici et là. Et me voilà à noter des phrases marquantes, à citer des auteur·e·s, comme tant d'écrivains le font ces années-ci.

Voilà, fin de l’exercice pour aujourd’hui.
Je m’en vais me faire vacciner. Contre l’influenza puisque paraît-il, il faut attendre trois mois avant une nième dose si on a eu la Covid.

Et vous, dites-moi vos occupations, vos préoccupations d'hier ou de demain.


lundi 3 octobre 2022

Ma Petite-Nation... encore et pour toujours

Avant le sujet, un trop-plein. Il ne s'agit pas du livre que vous voyez, celui-là il est formidable!

Il faut quand même que je le dise, même si ce n'est pas bien de commencer par du négatif. J’ai râlé, j’ai péroré, j’ai déblatéré contre un livre paru en 2021 (que je ne vous montre surtout pas pour ne pas trop le faire exister), mais que je n’ai vu que cette semaine. Le pire cas que je connais : sur la couverture, un titre de trois lignes en anglais; à l’intérieur, une dédicace en anglais, des citations en anglais... et les sous-titres des poèmes en anglais... jusqu’à la page 17! Pourtant oui, les poèmes sont bel et bien en français. Grrrr!

Comme je me suis déjà exprimée sur ce sujet qui me hérisse au plus haut point dans le billet du 30 août, je passe à ce qui, ces jours-ci, me réjouit, ravit mon esprit, s’adresse à mon cœur.

Pays littéraires du Québec qui date de 1998. Moi qui aime voyager en cherchant les traces de tel ou tel écrivain, en visitant les lieux avec leurs mots, comment suis-je passée à côté de ce livre toutes ces années? L’auteure, Denise Pérusse, s’exprime ainsi en parlant de son livre : « [...] j’ai sillonné le vaste territoire québécois pour repérer les sentiers ouverts par nos écrivains. Remonter aux sources de leur inspiration, mettre en lumière le décor, le cadre qui a titillé leur fibre littéraire et surtout donner au lecteur d’ici et d’ailleurs l’envie de découvrir le Québec à travers leurs œuvres. »
Un livre à emporter, à laisser tout près de soi quand on traverse telle ou telle ville et qu’on s’arrête dans telle ou telle rue. Qui m’a donné envie de revoir Louiseville, Yamachiche, Saint-Casimir, le Chenal du Moine, Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier. De lire et relire Alain Grandbois, Jacques Ferron, Anne Hébert, Gabrielle Roy.

J’aimerais bien une nouvelle édition avec des écrivains qui ont émergé depuis.

Tout en lisant les magnifiques descriptions de ce guide des lieux d'écrivains, je me demandais qui présente aussi bien ma région.

Quel écrivain serait de la « géographie littéraire »? Qui immortalise la Petite-Nation? Les romanciers ou poètes ou bédéistes d'aujourd'hui dépeignent-ils autant les maisons, les terres, les rivières que les écrivains des précédentes générations?

Le nom de Jean-Guy Paquin me vient à l’esprit. Des livres qui nous font connaitre les lacs, les rivières, les Weskarinis, ces gens d’avant Papineau, d’avant le château Montebello, d’avant le tourisme.
Lien vers les livres de Jean-Guy Paquin >>>

Je dirais aussi Jean-Paul Filion, né à Notre-Dame-de-la-Paix, mais on l’associe plutôt à Saint-André-Avellin.
Lien vers biographie de Jean-Paul Filion >>>

Sur la presque centaine de publications de mon père, Jacques Lamarche... sûrement plus d'un texte.

Pour écrire un texte valable sur ce sujet, il me faudrait consacrer plusieurs mois, voir une année pour rapailler toutes les informations. Ça ne fait pas partie de ma liste de «choses à faire avant de mourir».

Tout de même, en pensant aux compositions obligatoires de mes années scolaires, je me rappelle que j’étais assez nulle en descriptions. La quinzaine de villes que j’avais connues ne m’émouvaient pas au point d’avoir envie d’en parler. Ni en bien ni en mal.
Pourtant, à la fin du siècle dernier (mon Dieu quel âge ai-je donc pour pouvoir parler du XXe siècle?), j’ai commencé à côtoyer des artistes peintres. Pendant que Louise Falstrault et Marthe Blain croquaient sur le vif un paysage, j’écrivais sur ce qu’elles regardaient. Et là l'émotion montait.
Je me suis enracinée dans cette Petite-Nation choisie. Entre autres avec des mots, d'amour j'ose croire.

Pour rappel, ces mots publiés il y a vingt ans.

                            


jeudi 22 septembre 2022

Entre été et automne : septembre


Départ au début septembre quand c'était encore l'été. En shorts et sandales. Le cœur au beau et chaud.

Retour à la mi-septembre quand c'était déjà l'automne. En pantalons et souliers. Le cœur un peu flâneur.

Aujourd'hui, devant un arc-en-ciel qui dit le soleil et la pluie, à entendre les outardes et à voir les érables rouges, enfin un peu de temps pour réunir idées et photos.

Entre la fin de l’été et le début de l’automne, il y eut le fleuve, la mer, les bateaux, pas de baleines, les galeries d’art de Baie-Saint-Paul et de La Malbaie, les mosaïcultures à Québec, le zoo Miller en Beauce, la côte de Saint-Joseph-de-la-Rive. Et de retour à la maison, la joie de revoir les couchers de soleil qui repoussent la petite voix qui pense à « casser maison », la lecture du livre du « 12 août » enfin reçu. Écrire un peu. Mais aussi les travaux, les obligations.

Entre ciel bleu et nuages gris, ne pas succomber à l’humeur chagrine du temps qui passe. Toujours trop vite.


dimanche 4 septembre 2022

Parlons d'art figuratif

Chez l'artiste peintre Louise Falstrault, en 2008

C’était en 2008, c’aurait pu être en 2000... c’était la fin de semaine de la Fête du Travail. C’était surtout une des tournées des ateliers des Créateurs de la Petite-Nation. Une douzaine d’artistes peintres et artisans, tous professionnels au sens où c’était leur principal revenu.

Des artistes peintres figuratifs pour la plupart.
Et la tournée était très courue. Jusqu’à 2000 visiteurs certaines années.

Si j’en parle, c’est que dans les medias, il est question de la rentrée : de nouveaux livres, de nouveaux spectacles, de nouvelles émissions télévisuelles, de nouveaux films... et des expositions dans les galeries et es musées.
Mais de quelles expositions s’agit-il? Que des artistes en art contemporain! Que de l’abstraction! Pourtant, les artistes peintres figuratifs existent encore, produisent encore. On peut voir leurs œuvres dans des symposiums, dans des expositions régionales, dans les galeries de Montréal, de Québec, de Charlevoix, des Laurentides.

Pourquoi les journalistes n’en parlent-ils pas? Pourquoi ne les voit-on pas dans les médias? N’y a-t-il donc que les arts qui s’étudient dans les cégeps et les universités?

Comme chaque mois de septembre, je vais me promener. Ce fut déjà Cape Cod, la Gaspésie, les parcs de la baie Georgienne. Cette fois (encore) Charlevoix. J'entrerai dans toutes les galeries d’art à Baie-Saint-Paul et à La Malbaie. Même chez quelques artistes qui ouvrent leur atelier au public.
Je vais me délecter des paysages, des maisons, des humains que nos artistes québécois ont peint et peignent encore. Le groupe des Sept, les membres de l’institut figuratif, les nouveaux comme les anciens artistes des symposiums. Et me souvenir de ces belles tournées des Créateurs de la Petite-Nation.

D’ailleurs, les Créateurs existent encore et cette année, ce sera le Festival de l’argile à Plaisance les 11 et 12 septembre.


mardi 30 août 2022

Ange et démon à l'aube

Encore couchée, j’ouvre ma tablette, je lis les nouvelles du jour, je cherche les nouveautés littéraires. Dans La presse+, sur Facebook, je m’attarde chez Babelio. Je comprends enfin que le roman Pascale de Françoise de Luca est le Reine réédité en 2015. Dommage, je croyais que j’aurais un Françoise de Luca de plus à lire.

À peine réveillée, j’écris déjà. Dans ma tête.
J’émets des opinions, je formule des objections. Je me pose des questions et je tente des réponses. Le diable sur une épaule, un ange sur l’autre. L’un comme l’autre, ils ont l’argumentaire un peu court. Et depuis quelques jours, ils radotent. Au sujet du français. Encore.
— As-tu vu les deux livres : No Man’s land de Charlotte Bigras aux éditions Druide et Difficult women de Roxane Gay aux éditions Mémoire d’encrier.
— Pourquoi tu nommes les éditeurs?
— Parce que je les considère aussi fautifs — les premiers fautifs — que les auteures.
— Oui, mais le Difficult women, c’est une traduction.
— Pas une raison. Au contraire, il y aura double confusion. De plus, les libraires peuvent les placer dans les livres en anglais.
— Vas-tu les lire?
— Je ne sais pas encore. Qui vais-je punir en refusant de les lire pour la seule raison que les titres sont en anglais?
— Arrête donc de chialer, arrête de penser et de faire des phrases tout le temps. Lève-toi ou rendors-toi.
— Si tu n’étais pas toujours là aussi pour rajouter ton fion!
— Et toi, tu n'en laisses pas passer une, tu cherches juste les fautes, les erreurs. Tu es obsédée, une accrochée-de-la-loi-101-qui-ne-décroche-pas, une puriste.
— Bon, alors, je ne dis plus rien.

Dans cette aube naissante, mon esprit vagabonde. Je me revois au journal quand je changeais le mot gaz/gas en essence dans une annonce, quand j’admirais ma mère en train de feuilleter le dictionnaire Dagenais à la recherche du bon mot, quand le vendredi, j’appelais à l’Office de la langue française et que je discutais avec une linguiste, quand l’après-midi je parlais à l’imprimeur de trame au lieu de screen. Je sentais qu’on s’améliorait, je donnais l’exemple, ça portait ses fruits. Aujourd’hui, donner l’exemple ne suffit plus. Je n’ai plus de tribune pour influencer qui que ce soit.

L’impatience de mon petit diable et de mon ange faiblit, ils se réconcilient ou plutôt ils se taisent... jusqu’à la prochaine dispute.

Je me lève, je vais déjeuner. En lisant Les filles bleues de l’été de Mikella Nicol. Encore une histoire d’amitié entre filles. Je suis partie là-dessus.


vendredi 12 août 2022

Mon 12 août 2022

 


Je n’ai jamais entendu ou lu le nom de cette auteure. Et la poésie n’a jamais été mon premier choix, mais depuis quelques années, je tente un rapprochement par l’avenue de la prose poétique.

Aussi quand Hugues Corriveau dans Le Devoir du 10 juillet a écrit un article à propos de Quand je ne dis rien, je pense encore de Camille Readman Prud’homme...
quand Daniel Guénette, dans Le blog de Dédé-blanc-bec — un titre qui ne dit pas tout le sérieux des billets — parlait aussi de l’intelligence de ce livre...
et sur le site leslibraires.ca, l’icône « OUI » est apposée...

Je n'ai plus hésité.
Quant au deuxième livre, cette fois ce fut le nom des auteures et le sujet qui m’ont guidée.

C’est le choix de mon « 12-août-j’achète-un-livre-québécois ».
Commandés à la Librairie Rose-Marie de Buckingham (Gatineau).



vendredi 5 août 2022

Depuis 50 ans

Même si je n’ai jamais tenu à souligner les anniversaires — le mien en tout cas —, je retiens tout de même quelques dates importantes.
Comme celle du 5 août 1972 quand je suis entrée par une fenêtre.

Mes maisons, mon histoire
Je devrais dire les maisons. Les treize premières sont les maisons de mes parents et non les miennes, mais elles forment tout de même la trame de ma vie. Elles disent mon enfance, mon adolescence. Les lieux habités, la langue parlée, les personnes aimées et... quittées.
Elles me servent encore de repère pour situer certains événements de ma vie.

Treize maisons, trois chalets en vingt-deux ans.
(Les photos proviennent soit d'archives personnelles soit de Street View)


Mes parents se sont connus et se sont mariés à Saint-Eustache-sur-le-Lac (devenue Deux-Montagnes). Après leur mariage, ils sont restés un temps au chalet paternel, vieux chemin Oka.
En 1948, ils ont déménagé sur la 30e avenue.
Quand je suis née, en 1950, ils étaient sur la 18e avenue.
En 1952, nous vivons quelques mois sur la rue Fleury, à Montréal
De 1952 à 1954 : au moins une maison à Niagara Falls, Ontario
Et puis ensuite...













En regardant les photos...
Pour chaque maison (sauf pour les deux premières dont je n’ai aucun souvenir), je pourrais écrire les rires et les larmes, les peurs et les audaces, les succès et les défaites, mais je me contenterai d’une image ou d’une scène marquante.

Niagara Falls : tout est en noir et blanc, une silhouette, quelqu’un passe rapidement devant la fenêtre. On me dira qu’un voleur est entré dans la maison.

Rue Saint-Germain : J’ai avalé un Life Saver. Je m’étouffe. Je tousse. L’ambulance m’emmène à l’hôpital Pasteur. Scarlatine. Au bout de vingt jours, par la petite vitre de la porte, mon père me fait signe. Bien avant la fin de la quarantaine, il me ramène à la maison, il n’en pouvait plus de me voir toute petite dans ce grand (et haut) lit blanc, m’a-t-il dit souvent.

Rue Du Collège : Mon frère et moi jouons à nous lancer une balle bleu blanc rouge. Commandant, le chien de mes grands-parents court après la balle. Dans la rue, je le vois se faire écraser. J’en rêve encore.

Chalet de Baie de l’ours : les longues baignades, les jeux sur la plage, les cousin.e.s, la messe à Montpellier, le magasin général Gagnon à Chénéville.

88e avenue : septembre, au retour d’un été au chalet. Sur le mur gauche de la maison, mon premier bicycle. Le premier d’une longue série.

Rue du Parc : Pâques. Chez les guides, j’ai gagné le gros lot : un gros lapin, quatre moyens, huit petits et une centaine de petits cocos. On casse, on choisit, on mange, on emballe, on congèle. Nous en aurons jusqu’en juin.

Chalet à Saint-Michel-de-Bellechasse : la longue plage à marée basse, tellement longue tellement bouetteuse que je renonce souvent à la baignade.

Rue Sainte-Marie : Une maison imposante. Les oreillons de mon frère. Ma mère pleure, la mort de mon grand-père.  

Rue Deguire : Ma mère est une Deguire, elle me rappellera que le grand-père de mon grand-père avait une belle terre à ville Saint-Laurent. Que deux de ses tantes étaient religieuses au couvent (collège Basile-Moreau). Encore aujourd’hui, je dis que je viens de ville Saint-Laurent : dix ans de ma vie quand même.

Chalets du Père Caron : les nouveaux amis du bout du chemin, les pique-niques aux chutes Lookbows, la descente de la rivière Petite-Nation en canoë (je ne savais pas alors que tout ça se retrouverait dans mes romans).

Rue Côte-Vertu : là où j’avais une grande chambre (mon frère et moi alternions à chaque déménagement, c’était mon tour, j’ai été chanceuse, je l’ai eue cinq ans), là où j’ai transformé mon garde-robe en bureau d’études et d’écriture, là où j’ai eu un piano pendant un an.

Baie de l’Ours : après une longue nuit de questions, j'ai dit oui au lac, oui à la campagne, oui à l’enseignement, mais aussi non à l’université, non aux bibliothèques municipales, non au théâtre. 


Les fenêtres : une ouverture vers l’imaginaire, la liberté, la fuite parfois.
Entrer par une fenêtre.
Une fois, à Lévis, rue du Parc, aujourd’hui avenue Arthur-Fafard, été 1963. Je suis en punition dans ma chambre. Trop choquée pour lire. Je veux m’enfuir, partir loin, m’évader. Maison à paliers, fenêtre à coulisse, je l’ouvre facilement, je sors, je cours, je m’éloigne. Je ne reviendrai qu’à l’heure du souper en entrant par la même fenêtre que j’ai laissée entrouverte. Ni vu ni connu ni entendu parler.

Une autre fois, à ville Saint-Laurent, Côte-Vertu, été 1966. Mes parents sont au chalet, j’ai manqué le train pour les y rejoindre, je décide de coucher à la maison. Je n’ai pas la clé. Je grimpe sur la selle de ma bicyclette, je m’accroche au long tuyau qui renferme les fils d’électricité (le rouge sur la photo), et je grimpe sur la galerie. Je réussis à ouvrir la fenêtre et je pénètre dans la maison. Le lendemain matin, je manquerai encore le train, mais c'est une autre histoire.

Et la dernière fois. Le 5 août 1972.
Après un voyage au Mexique, après un simple (et ingrat quand j'y repense) au-revoir-merci-pour-tout-je-vous-invite-bientôt à mes parents, je suis partie du lac Simon avec tout bagage ma couverture-doudou. Hâte de m’installer chez une amie qui veut bien de moi comme coloc. (« Soit j’ai un chien, soit j’ai une colocataire » m’a-t-elle dit. Elle a eu les deux!)
Sauf qu’elle n’a pas encore la clé de la maison qu’elle vient d’acheter. Elle pas pressée, moi si. Qu’à cela ne tienne, je lui offre d’entrer par la fenêtre (sur la photo d'hiver, la petite à gauche de la porte).
Ce que je fis.

L’adulte devenue a continué d’aimer le lac, et d'aller voir le fleuve.
L’adulte devenue n’a pas choisi, n’a pas acheté la maison.
En entrant par la fenêtre, en choisissant ma chambre, je n’ai pas senti que c’était dans cette maison que ma vie commençait.
Mais peu à peu ...
la maison que j’ai rénovée 
la bibliothèque que j’ai créée
la galerie et le terrain où j’ai installé des chaises de jardin
le ruisseau Sam dans lequel je me suis baignée
les pins rouges que j’ai vu croître, que je vois plier sous le vent, parfois sous les rafales
les oiseaux que j’ai nourris
le vent d’ouest omniprésent que certains jours je crains
les silences de l’hiver
la quiétude des merveilleux couchers de soleil
sont devenus mon havre, mon refuge, ma stabilité. Ma vie.

Là où je calme mes peurs. Là où je confie mes secrets. Là où j'ai écrit mes livres. Là où j'ai connu l'amour. Depuis cinquante ans. 

Et pour vous, que représente la maison, votre maison?

jeudi 14 juillet 2022

En attendant



Attendre.
Dans les files celles aux douanes celles au marché d’alimentation. Souvent la mauvaise.
Dans les salles de CLSC de cliniques d’hôpitaux.
Mais ce matin dans l’auto un plaisir du temps pour lire.

Montréal coin Rouen et De la Salle. À l’ombre des arbres qu’il faudra bien un jour apprendre à identifier.
Lecture de D’autres font du vitrail d’Isabelle Dionne. L’éditeur Hamac que j’aime depuis leurs tout débuts publie des carnets des blogues des fragments un de mes styles littéraires préférés ces années-ci.
Entre deux paragraphes je lève les yeux je prête l'oreille je n'en ai qu'une de toute façon qui entend. Rue tranquille mais par les fenêtres ouvertes je perçois les babils d’enfants qui passent en rang deux par deux. Sur le trottoir opposé un homme au téléphone : « C’est une affaire de marde, je vais devoir rappeler tout le monde, tout annuler. » Il tourne sur Rouen. En attendant le vent le silence revient.

Attente mais sans impatience. Ce n’est pas moi qui suis chez l’ophtalmologiste. Pas moi qui aurai une greffe de la cornée, une deuxième.
Dans l’auto je me sens à l’aise. Presque à l’abri. Pas d’idées noires. À quinze ans j’avais peur de marcher seule sur la rue. La bicyclette me protégeait des obsédés. Aujourd’hui l’auto. Quand donc cessera cette peur d’être agressée pire violée? Mes rides et mes cheveux blancs me garantissent-ils l’indifférence des passants?

« La souffrance en chacun tente de sortir » Isabelle Dionne parle de mort du suicide d’un frère.
Devant la souffrance des autres je m’enfuis « au pays des pages perdues ». Lire les mots des autres fait moins mal que d’écouter les paroles des personnes aimées. La lâcheté me mène vers l’écriture. Vers la solitude aussi.

Dans le livre la narratrice « cherche un exemple d’ellipse ». Je n’ai pas le wi-fi ni de données mobiles pour chercher ce qu’est une ellipse. Je ne sais plus rien sans Google. Mon cerveau saturé d’informations ou paresseux.

Un homme et une femme marchent bras dessus bras dessous. Lui avec une canne blanche. Freiner mon esprit ne pas le laisser aller vers un scénario pire qu’une greffe de cornée la perte d'un oeil.
Retourner à Isabelle Dionne toujours plus facile de vivre la vie des autres que la sienne. Je pense bien que j’en fais des ellipses. Du pastiche c’est certain par pure admiration du style d’un·e auteur·e. Vous permettez Isabelle Dionne? Ma façon de vous dire mon admiration. Ma façon de dire que j'adore votre livre. Ressemble à ceux de Lynda Dion que vous remerciez à la fin. 

Dernier fragment : « Le geai bleu » un geai bleu renfermé, un geai bleu libéré.
Chez moi aussi le geai bleu est devenu un symbole. Pendant mes convalescences, il est venu souvent me visiter. Me tenir compagnie. Me libérer?

Fin du livre. Merci Isabelle Dionne. Merci Hamac.

Début de la véritable attente. Un début d’inquiétude aussi. Deux heures. Habituellement pas si long. Hâte de savoir. Hâte d’être à la maison. L’été n’est pas si chaud. La piscine est laiteuse. Saura-t-on jamais si les nitrites et nitrates des champs autour de chez nous causent nos maladies? Cinquante ans que je reste en face d’un champ de pommes de terre/maïs/soya, ça laisse des traces.

Tiens, prochain billet : mes maisons, ma maison.

Et vous comment supportez-vous vivez-vous les attentes?


dimanche 10 juillet 2022

Souvenir de framboises

 

Devant la maison, quelques traces encore du derecho. Derrière, le vert des feuilles omniprésent. Les rares framboises rouges contrastent, mais s’harmonisent au décor. Elles sentent l’été, elles disent juillet.

J’ai 8 ans, j’ai 13 ans, j’ai 16 ans, j’ai 20 ans, je marche dans le chemin Caron qui mène à la baie de l'Ours (lac Simon), à la recherche de framboisiers.
Le 16 juillet, ce sera la fête de ma mère. Je lui offrirai son fruit préféré. Certaines années, une poignée tout au plus. Je comblerai par un bouquet d’épervières et de marguerites.

Ma mère aurait eu 98 ans cette année. Elle est morte il y a dix ans. Et pourtant, en voyant l'unique framboise rouge (que le geai bleu s’est empressé de manger), c’est elle qui m’est tout de suite venue à l’esprit.

Est-il vrai qu’en vieillissant ce sont les événements de notre enfance qui surgissent le plus souvent? Où est-ce moi qui exalte ma mémoire? Ce moi qui pense tout le temps, ce moi qui cultive les associations d’idées?
Ce moi qui, ce matin, en lisant Blonde de Joyce Carol Oates, revoit encore sa mère. 
« Blonde n’est pas une biographie de Marilyn Monroe. Blonde est un roman sur ma mère, sur la vôtre, sur toutes nos mères un peu spéciales. » 
Justine Lévy dans la préface de Blonde
Je me rappelle de l’endroit où j’étais à l’annonce de la mort de Marilyn Monroe. En août 1962, nous sommes en Europe, à Paris je crois, sans doute attablés à un café terrasse, après avoir acheté des livres dans une librairie (mon frère un Tintin, et moi, un livre d’Enid Blyton sûrement). Après un long et sombre « Ah non! », mon père passe un journal à ma mère. Celle-ci, moins expressive que mon père, fut quand même surprise de voir que l’actrice avait à peine deux ans de moins qu’elle. Ils sont un peu tristes, je le sens. Je leur demande pourquoi.

J’ai douze ans, et j’aime bien que mes parents me racontent leur première rencontre. C'était à Saint-Eustache-sur-le-lac, dans une salle de cinéma. Ils avaient 16 et 18 ans. Le cinéma, c’était leur jeunesse, leurs sorties, leurs étés, leurs amours. La mort de Marilyn Monroe, ce devait signifier la fin de quelque chose pour eux. Comme toutes les morts.

Comme il est trop tôt pour cueillir des framboises, je retourne à la lecture de Blonde... Mille pages quand même, je risque de m’interrompre pour aller les ramasser ces framboises si les geais bleus veulent bien m’en laisser. Sinon, j’aurai mes souvenirs.

Et vous, que vous rappelle le temps des framboises... ou les années soixante?

dimanche 26 juin 2022

Des noms, des titres?

 

« Quand il ne reste plus rien
Il reste encore à l’écrire. »
Vif oubli, David Goudreault

Des mots qui me confortent, me réconfortent, me donnent le droit d’écrire à mon tour.
Depuis quelques années, je lis moins de romans.
Peut-être par paresse, peut-être par manque d’effort.
Je serais bien mal venue de dire par manque de temps quoique... le temps devant raccourcit, si je puis dire.
Sûrement la concentration qui diminue avec l’âge, pourrait-on me dire! Ne le dites pas.

Chaque matin, Facebook me promène d’un groupe à un journal, à une revue, à un livre.
Je commence Un livre sur Mélanie Cabray que déjà Les noces barbares de Yann Quéffelec m’appelle. Pour rien au monde de Ken Follett me rebute alors que j’ai déjà pris tant de plaisir à lire Les piliers de la terre.

Depuis trois ans je dirais, je lis plus court.
Corollaire, j’écris plus court, et différemment.
Le slam, le rap, la poésie en prose et la prose poétique m’intéressent. M'intéressent davatage quand je peux lire et relire et non pas seulement écouter. Ah! lire les "Lettres à" de David Goudreault!
J’apprends à différencier ces genres.
Alors, curieuse comme toujours, mais néophyte, je cherche, je farfouille, j’attrape au vol, je délabyrinthe les textes. Je me sens une étudiante à l’université, assise à une grande table d’une vaste et riche bibliothèque, une petite lampe devant une pile de livres savants.
Je lis des extraits d’études, des thèses de doctorat, avec des petites notes en bas de pages.
Des textes qui, tels des dominos, me mènent à d’autres textes sur l’inventivité, l’esthétisme.
J’effleure tout au plus.
Parfois, je me demande si je ne cherche pas les notes de cours d'un professeur en création littéraire!
Comme du temps à rattraper, du temps que je n'ai pas connu.

Je ne cherche pas nécessairement le texte militant, ni le parler populaire, ni l’effet théâtral, ni même une intrigue. En fait, je ne cherche même pas un genre littéraire.
Mais toujours une émotion.
« La prose est celle qui raconte quelque chose, alors que la poésie exprime directement l’état d’âme de l’auteur »

 Tania Collani

Le Charlotte de David Foenkinos a probablement été un des premiers textes de cette écriture incisive qui m’a frappée.
Les adieux de René Lapierre m’a comblée.
Wikipédia m’a appris le nom de Grand Corps malade.
Je relis encore Les Villes de papier de Dominique Fortier.
Comme les livres de Kim Thuy, comme La femme qui fuit.

Avez-vous des noms, des titres?