lundi 31 juillet 2017

La putain et la servante

Deux récits dont le sujet est la femme
Paradoxe : je résiste souvent à ce genre de trucs marketing : « 75,000 exemplaires vendus », « le livre qui fait trembler l’Amérique de Trump », mais en même temps, je reste aux aguets, et, parfois je me précipite à la BANQ pour lire un extrait et peut-être même me procurer ces romans dont tout le monde parle. Tout le monde étant surtout les médias.

J’ai d’abord été intriguée par La servante écarlate en lisant dans La presse + que la série à succès The Handmaid’s Tale, un roman dystopique (il a fallu que j’en cherche la définition : récit de fiction pessimiste se déroulant dans une société terrifiante. Comme 1984 d’Orwell, comme Farenheit 451 de Bradbury. Ce qui m’a retenu le temps de lire les premières pages) de Margaret Atwood, paru en 1985, serait bientôt adapté en français. En France, grrr…! À défaut de trouver le livre en numérique à la BANQ, j’ai décidé de l’acheter.

Et puis, un matin, en me demandant pourquoi Margaret Atwood était traduite en France avant le Québec (un caddie, moi, ça dégonfle ma lecture!), j’ai lu ce billet sur le site des librairies indépendantes :
14 romans québécois qui font craquer les Français
Dans cette liste, j’en ai déjà lu neuf, je me suis dit qu’il faudrait bien que je lise les autres. Le temps de me rappeler si j’avais déjà lu Putain de Nelly Arcan, évidemment, sur le site de la BANQ, j’avais téléchargé un extrait.
Qui peut résister à ces premières pages accrocheuses?

Alors pour me reposer de la servante, je me suis mise à lire la putain.
Je n’aurais pas dû.

Bizarre tout de même que je lise en parallèle Putain de Nelly Arcand et La servante écarlate de Margaret Atwood. Même thème: le corps de la femme. Deux « je » qui n’aiment pas vraiment ce qu’elles voient dans leur miroir. Deux femmes qui décrivent leur présent et se souviennent de leur passé, cet avant qui n’existe plus. Deux mondes que je ne connais pas, mais que je sais possibles.

Dans la postface, Margaret Atwood le spécifie :
« Je n’inclurais rien que l’humanité n’ait pas déjà fait ailleurs ou à un autre époque, ou pour lequel la technologie n’existerait pas déjà. […] Les pendaisons en groupe les victimes déchiquetées par la foule, les tenues propres a chaque caste et chaque classe, les enfants volés par des régimes et remis à des officiels de haut rang, l’interdiction de l’apprentissage de la lecture, le déni du droit a la propriété : tout cela a des précédents.»
La servante écarlate demande des temps de pause. Un roman tellement différent de ce à quoi je suis habituée — à quels genres suis-je donc habituée? — qu’il mérite un écho différent. Et ne comptez pas sur moi pour mentionner si c’est une lecture légère ou non, d’été ou non, à étudier en classe de philosophie ou toute autre matière scolaire.

Putain de Nelly Arcan, paru aux éditions du Seuil (j’aimerais bien savoir pourquoi la future auteure a envoyé son manuscrit aux éditions du Seuil et pas à un éditeur québécois), il y a seize ans. J’essaie de me souvenir des raisons qui m’auraient empêchée de le lire, et il ne me vient que mon bagage d’idées préconçues (comme un snobisme intellectuel?) soit sur le thème de la prostitution soit sur la difficulté de lire un style cru, et nouveau à la rigueur, à cette époque. Tout comme j’ai pris dix ans à accepter le joual de Michel Tremblay. Je ne suis pas fière de moi comme lectrice. Pourtant en 2001, mon éducation religieuse — pas la familiale, nous étions très ouverts chez nous — ne devait plus avoir laissé grandes traces. Ma curiosité naturelle aurait dû l’emporter.

Et il est presque impossible que je l’aie ne serait-ce que feuilleté parce que le début est si accrocheur, encore aujourd’hui malgré cette mode de la première page, cet incipit qui doit accrocher le lecteur-acheteur, me connaissant, il me semble que j’aurais poursuivi et que je m’en souviendrais. S’il m’arrive souvent d’oublier l’histoire d’un roman ou le nom des personnages, je me rappelle toujours ceux qui m’ont marquée. Je n’oublierai jamais L’Euguélionne de Louky Bersinik Je n’oublierai pas non plus Les mots pour le dire de Marie Cardinal. Ni La femme qui fuit d’Anaïs barbeau Lavalette.

Toujours est-il que je lis, je dévore. Et rien ne me choque ni le sujet ni le style.
« Une plume défouloir et vengeresse », est-il écrit sur le site nellyarcan.com. Et, à mon avis, c'est surtout cette plume qui rend son œuvre intéressante et pérenne.

C’est en effet ce que j’ai vu, lu, retenu. J’ai lu la plume, le style, la colère. Cette vie mal-aimée, ces relations difficiles. Cette abondance de mots, de phrases d’un seul souffle. Facilement trois pages, sans point.

Dans les phrases courtes, dans le lent récit de La servante écarlate, il y a de longues descriptions pour que le personnage soit bien ancré dans sa vie, comme le fait de trancher le bout d’un œuf, de le manger et de se demander ce qu’elle peut bien désirer de plus. On voit tout, mais on ne sent pas — en tout cas, je n’ai pas senti — la révolte, la rébellion ni même l’envie de désobéissance dans cette dictature où la femme n’est que servante, n’est que corps à enfanter.

Dans Putain, un long soliloque, sans beaucoup de points, qui ne nous laisse souffler qu'après deux ou trois pages d'écriture bien serrée. Des pages remplies de détails qui parfois ont l’air de sauter du coq à l’âne, mais qui rassemblent toutes ses pensées qui s’entrechoquent dans son âme tourmentée.

Nelly Arcan — et le personnage — écrit, crie, gémit, geint, étouffe. Alors qu’Atwood — et le personnage — décrit, observe froidement, détaille minutieusement. Comme si elle n’était pas dans ce corps inerte, comme si elle subissait sans se révolter. Tout au plus un peu de nostalgie.

J’ai cessé de les lire en même temps. Je n’ai plus voulu que mon cerveau compare. Chaque livre a sa propre vie, mérite que je lui prête toute mon attention. Un à la fois.
Et puis, je ne lis pas pour défendre une thèse de maîtrise qui demanderait une grille d'analyse plus poussée que mes simples petites impressions le lectrice.
Et je les aime tous les deux, ces récits, pour ce qu’ils m’apportent, pour ce qu’ils me font réfléchir sur mon corps qui n’a pas enfanté, sur ce corps qui n’a pas été violé, qui ne s’est pas prostitué, sur ce corps qui a grossi, ramolli, qui a vieilli, qui fut malade parfois, mais que j’ai toujours aimé, parce que c’est le mien.
Me font aussi prendre conscience des différents régimes politiques ou sociétés patriarcales ou mondes machistes.
Chacun aussi me fait réfléchir sur le style littéraire. Des mots justes, vrais, forts qui remuent, qui dépeignent très bien des atmosphères et des lieux, qui apportent de la profondeur aux personnages. Envieuse bien sûr.

Deux livres marquants que je ne suis pas prête d’oublier. Même si je les ai découverts sur le tard!

mardi 25 juillet 2017

Au sujet de l'écriture

Sur la galerie arrière, devant moi, les grands efflanqués de pins rouges, maigres et longs de leurs 40 ans passés, mais qui, généreux et presque fraternels, accueillent à leurs pieds des framboisiers, des bleuetières, des mûriers qui donnent peu de fruits, et quelques feuillus adolescents qui réclament vie et avenir.

Sur la petite table à côté de moi attendent : tablette, liseuse, livres, cahier et plume.


Toujours hâte de lire

J’ai rarement hâte de laver l’auto, de balayer le plancher, même de préparer le souper. Encore moins de réparer le boyau d’arrosage, d’entretenir la piscine. Les jours sans lire sont à la limite des jours perdus.
Les jours derniers, j’ai volé un peu de temps au temps, j’ai expédié les « il faut » et j’ai lu deux livres. J'aime bien lire ce que les autres écrivains pensent de l’écriture pour découvrir pourquoi j’ai tant besoin d’écrire. Et tant besoin de lire.

L'écriture de deux écrivains: Daniel Grenier et Laurence Tardieu

La solitude de l’écrivain de fond, Daniel Grenier

« Parce que l’écrivain — le véritable écrivain de fiction — n’écrit pas pour dire ce qu’il pense et ce qu’il ressent, mais pour le découvrir. »

Un essai trop court où Daniel Grenier, auteur de L'année la plus longue, réfléchit sur son propre parcours tout en nous présentant Wright Morris, un auteur étatsunien (pourquoi on parle toujours d’Américain, je suis Américaine moi aussi) méconnu. « Si je parle de lui, c’est qu’il ne m’a jamais demandé le de faire ».

Comme une entrevue. Comme un documentaire où on n’entend pas l’interviewé. Daniel Grenier fait à la fois les questions et les réponses. Ils sont deux : le lecteur Grenier et l’auteur Morris. Deux qui auraient pu être correspondants ou amis. L’admirateur qui redonne vie à son mentor.
Grenier qui doute. Morris qui n’aura pas eu droit à la reconnaissance qu’il aurait pu connaître.

J’accroche sur le mot solipsisme. Je cherche, je trouve : doctrine affirmant que seuls existent pour le sujet pensant le moi et ses manifestations.
Petit vertige qui me ramène au temps où je lisais Anaïs Nin. Et plus récemment Annie Ernaux. Je n’aime pas lire ce qu’on dit parfois de ces auteures : « pathos larmoyant d’apitoiement nombriliste »
Ça me fait mal de lire pareil commentaire. Bien des lecteurs n’aiment pas que les personnages pleurent, chialent, grattent leurs plaies. Bref, cherchent à comprendre. J’ai peur parfois d’écrire, de publier, peur d’être blessée, qu’on ne m’aime pas. Peut-être que je préfère l’indifférence à l’antipathie.
« Au bout du compte, on ne sera peut-être le grand écrivain de personne ».
C’est quoi ce besoin de reconnaissance? Ce désir quasi-insatiable d'être important pour quelqu’un?
Je ne cherche plus autant de réponses qu’à trente ans, mais je me pose encore les questions.


L’écriture et la vie, Laurence Tardieu

« […] puisque je ne sais rien trouver en ce qui concerne mon travail d‘écriture, autrement que par l’écriture. Cela ne passe ni par la pensée, ni par l’imagination, ni par la conceptualisation. C’est l’écriture et seulement l’écriture, qui permet l’écriture, qui le révèle. »
Je transcris. Je note. Je ne réfléchis pas, je sens. Je m'identifie. Laurence Tardieu, une auteure française que je ne connaissais pas, n'a pas écrit depuis vingt-deux mois. On dit qu'elle écrit juste, mais elle voudrait maintenant écrit "vrai".
« [l’écriture] nous pousse vers le vrai. Dans la vie, on ne cesse de s’arranger avec nos misérables petits mensonges. »
Mais qu'est-ce que le vrai? Existe-t-il une vérité? Vais-je vers le vrai? Est-ce que je ne passe pas mon temps à me contenter de mes « misérables petits mensonges »? Est-ce donné à tout le monde d’avoir le besoin de dire le vrai? Elle donne l'exemple des livres d'Annie Ernaux nuançant ainsi entre vérité et réalité. La réalité est toujours teintée de mille nuances.
« L’auteur sait à quel moment, soudain, dans le travail, quelque chose existe. »
L’ai-je jamais su ou vu? Peut-être que rien n’existe dans mon travail?
« Le voilà, l’amour des lecteurs. Aussi Immense : ils croient. Ils croient parfois pour nus. Ils nous portent. » 
Je m’obstine peut-être à vouloir faire publier mon dernier manuscrit parce que quelques lecteurs — dix? cinq? — y croient, l’attendent et me le disent. Et j’aimerais ne pas les décevoir.
« Question essentielle : la question du risque. La mise en danger. »
Pour être publiée, pour se faire remarquer, j’étais prête à cette mise en danger. Franchir des frontières, je veux bien. “Sortir de notre zone de confort” comme disent les jeunes apprentis de toutes sortes. Mais jusqu’où? Jusqu’à n’être plus soi-même? S’aventurer, je veux bien, explorer, se dépasser, toujours prête, mais tout en respectant qui je suis. Je n’écrirai pas n’importe quoi juste pour épater la galerie. Ou pour vendre. Ou pour être au goût du jour. Plus maintenant.

Et puis, je ne baisse pas les bras, mais je n’ai plus cette soif et cette faim qu’on a à trente ans, ce besoin de renouvellement qu’on a à quarante ans. Cette urgence qu’on a à cinquante ans. Est-ce à dire que je n’ai plus rien à dire? Que j’ai fait le tour? Non. Encore et toujours ce besoin de chercher, de découvrir, de comprendre.

Après – et même pendant— de telles lectures, j’aimerais bien disserter sur mon écriture : le besoin, le but, le sens. En parler aussi copieusement que les deux auteurs cités. Je n’aurai jamais, et je n’y tiens pas non plus, la verve et le vocabulaire de certains intellectuels, exemple Pierre Samson / Bertrand Laverdure dans Les lettres crues, un essai épistolaire sur l'écriture également, où les auteurs tirent allègrement sur tout ce qui s'écrit au Québec -- je ne voudrais pas être dans leur mire --, mais j’aimerais bien avoir un peu de souffle pour en parler plus longuement.

Donc, j’y reviendrai sûrement. Un jour de froidure quand les oiseaux ne chanteront plus.
Je vais les écouter pendant qu’ils s’égosillent sous les grands pins.

Lien vers La solitude de l’écrivain de fond de Daniel Grenier >>>
Lien vers L’Écriture et la vie de Laurence Tardieu >>>
Lien vers Lettres crues >>>

vendredi 21 juillet 2017

Le camping n'est plus ce qu'il était

Le camping en véhicule récréatif en juillet n'est plus ce qu'il était
Quelques campings visités ces dernières années: des emplacements larges, des petits, des cordés...
Je reviens d’une escapade de six jours : Lévis, La-Baie, Saint-Siméon. 

L’été, je voyage rarement. Depuis belle lurette que j’ai réalisé que le trop de monde sur la route, le trop de monde dans les campings, le trop de chaleur en juillet et août, ce n’est pas pour moi. Habituellement, je reste à la maison. Mais là, je voulais aller voir le spectacle La fabuleuse histoire d’un royaume au Saguenay et il ne commence qu’en juillet. Billets achetés pour le vendredi. Je me résigne également à réserver le camping pour au moins le vendredi après le spectacle. Première surprise : on ne peut pas réserver pour une seule nuitée, le vendredi. On ne tient pas à y passer le week-end. On nous promet tout de même de ne pas nous laisser tomber. On n’a qu’à se présenter le vendredi après le spectacle, on nous trouvera bien un emplacement sans service. 

J’en ai profité pour planifier un arrêt à Lévis pour un petit changement sur mon véhicule récréatif. Rendez-vous pris le jeudi à 8 heures du matin. Où coucher la veille pour arriver si tôt à l’entreprise, quand on sait qu’il y a 5,000 employés qui travaillent chez Desjardins et donc envahiront la route très tôt? On nous accorde la permission de coucher sur le terrain adjacent au garage. On nous assure que nous ne serons pas dérangées. Ce fut le cas, mais tout de même, je ne suis jamais à l’aise d’être le seul véhicule récréatif dans un grand stationnement vide.

Pour les autres nuitées, on verrait sur place.

Ce ne fut pas l’enfer. Ce ne fut pas le désastre. Ce ne fut ni le déluge ni la canicule. 
Je ne trouve pas le mot exact pour définir l’émotion qui persiste au retour de ces six jours.
Pas de la colère, plutôt comme un fond de tristesse, une déception. 
Pour faire du camping en juillet, il faut faire preuve de souplesse, d’adaptabilité, sinon, c’est certain, ce ne sera que contrariétés.

À Lévis, tout s’est bien déroulé, nous avons facilement traversé Québec le lendemain. 

À Saint-Ambroise, au Géant du motorisé où on peut rester dix jours gratuitement, malgré que deux groupes aient envahi les emplacements, des préposés nous ont trouvé une place chez les V.I.P.

À La-Baie, nous avons eu l’heureuse idée de nous présenter au camping tôt dans l’après-midi. Il n’y avait plus d’emplacements disponibles, même dans la section sans service, mais comme nous leur avons rappelé qu’ils nous avaient promis de ne pas nous laisser tomber, ils nous en ont trouvé un, très bien situé d’ailleurs. Nous avons pu assister au spectacle — de toute beauté, grandiose — en toute quiétude, sachant qu’au retour, nous pouvions nous installer en toute sécurité. 

À Saint-Siméon, même si nous personne n’a répondu à notre courriel envoyé ni répondu au téléphone le matin de notre arrivée, même si personne n’a répondu à l’appel de la préposée du kiosque d’information touristique de L’Anse-Saint-Jean, une fois sur place, l’employé nous a indiqué le numéro 55. On grimpe sur le terrain du haut : deux tentes, deux autos sont installées au numéro 55. Et personne sur place. Le 56 est libre, mais notre 22 pieds n’y entre sûrement pas. Retour à l’accueil : « installez-vous à côté du 41 et branchez-vous sur le poteau du 41. » Nous nous faufilons entre une tente et un gros motorisé et, nous entamons des discussions avec les campeurs pour partager table, eau, électricité.

Jeune, au temps de la tente et des vacances en été, je privilégiais la vie un peu tranquille sur le bord des lacs ou bien blottie au fond d'un terrain vaguement défini, entouré d'arbres. C’était l’observation des oiseaux, des sturnelles ou des cormorans, des pics ou des hérons. Le canoë, le kayak, le vélo, la marche, la baignade. Le feu de camp le soir. 
Je me laissais charmer par le bruit de la cascade et par l’effort du saumon qui ne se méfie pas de la mouche artificielle.
Je profitais des odeurs de varech ou celles des conifères. 
Je m’endormais devant le ciel étoilé ou je me réveillais devant la beauté du brouillard matinal qui se lève au-dessus des rivières.
Je dois admettre qu'il y avait quand même des abus: des jeunes qui s'étaient promis de vider au moins deux caisses de 24 ou qui n'appréciaient le camping qu'avec une grosse radio portative qui jouait entre trois heures l'après-midi et parfois jusqu'à trois heures du matin. Mais, nous n'étions pas si tassés, nous n'étions pas obligés de réserver ni de nous contenter des emplacements restants.

Mais, cette année, et de plus en plus souvent, surtout si c’est l’été, si c’est juillet, la nature est remplacée par les humains. Les employés sont gentils, en général patients. Les campeurs généreux, joyeux. Mais ils sont nombreux à vouloir les mêmes endroits : les gratuits ou les bords du fleuve ou les grands emplacements. Ou des vacanciers qui n’ont qu’une envie : parler, raconter leurs voyages, s’esclaffer sur vos aventures. Ou les leurs. Des souvenirs à chérir et égrener. 
C’est l’entraide aussi : pour reculer, pour dépanner, pour partager. Et j'apprécie. 

Rarement le silence.
Pour le silence, soit il faut revenir à la maison, soit voyager en juin ou en septembre. 

Trop de monde partout. Trop de difficulté à trouver un emplacement. Surtout les fins de semaine. Ou trouver des campings qui ne ressemblent pas à des stationnements. 

Ce qui confirme encore une fois qu’on ne veut pas voyager en été. 
Moi qui ne tiens pas particulièrement à parler avec tant de gens plus de cinq minutes, moi qui n’aime pas empiéter sur le terrain du voisin pas plus que je n’aime voir les voisins — enfants, adultes ou animaux — passer sur le mien et même s’y planter pour une petite jasette (un peu comme dans les salons du livre ou les expositions quand les visiteurs se plantent devant votre kiosque et commencent à discuter de tout et de rien), quelle patience il me faut parfois. Quelle adaptabilité je dois développer.
Pourtant sur le coup, ça m’a paru acceptable. Rien de réellement négatif. L’impatience n’a pas gagné. Juste la bonne humeur qui s’est effritée à mesure que la température montait.

Il me semble que c’était plus facile dans les années » 80. Au temps des tentes ou du début des tentes-roulottes. Moins de véhicules récréatifs qui réclament l’eau et l’électricité, le wi-fi et l’absence d’arbre pour installer leur coupole. Et des prix raisonnables. Et facilement accessibles aux 35 pieds. Et avec vue imprenable. 

Serais-je blasée? Ou nostalgique? Ou sauvage? Un peu de tout.