lundi 18 juillet 2016

Impressions de lectures

Long billet, mais vous pouvez ne lire que ce qui vous intéresse.

Pendant l’écriture d’un roman, j’essaie de moins lire pour que, devant la beauté et la richesse de l’écriture des auteurs lus, je ne sombre pas dans le doute. 
Mais une fois le roman écrit, même s’il reste révision, correction, peaufinage, je me permets un peu plus de lecture. 
Visiblement la fin du printemps et le début de l’été m’ont apporté l’occasion de butiner dans plusieurs plates-bandes : du conte, aux nouvelles en passant par l’essai. Tiens, tiens, plus d’auteurs français que québécois, choix surprenant de ma part.

Je n’ai jamais prétendu faire de la critique littéraire. Sur Babelio (lien à la fin), et sur de nombreux blogues (voir mon dernier billet pour connaître ceux que je consulte régulièrement), vous en trouverez plusieurs, et des très pertinentes.
Personnellement, je dirais que j’écris mes impressions.
Donc, les voici.


Trois femmes puissantes, Marie NDiaye
Auteure : complètement nouvelle pour moi. À voir la couverture et le patronyme, je croyais à une Africaine. Mais non, l’auteure est de mère française et de père sénégalais, elle est née en France et y a vécu. Donc aucune comparaison avec d’autres écrits d’elle. Que la recommandation d’un membre de mon Cercle des mots écrits.

Lu en entier ou en partie : le livre est divisé en trois, trois personnages, j’ai lu en entier la première et la dernière partie. En diagonale la deuxième. 

Genre : longues nouvelles qui n’ont pas de réel rapport entre elles sinon que ce sont trois Africaines qui s’efforcent de rester elles-mêmes dans un monde patriarcal et macho.

Impressions : Ce que j’ai aimé, ce sont les longues phrases. Tellement différentes du style du 21e siècle, qui bien souvent n’ont même pas de verbes et qu’un paragraphe tient en une ligne. Donc un plaisir fou de retrouver un souffle lent et une musique moins saccadée. 
La force du récit réside dans le caractère des femmes. La dernière surtout. Le choix de répéter son nom à maintes reprises permet de comprendre que le personnage tient à son identité, peu importe ce qu’elle devient, peu importe les souffrances qu’on lui inflige. 
Des portraits de femmes réussis. Qui résistent. 

Soie, Alessandro Baricco
Auteur : Je me souvenais qu’il était italien, je n’avais lu de lui que Mr. Gwyn que j’avais aimé sans plus. Mais, toujours au cercle des mots écrits, nous avons convenu de lire Les barbares de cet auteur pour ensuite en discuter en groupe. J’ai tenu à lire un autre livre de cet auteur.

Lu en entier ou en partie : lu en entier. Un petit 120 pages dont certains chapitres tiennent en quelques lignes. 

Genre : il est écrit roman sur la jaquette, mais on dirait un conte. Qu’importe l’histoire est jolie.

Impressions : L’histoire d’Hervé Joncour qui se rend périodiquement au Japon pour acheter des vers à soie et les rapporter dans son village. Il aime sa femme Hélène avec qui il vit, pas de doute, mais il se passionne pour une belle geisha qui ne dit pas un mot. C’est l’écriture qui nous porte à continuer, parce que l'intrigue, elle, est assez mince. Si vous pensez trouver des descriptions ou des odeurs du Japon, oubliez ce récit. Mais les petites deux heures que vous prendrez à lire ne seront pas perdues, et j’ai bien aimé ce petit livre tout plein de silences.

Une fille, qui danse, Julian Barnes
Auteur : Je ne connaissais pas. Le fait qu’il soit Anglais n’est pas pour me déplaire, j’aime bien voir si tel ou tel roman est d’un style différent selon le pays d’origine de l’auteur.

Lu en entier ou en partie : Lu en entier, mais suivant mes bonnes habitudes, les premiers chapitres, la fin et retour au milieu.

Genre : roman

Impressions : Une de mes amies m’a fait remarquer la virgule et depuis, elle me dérange, je ne vois qu’elle et la questionne. Si on met une virgule dans un titre aussi court et, de plus, sur deux lignes, ce qui à mon sens suffit à séparer les éléments, pourquoi pas un point à la fin alors? Une virgule bien inutile qui n’ajoute rien. 
Qu’importe. 
Une histoire d’amour, d’amitié. Trois gars, une fille. J’aime bien lire la version masculine d’une histoire d’amour. Son côté de la médaille à lui. Comment il voit les choses, les relations. Ce qu’il pense et ressent. J’ai été servie. Tony et Veronica en 1960, période que j’ai connue, même si ce n’était pas en Angleterre. À 60 ans, ce Tony reçoit une lettre notariée lui annonçant que la mère de Véronica — qu’il n’a vue qu’une seule fois —, lui léguant le journal intime d’un de ses copains. Suffisant pour revoir toute sa jeunesse et cette relation entre les trois amies… et Veronica. Une introspection détaillée, sentie où les regrets sont moins nombreux que les questions.

Mourir, mais pas trop, Agnès Gruda 
Auteure : Pour lire régulièrement La Presse, je connaissais cette auteure-journaliste. J’avais lu Onze petites trahisons, nouvelles que j'avais bien aimées.
Lu en entier ou en partie : En partie. Je commençais et si je n’accrochais pas trop, je sautais à la suivante. 
Genre : nouvelles qui ont toutes le lien de la mort… ou presque.
Impressions : Tiens là aussi une virgule dans le titre! J’ai trouvé certaines nouvelles très originales. Comme la dame qui va chez une notaire pour faire son testament et la notaire s’aperçoit que sa cliente lègue tous ses biens à… son propre compagnon de vie. Ou dans Rouge betterave, la vieille dame qui trouve que son petit-fils est tellement gentil, lui trouve toutes sortes d’excuses alors qu’il ne l’est vraiment pas, gentil!
Dommage que j'oublie rapidement les histoires, mais au moins je me souviens si j'ai aimé ou non.

La langue rapaillée, Anne Marie Beaudoin-Bégin
Auteure : Connue en tant que blogueuse, mais comme elle ne publiait plus de billets, je l’avais perdue de vue.

Lu en entier ou en partie : au complet, carnet de note à la main. Et même si j’avais déjà lu certains de ces textes dans son blogue, j’ai relu avec grand plaisir.

Genre : essai sur l’insécurité linguistique des Québécois

Impressions : ce fut un véritable coup au cœur, coup de poing, coup de massue, effet domino en ce qui concerne mes préjugés, mes certitudes. J’adhère à tout ce que Louis Corneillier a écrit dans le journal Le Devoir (lien à la fin).
Je retiens surtout qu’à l’oral, on peut se permettre bien des mots jugés familiers, ou néologismes ou carrément des mots d’une autre langue (comprendre l’anglais surtout) pourvu qu’on se comprenne. Le langage soigné, écrit, c’est autre chose. 
L’auteure émaille son essai de nombreux exemples et de savants raisonnements qui rend le texte accessible à tout le monde. 
De puriste fatigante qui voit des fautes partout, qui ne jure jurait que par le Multidictionaire de Marie-Éva De Villers, que l’insolente linguiste (son pseudonyme sur Facebook) va même jusqu’à contredire, eh bien, je vais calmer mes ardeurs et juger la langue française de mes compatriotes d’un autre œil. D’autant que finalement je la connais si peu. Ne plus demander que l’oral soit aussi soigné que l’écrit. 
Même si certains écarts de langage me hérissent le cœur, je serai plus tolérante, et je vais essayer de ne pas crier à la disparition de ma langue au moindre anglicisme. Elle évolue seulement. Et il faut qu’elle puisse le faire en toute liberté. 

Room, Emma Donoghue
Auteure : Le titre m’était plus connu que l’auteure qui est une Canadienne anglophone, née en Irlande.

Lu en entier ou en partie : Lu en trois coups. Premier coup, version numérique sur tablette, les nombreuses majuscules des noms que le petit bonhomme donnait à toute chose me dérangeaient visuellement. Comme quoi souvent, c’est un détail matériel, graphique qui me fait aimer ou non un livre. Deuxième coup, version papier, je recommence du début, mais décidément je ne parviens pas à passer outre le langage du garçonnet. Cette manie de nommer Monsieur Mur, Madame Table, Madame Lampe, etc. rend la lecture ardue. Le fait d’avoir lu sur l’événement qui a inspiré le roman, ça ne suffit pas à me faire poursuivre ma lecture. Troisième coup : après que d’autres lectrices m’en aient parlé de manière dithyrambique, je récidive, version numérique sur liseuse, et cette fois, je réussis à dépasser les pages agaçantes et je l’ai terminé en quelques jours.

Genre : roman

Impressions : Style original, vocabulaire particulier et tellement près de la réalité (des verbes conjugués comme seuls les enfants le font, exemple : « je m’ai fait mal ». Félicitations à la traductrice). Le fait que ce soit un petit garçon de cinq ans qui raconte donne toute la force au récit. Et ce qui m’a intéressée, ce n’est pas tant l’histoire du kidnapping et comment la mère et l’enfant s’en sortiront, mais c’est leur relation. Comment l’enfant pense, vit, réagit, enfermé depuis sa naissance dans cette toute petite cabane et que deviendra-t-il une fois au dehors, dans la vraie vie.

Mémoire de fille, Annie Ernaux
Auteure : Connue puisque j’ai lu Écrire la vie

Lu en entier ou en partie : en entier, mais des grands bouts en diagonale.

Genre : Autobiographie ou mémoires

Impressions : Ayant lu Écrire la vie qui comprend une douzaine de ses écrits les plus connus, je savais que je lirais surtout par curiosité. Je connaissais l’épisode choisi, cette année 1958, mais cette fois, elle a décidé de détailler, de fouiller, de regarder comme on regarde des vieilles photos et d’essayer de retrouver cette jeune fille qu’elle a été. Si elle, elle considère qu’elle n’a pas encore fait le tour d’elle-même, moi, je considère en avoir assez lu. Si un jour elle écrit sur quelqu’un d’autre, je lirai probablement parce que j’aime sa façon d’étudier les gens, mais sinon, je préfère connaître d’autres auteurs.

Le mystère Henri Pick, David Foenkinos
Auteur : Je connaissais ce nom puisque j’ai lu Charlotte.

Lu en entier ou en partie : en entier, mais, comme souvent, après quelques chapitres, j’ai été voir la fin avant de revenir pour le lire au complet.

Genre : roman

Impressions : Ce n’est pas parce que j’avais lu Charlotte que j’ai voulu lire celui-là, si, un peu. Ce n’est pas non plus parce que ses romans remportent des prix qui laissent supposer que sa prose est hautement littéraire. Simplement parce que j’ai lu (ou vu ou entendu, je ne me rappelle plus trop) cette phrase : « On croit que le Graal est la publication. Tant de personnes écrivent avec ce rêve d’y parvenir un jour, mais il y a pire violence que la douleur de ne pas être publié : l’être dans l’anonymat le plus complet. »
Sachant que c’était l’histoire d’un roman refusé, il est certain que déjà, je me sentais concernée. 
Les deux trois premiers chapitres ne m’ont pas convaincue : trop de noms, trop de détours. Et ces petites notes en bas de page, complètement inutiles selon moi, ont failli m’achever (je l’ai dit parfois, un détail de mise en page qui m’agace et c’en est fini de ma lecture). Mais une fois la phrase qui m’a attirée est arrivée dans le récit, j’ai lu le reste avec grand intérêt. 
Mais je ne suis pas certaine que les lecteurs et lectrices qui n’ont pas d’intérêt dans le monde de l’édition ou de l’écriture vont aimer connaître les doutes et les vicissitudes des écrivains.

Avez-vous lu certains de ces livres? Avez-vous aimé?

Liens
Un site français où il y a des membres de toute la francophonie, le site Babelio>>>

3 commentaires:

  1. Oh, Soie, c'est un superbe roman, tout en non dit. Contente que vous ayez aimé. Il faudrait bien que je lise "Room" (me semble que c'est mon genre d'histoire! ;)

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  2. Quelques titres que je me empressée de noter. Beau billet dame Claude.

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  3. "Les années" d'Annie Ernaux sera certainement une de mes prochaines lectures... "Soie", je l'ai lu il y a plusieurs années... Un beau récit en effet. Ce bouquin sur l'insécurité linguistique me tente bien... Merci pour ces impressions!

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