samedi 14 juin 2025

Où il est question (encore et toujours) de livres



Il fut un temps où j’écrivais dans un journal. Un sujet à la fois.
Il fut un temps où j’écrivais des romans. Une histoire à la fois.
Maintenant, je donne libre cours à cet esprit qui n’arrête pas de penser, qui mêle tout, qui saute du coq à l’âne.
Pour le faire taire, il doit parler, il doit écrire.
De tout ce gribouillage, un seul thème récurrent : les livres.

Donc le pêle-mêle des dernières semaines :
Il y eut le livre de Colombe Turpin: Le mystère de Juliette. Une auteure de la Petite-Nation qui en est à son quatrième roman. Où il est question de fées au pays de la Terre, une histoire de brisure et de réhabilitation. L’auteure présentera son livre dans diverses bibliothèques de la région. Lien à la fin du billet.

Et puis par la poste pour la première fois, La revue Les libraires.
Pas besoin d’aller la chercher à « ma » librairie Rose-Marie. Surprise : revue tête-bêche : d’un côté la revue habituelle, de l’autre, un spécial « Le 12 août j’achète québécois ».
Le temps frais me permet de déguster lentement sans me sentir coupable de ne pas être dehors.
Je furète, je m’attarde À Rafaële Germain, je découvre la librairie Annie Proulx, je cherche mes prochains achats et surtout mes prochains emprunts chez Prêt numérique.

Dans la revue, une réponse de la libraire Annie Proulx m’intrigue : « Sans contredit [je voudrais qu’on découvre l’écrivain] Michel-Maxim Legault! J’ai eu un coup de cœur pour son livre Michelin. »
Comme toujours, je me précipite chez BAnQ ou Biblio-Outaouais pour... le cœur me débat... Michelin! Je dévore. Original, un “monologue autobiographique” est-il écrit dans La Presse. De quoi oublier Trump, le Moyen-Orient, le ciel gris, l’eau froide de la piscine ou le gazon qu’il faut couper.

Et qui dit livre, dit : “toujours pas de nouvelles des éditeurs à qui j’ai envoyé un manuscrit”.
Trois mois. Je relance ou j’oublie? J’oublie ou je publie moi-même?
D’autres que moi se sont aussi posé la question. Je les connais depuis une quinzaine d’années via le blogue qu’elle tenait, via les livres qu’elles ont publiés, via les batailles personnelles et professionnelles qu’elles mènent. Les revoici, toujours complices, avec un concept d’auto-édition. Haut de gamme ajoutent-elles.
Mylène Gilbert Dumas et Elisabeth Tremblay ont donc fondé La Rocade.
L’auto-édition m’intéresse depuis longtemps. J’ai donc longuement regardé leur site, posé des questions, reçu rapidement des réponses. Ça me tente pour rééditer les trois tomes des Têtes rousses et peut-être le prochain-qui-n’a-pas-l’air-de-trouver-d’éditeur.
C’est une super idée. Une idée qui répondra sûrement à plusieurs auteur·e·s. Mais pas pour moi, pas pour l’instant. Pas tant que j’essaie d’éviter Amazon.
Toujours cette question mcsweenienne : en ai-je vraiment besoin?

Et entre deux brassées de lavage au sous-sol, je regarde les trois bibliothèques, tous ces livres amassés depuis cinquante ans! Qu’en faire? Si un jour — le plus lointain possible — je dois me résoudre à aller vivre dans un petit quatre et demi loué, je ne pourrais apporter tout ça. Alors, je jette, je donne. Tranquillement.
Surtout, je me détache. Je réussis à peu près à ne pas vouloir remplir les vides.
Les plus difficiles à laisser aller : les plus vieux, les Balzac, Victor Hugo, Proust, Simone de Beauvoir, Sartre, Camus, les soeurs Groult, Marie Cardinal. Et les Québécois. Les derniers à partir seront les reliés: Hervé Bazin, Han Suyin, Slaughter, Les rois maudits, les prix Nobel, les coffrets de Colette, d'Annie Ernaux.
Ceux que je garde le plus longtemps possible avant de les donner aux archives : les livres de mon père Jacques Lamarche, les miens, et ceux publiés aux Éditions de la Petite-Nation.
Si vous en voulez, laissez-moi le savoir.

C’était ma semaine.
Le temps se réchauffe, c’est sur la galerie arrière que je lirai... quoi donc? En attendant que Recueillir (un livre qui juxtapose prose et vers m’intéresse beaucoup ces temps-ci) de Louise Warren soit disponible, je vais jeter un coup d’œil sur son essai L’enveloppe invisible. Un livre qui commence par :
Le lieu que j’imagine se situe dans le territoire de l’attente. On ne le mesure pas, on ne le voit pas, on avance sur des pistes qui s’effacent à mesure. Pour l’instant, ce lieu m’échappe. Je l’appelle « l’enveloppe invisible ». Espace des mutations qui s’opèrent en profondeur. Je note : « Entrer dans une phrase comme dans un couloir sans savoir quelle porte va s’ouvrir. »
ne peut faire autrement que m’attirer.
Bonne semaine et bonne lectures ou bonne écriture ou bonnes brassées de lavage!

Lien vers La Rocade >>> 
Lien vers la revue Les Libraires >>> 
Lien vers Michelin >>>
Lien vers Colombe Turpin >>> 

mercredi 28 mai 2025

« Tesselle dans une grande mosaïque »


Au surlendemain de la clôture des célébrations du 350e anniversaire de la seigneurie de la Petite-Nation, tout est encore pêle-mêle pour moi.
Je croyais que l’événement était à 13h30, comme celui de Montpellier.
C’était à 11 heures
je suis arrivée à 12h30
tout était fini
presque.

J’ai eu le temps de voir l’emplacement de la capsule
j’ai surtout eu le bonheur d’avoir LE livre, Au fil de l’histoire.

Depuis, cul par-dessus tête, tourbillon et fouillis 
tous les mots se bousculent parce que je ressens tout à la fois :
reconnaissance, joie, orgueil sûrement.
Je veux dire merci, mais je trouve que ce n’est pas suffisant.
Je voudrais non pas dire, mais montrer
et pour ça je fais appel à l'autre moi, elle qui a la parole facile mais nerveuse

Elle s’avancerait vers ceux et celles par qui c’est arrivé, Marthe Lemery entre autres
Soit elle se mettrait à parler fébrilement
les yeux fuyants
les mains fouettant l’air
ou juste un grand sourire
ou même un trépignement comme une enfant qui vient de recevoir son bonbon préféré
son favori : sous forme de mots.

Soit elle oserait à peine les regarder
le ventre crispé
la gorge nouée  
de peur d’être devinée
de toute façon, ce serait trop
ce serait beaucoup
ce serait intense.
Alors qu’elle voudrait être comprise à mi-mots
peut-être un câlin qui dirait tous les mercis accumulés.
Elle a peur d’exagérer
de paraître orgueilleuse, prétentieuse
de ne pas mériter cette visibilité 
comme un compliment
de devoir expliquer pourquoi elle est si émotive
incorrigible sentimentale
compliments qui lui font plaisir pourtant.

Alors elle ne fait rien
elle attend
que le tourbillon cesse de tourner
elle se calme le pompon
pour y voir clair
pour trouver le ton juste
trouver les mots
dire qu’elle a depuis longtemps voulu laisser une trace
sans trop en connaître les raisons profondes
et voici qu’elle est dans un livre qui sera (qui est depuis le 27 mai) enfoui dans une capsule intemporelle
qui sera peut-être ouverte dans 10 ans.
Plus trace que ça...

Dans un livre!
Elle les aime tant
les livres, les mots, les phrases qui disent la vie, l'histoire dans ce cas-ci
qui apprennent la vie
elle les aime depuis toujours
elle a appris à se comprendre dans les livres, dans les mots
les siens, ceux des autres
elle cherche encore d’ailleurs
alors si ces personnes-auteures parlent de la Petite-Nation dans un livre,
si, en plus, elles parlent d’elle dans un livre
elle devient le cœur tout mou,
la parole hésitante
les yeux fuyants
vulnérable
elle se sent reconnue, comprise, aimée
c’est à son être profond, au meilleur d’elle-même, qu’elles s’adressent.

Mais peut-être n’est-ce qu’illusion
juste un hasard
elle se dit que c’est encore une émotion d’hypersensible
elle relativise
chacun·e son chemin, sa vie
elles ont croisé le sien
faut pas en faire tout un plat
pas minimiser non plus

Je veux dire la reconnaissance
mais je ne sais comment bien la mesurer ni l’exprimer.
Je veux dire aussi félicitations pour tout ce travail de recherche
bravo pour les textes
merci pour toute la visibilité pour ces « tesselles [d’une] grande mosaïque commencée il y a 350 ans avec la création de la seigneurie de la Petite-Nation. »

Dans ce livre, tu es « tesselle d’une grande mosaïque »
accepte et remercie
cesse de tout compliquer
retourne aux autres livres à lire
aux autres billets de blogue à écrire
et dis au monde que le livre Au fil de l’histoire est dans les bibliothèques de la région
et qu’on peut encore lire les 24 capsules sur le site Internet de la MRC Papineau.

Lien vers les capsules publiées sur Internet >>>
Reportage à TVA Gatineau sur cette capsule intemporelle à Montebello >>>



dimanche 25 mai 2025

Je ne suis pas née ici, mais je vais mourir ici


Il ne faisait pas chaud, mais il ne pleuvait pas.
Alors la cinquantaine de personnes réunies à Montpellier ont pu effectuer le parcours prévu par le Comité consultatif sur la culture et le patrimoine de la municipalité.

Un événement très bien organisé. Les musiciens Max et Frak nous guidaient de place en place. Le conseiller Guy Martel a terminé l'événement en beauté en chantant une de ses compositions.
Le comité, composé de Nicole Touchette, Richard Strasbourg, Nicolas L’Écuyer-Pilon et Lise Castonguay (absente sur les photos) a travaillé fort et depuis longtemps pour ce dévoilement de «plaques commémoratives valorisant la contribution de personnages historiques au sein de la communauté.»

Le parc municipal devient le Parc Joseph-Omer-Montpellier
La bibliothèque rend hommage à Maria Brault (dans les années 1940-1950, on la connaissait mieux sous le nom de Mme Gédéon Legault)
La place Joseph-Robineau
Et finalement le Centre communautaire Félicien-Bricault
Il fut question aussi du Jardin des souvenirs.

Les membres du comité nous apprenaient l’histoire de chacun·e et les visiteurs étaient invités à raconter quelques anecdotes au sujet de chacun. Les frères Montreuil ne se sont pas laissé prier, ils avaient des souvenirs à revendre. Des histoires de « snow », de chapelet autour du chat de leur grand-mère, d’hosties mangées que le curé Bricault allait chercher à Hull. « Ah les petits pendards! »

Quant à moi, ma petite contribution ne concernait que le curé Bricault.
Parce que je l’ai connu.
Autant à Montpellier qu’à Notre-Dame-de-la-Paix.
Parce que j’ai vécu une bonne dizaine d’été dans la Baie-de-l’Ours jusqu’à ce que mes parents décident d’y bâtir maison. J’y suis restée un an et demi avant de déménager à Notre-Dame-de-la-Paix où je vis depuis plus de 50 ans.

J’ai sans doute appris à quelques personnes présentes que l’ancêtre des Bricault, un soldat de Carignan, s’appelait Jean Bricault... dit Lamarche.
Eh oui, nous avons le même ancêtre! Bon, nos ancêtres communs remontent à huit générations dans les années 1770, mais tout de même. J’étais toute petite quand mon père nous le répétait chaque été : le curé Bricault est parent avec nous!
Et j’ai découvert encore mieux, sa mère était un Major et il se trouve que mon frère a épousé une Major de Saint-André-Avellin, alors nous sommes parents de ce côté-là aussi.

Je me souviens tout particulièrement d’une kermesse qu’il avait organisée, sans doute pour ramasser des fonds pour un de ses projets. Il y avait autant de jeux pour les enfants que d’activités pour les adultes.
Mon dernier souvenir de lui, c’est à Notre-Dame-de-la-Paix. En effet, quand j’y suis arrivé en 1972 j’ai su qu’il y habitait, je passais devant sa maison souvent. Je n’allais plus à la messe depuis longtemps, mais à la messe de minuit, je retrouvais mes messes d’enfant. Les sermons du curé Bricault n’étaient jamais longs ni ennuyeux.
Un été, j’étais en simple maillot de bain et je prenais ma douche, je me lavais la tête... dans la rue. Eh! oui, sous les jets d’eau puissants d’un arrosoir de pommes de terre. Qui passe en auto dans la rue? Qui ralentit? Le curé Bricault. Croyez-vous qu’il s’est indigné de nous voir en maillot de bain dans la rue? Pas du tout, il a trouvé que c’était une bonne idée. Avec un grand sourire, il a continué sa route.

Voilà, alors je n’oublierai jamais ni le curé Bricault, ni Montpellier. Qui oublie les étés de son enfance, de sa jeunesse?
Tout ce qui concerne l’histoire et le patrimoine de la Petite-Nation m’intéresse.
Je ne suis pas née ici, mais je vais mourir ici!

vendredi 16 mai 2025

Voyages d'encre





« À mi-chemin entre ici et là-bas, une journaliste, voyageuse et amoureuse des mots se questionne. [...] Oscillant entre l’essai poétique, le récit intimiste et le récit de voyage, l’autrice explore avec une plume sensible cet appel de l’ailleurs où l’on ne cesse de se découvrir, se nourrir et se confronter ainsi que cette nécessité d’un ici pour renaître autrement à soi. »
Site Internet des Éditons Somme Toute

Pour moi, le nom de Marie-Ève Blanchard n’évoquait rien.
Son nom pourtant sur bien des guides Ulysse.
Un guide Ulysse peut donner le goût de voyager
Sans même connaître le nom de l'auteur-e
Le nom du pays écrit en gros
Le plus important
Le plus attirant.

Mais pour les mots ailleurs, ancrage, voyage, bruissement du monde
Récit de voyage et récit intimiste
Les mots lire et écrire aussi
J’ai voulu savoir le nom de l'auteure
Marie-Ève Blanchard
Tout savoir du livre et d’elle ensuite
Découverte de son blogue
https://mawoui.com/
Depuis 2011
Lu plusieurs billets
Retour à son livre : Les bruissements du monde
Maison d’édition : Somme toute (Hamac maintenant rattaché à Somme Toute)
Directrice : Anne Peyrouse
Qui a écrit : Anne Hébert, si tu veillais ma tristesse

Comme un terrain familier
un style dans lequel je me reconnais, je m'identifie
Je zieute depuis tellement longtemps : tout autant la maison d’édition que la directrice
Leur montrer mon livre qui parle de voyages, d’ici et d’ailleurs, de chemins d'écriture
De déceptions aussi.
Impression d’être parmi elles
Les regarder par la fenêtre
Et je voudrais qu’elles me voient.

Pour l’instant, seulement un miroir de film policier
Je ne veux pas leur parler, trop nerveuse j’en bégaierais
Comme Marie-Sissi Labrèche quand elle a parlé de son livre Un roman au four

Je préfère leur écrire
Oser  
Plus que merci, plus que bravo
Ni avis ni critique
Simplement une impression de lire mes propres phrases.
Je rêve d’être lue comme je les lis
Plus que dans un blogue
Dans un livre
pérenne
Qu’elles voyagent dans mes mots comme j’ai voyagé dans les leurs.
Conversation par l’intermédiaire des livres
Complémentaires
Côte à côte
D’égal à égal ou non

Leur écrire: vos livres me font écrire
Et c est encore mieux que les livres qui font voyager.
Un voyage dans les mots
Dans le moi
Dans le vous
Et les elles
Dans les mots d’encre.


vendredi 9 mai 2025

La Petite-Nation, encore nommée

Encore une fois, entendre, voir « Petite-Nation ». 
Chaque fois, grand sourire et cœur qui bat un peu plus vite.
Tourisme Petite Nation (en fait, la MRC Papineau- note 1) est finaliste pour le prix Plumes d’excellence de l’Association des communicateurs municipaux du Québec, dans la catégorie « Campagne événementielle » pour l’événement 350e anniversaire de la Seigneurie de la Petite-Nation.(note 2)

Fière et reconnaissante de voir que d’autres que moi l’aiment aussi, la célèbrent, la promeuvent, la chantent, l’écrivent.
Ma Petite-Nation, mon « ici » choisi.

Petite-Nation
Le nom de la rivière qui serpente entre Duhamel et Plaisance
Le nom de la Seigneurie il y a 350 ans
Le premier nom suggéré pour la MRC en 1981 (je l’ai lu dans des procès-verbaux)
Une partie du nom du comté fédéral
Ni hameau ni secteur
Des raisons sociales  
Bien plus qu’une région touristique
Une région de cœur

Je rêve du jour où la MRC changera de nom
Je rêve même d’un gentilé
Gens de la Petite-Nation, nommons-nous
Créons notre gentilé
Petite-Nationien  Petite-Nationienne
Petite-Nationais 
  Petite-Nationaise
Weskarinien – Weskarinienne

« À défaut d’un gentilé spécifique, on a recours à des périphrases du type les habitants de..., les gens de..., la population de..., les citoyens de..., les résidents de..., etc. À l’inverse, dès qu’une poussée démographique sensible se fait sentir dans un noyau habité, les résidents éprouvent le besoin de se nommer, de consacrer dans une dénomination particulière le sentiment d’appartenir à une communauté distincte, dotée d’une personnalité originale. » (note 3)

Les critères :
la clarté, ça va.
la brièveté, ça peut aller
l’absence de marque péjorative, ça va aussi.
il reste la consonance harmonieuse : “par sa fonction même de mot nouveau, il est important que le gentilé présente une succession de sons sinon gracieux du moins non cacophoniques; toute forme désagréable ou curieuse à l’oreille pourrait se voir rejetée naturellement”.


En attendant, au moins continuer, encore et encore à nommer cette région chère a mon cœur.
D’où viens-tu?
De la Petite-Nation
Préciser ensuite, si besoin est : en Outaouais, autour de Montebello, à une heure de Gatineau, entre Lachute et Gatineau.
Mais toujours en premier : la Petite-Nation.

dimanche 13 avril 2025

Amoureuse

« Si je me réveille la nuit, je sais que je peux replonger dans la lecture et que le sommeil va me cueillir à nouveau, embarquée loin dans l’écriture d’autres que moi et parfois ramenée si près de moi que j’en suis bouleversée, comme si le livre n’était que pour moi. Je ne sais pas comment font les auteurs pour arriver à ça mais c’est magnifique. »
Jeanne Benameur, Pas assez pour faire une femme

« cet espace vide
est celui où j’aventure aussi mon pas

c’est là que la pensée m’attend
chaque jour
et chaque jour je tente de rassembler l’épars

j’y mets du temps
et du silence
ma solitude fertile

c’est ainsi que je désire ma vie »

Jeanne Benameur, Les pas d’isis



Je les veux tous, je veux tous les lire.
Le premier : L’enfant qui
C’est Laurence qui me l’a conseillé. Sachant probablement que j’aimais les livres écrits au « tu ».
Comme on présente un possible fiancé.
Je suis devenue amoureuse dès les premières pages.
Il y a des jours et des nuits (de pleine lune, toute rose soit-elle) où je ne pense qu’à eux.
Je vois les couvertures, le format.
J’ai hâte de toucher le papier.

Je me lève, je cherche dans ma bibliothèque, il me semble que je l’avais celui-là : La patience des traces.
Chez Prêt numérique ou chez l’éditeur, je lis les extraits.
À la BAnQ ou chez Biblio Outaouais, j’emprunte tout ceux que je peux, qu’il me reste à lire.
Et relire encore ceux que j’ai aimés.
Tous.
Quand j’aime, ce n’est pas à moitié.

Je me cherche dedans
Je m'y trouve souvent
Parfois, ça m’étreint la poitrine
L’esprit engorgé des mots qui poussent vers la main
Pour écrire à mon tour
Comme elle, laisser venir les mots
Pour raconter un personnage qui s’impose, qui se promène dans ma tête depuis des mois, des années
Une émotion qui point
Des images qui reviennent
Du temps où je n’avais pas le temps

Aujourd’hui, il me faudrait y mettre le temps
Chercher le silence
Et fertiliser ma solitude.

lundi 13 janvier 2025

2025, l'année où un éditeur publiera mon prochain livre


Je n’ai rien publié sur ce blogue depuis un gros mois. On a même eu le temps de changer d’année. J’ai eu le temps de
fêter en famille
chercher des illustrations de « funny old ladies » pour envoyer des vœux originaux
donner et recevoir des cadeaux (des livres bien sûr)
être engluée dans des embouteillages à plus finir sur la 15, la 40
célébrer la nouvelle année et les 64 ans d'une amie 
traîner une grippe un bon huit jours (merci Lyse)
changer mon profil de Facebook (merci Guylaine) et de n’en pas revenir des 80 et plus « clics »

Pas vraiment eu le temps ni le goût d’écrire.

Mais j’ai lu. J’ai lu pour me redonner le goût de travailler le manuscrit en cours. Mais la belle affaire, ce que je lis me scie, me gèle, me paralyse les doigts sur le clavier!
Exemple : Genèse d’une révolution sans mort ni sacrifice. Bon, disons que ce n’est pas le titre qui m’a attirée. C’est le nom de l’auteur : Steve Gagnon. Écriture théâtrale que j’adore.
Scénarios catastrophiques d’Alexie Morin, dont j’avais aimé Ouvrir son cœur.
Aussi : Entre l’île et la tortue de Karine Rosso que je ne connaissais pas.

Tous des textes comme j’aime lire ces années-ci : fragments ou prose poétique, qu’importe le nom que les éditeurs donnent à ce genre plus ou moins nouveau de petits textes courts.

Ça devrait m’encourager de voir que des éditeurs publient ce genre de texte. Oui, je prends des notes, je sais à qui envoyer mon prochain manuscrit pour qu’il réponde à la fichue politique éditoriale.
Reste à le travailler pour me faufiler dans l’embouteillage de l’autoroute de l’édition québécoise.

C’est le vœu que je me souhaite pour l’année 2025.
L'écrire dans le titre, c'est comme attirer la chose, non?

(Si vous commentez ici, n'oubliez pas une petite signature ou initiales.)



samedi 7 décembre 2024

Comme un miroir



«Nous avons enfin pris connaissance de la vraie nature de l’existence humaine : la parole sans emballage fonctionnel, dans sa pluralité et sa liberté. De formes, de genres, de ponctuations, de syntaxes, d’adverbes et de brides délacées.
Rien ne sera catégorisé. Tout sera diffusé. [...] Nos jours deviendront fragments d’écriture.»
Anne Hébert, si tu veillais ma tristesse, Anne Peyrouse
«Écrire, c’est l’inassouvi à quoi nous redonnons place.
Nous ne serons jamais rassasiés d’écriture. L’écriture n’est pas là pour ça. Elle ne comble pas. Elle cerne l’inassouvi. Elle le désigne sans plainte ni peur.
Écrire c’est savoir qu’on est un être fini, limité, et porteur pourtant de quelque chose d’immense.
C’est accepter de s’installer dans ce hiatus et y trouver son propre souffle.
Cela met en branle tout l’être.»
Vers l’écriture, Jeanne Benameur


Ça y est, c’est revenu. (voir note 1)
Ça finit toujours par revenir.
Lire et, après quelques lignes, quelques pages, vouloir écrire. Écrire comme. Écrire sur le même sujet : les livres, l’écriture, les écrivains. Soi. Moi.
Sauf que je n’ai pas d’histoire en route. Je ne suis pas une conteuse d’histoire, pas de personnage qui s’impose. Que moi. Ma vie. Les bientôt 75 ans de ma vie.

Il a suffi que je lise quelques lignes de Jeanne Benameur et d'Anne Peyrouse, et c’est parti tout seul.
Écrire. Sans forme précise, juste comme les pensées surgissent.
«Rien ne sera catégorisé. Nos jours deviendront fragments d’écriture.»
Relire, oui; retravailler, réécrire, oui pour que de méandre tortueux, torrent ou ravin, l’ensemble coule jusque dans le cœur des lecteurs (et oui, oui, des lectrices).

Mais encore faut-il écrire sur... Sur mes lectures? Mes voyages? Ma région? Je le fais déjà sur mon blogue, sur mon site.
Prendre le risque d'écrire sur les gens autour de moi, les gens à l’intérieur de moi. Transformés, déformés. Forcément. Plutôt les morts que les vivants pour ne blesser personne.
Dominique Fortier écrit sur Emily Dickinson ou Herman Melville.
Julia Kirninon sur Gertrude Stein.
Martine Delvaux sur Hollis Jeffcoat, Joan Mitchell et Jean Paul Riopelle.
Anne Peyrouse sur Anne Hébert. Sa mère littéraire. J'aurais plutôt des soeurs littéraires. En quittant le miroir, en regardant par les fenêtres, je trouverais bien. Je les nommerai.
De tous, Anne Hébert remporte. Souvenir de ma Belles-lettres, du huit clos dans les Chambres de bois, de Kamouraska, des fous de Bassan. Des lieux aussi, de la France, du Québec.

Pourquoi veux-je plus? Encore. Parce que ledit blogue va disparaitre avec moi?
Ce n’est pas de littérature dont j’ai besoin, mais de psychanalyse? Pour comprendre une bonne fois pour toute pourquoi je veux tant un "vrai" éditeur, et lâcher prise ou aller voir ailleurs si j’y suis. Dans le sentier de raquettes ou de vélo. Sur la plage. Ou une librairie!
Je me dis que c’est trop tard. Je me dis tant pis.

Finalement toute ma vie, j’aurai eu besoin d’une obligation. Un devoir. Qu’on me dise quoi faire.
Alors si personne ne m’appelle, ne m’oblige, ne me veut... Je ne fais d’efforts que si on me signifie clairement, contrat en main, que oui, on veut les publier tous mes fragments inclassables. Sinon, je frustre, je procrastine, je me dis à quoi bon. Je continue pour moi seule.

Et, finalement, sereine, je me réjouis de me voir dans le miroir d’une Jeanne Benameur, d’une Anne Peyrouse. Le temps de quelques pages.

Note 1:
En 2018, c'était là aussi: Je deviens elles >>>

Mise à jour/ajout:
Si j'avais une mère littéraire, ce serait Louky Bersianik. J'avais 26 ans lors de la publication de L'Euguélionne. J'ai pris deux années de sabbatique et j'ai écrit. Elle, devant.
J'en parlerai jusqu'à la fin de ma vie.  Une fois, en 2017 >>>

dimanche 24 novembre 2024

Coup de coeur de 2024



Décembre bientôt. Suivra 2025.
Il y a un an, après la parution du très beau livre (montage graphique de Jean-Luc Denat) sur le moulin disparu de Papineauville, je rêvais d’un livre sur l’histoire de la Petite-Nation. Et voilà que début 2024...

Qu’est-ce qui est en tête de ma liste d’événements à retenir en 2024, mon gros coup de cœur, ce dont j’ai eu envie de vous parler chaque mois et surtout entre mai et octobre, ce que je retiendrai, ce qui me rend fière, ce qui me touche vraiment pour:
— le graphisme
— l’ampleur du projet
— la réussite du projet
— et surtout parce qu’il est question de ma chère Petite-Nation

Réponse :
Le 350e anniversaire de la Seigneurie de la Petite-Nation

Dès la première annonce, j'ai aimé le graphisme :
Dans le cas du 350e, je ne connais pas qui a créé le matériel promotionnel, l’image de marque, mais chapeau! Les couleurs, les formes, les fontes, le logo, j’aime tout. Et pour avoir travaillé dans le domaine, je sais qu’un visuel fort crée une émotion et invite à poursuivre plus loin. Ce fut mon cas, dès le début, j’ai dit Wow! Et j’ai surveillé chaque annonce dans les réseaux sociaux, dans le site de la MRC, sur les véhicules, sur les oriflammes.  Je n'ai pas assisté à tous les événements, à deux ou trois seulement. En revanche, j'ai lu chaque capsule.

J’aime la présentation Web, l’implication de la MRC :
Les vidéos réalisées par Agnès Créations sur les 25 municipalités de la MRC Papineau ont permis «d’offrir un bref aperçu des traces du passé, un regard rapide sur le présent et un clin d’œil vers l’avenir.»
Martine Caron et Jessy Laflamme de la MRC Papineau ont assuré la publication sur le site de Tourisme Petite Nation (lien>>>).

Et enfin, et surtout, j’aime notre Histoire :
Marie-Josée Bourgeois et Marthe Lemery ont créé un recueil de citations pour les 25 municipalités, et de plus, elles ont rédigé 24 capsules historiques. Tous ces textes permettent d’aller bien au-delà de la Seigneurie, de parler bien plus que des Papineau et Bourassa, et c’est à travers des personnes, plus que des dates ou des lieux que l’on découvre un peu de notre passé et même de notre présent. Plus que découvrir, apprendre. Les auteures disent « capsules », je dis véritable chronique fouillée, digne d’un texte dans une encyclopédie. Bravo et merci pour cet immense cadeau.
Les titres des 24 capsules :
1. Notre seigneurie, à ses débuts!
2. Notre seigneurie, à l’ère des Papineau
3. Seigneur, mon régime!
4. Les Papineau et les Bourassa Fils de soldats, cultivateurs et hommes politiques
5. Weskarinis, un peuple d’ici!
6. Dans tous nos cantons, y a des… colons!
7. Nos « augustes veilleuses » de rangs…
8. L’orme, l’arbre favori de Papineau
9. Louons maintenant nos grandes femmes!
10. Les pistes de portage, ces premiers chemins de terre
11. Il y a 100 ans Victor Nymark arrivait au Québec
12. Fille de fermière et femme de carrière
13. Arthème, Nelphas, Léon et Hyacinthe, nos divins gosseux!
14. Il y a 350 ans arrivait le premier touriste français!
15. J’ai vu la Rouge, la Blanche et la Lièvre
16. J’ai les couleurs d’une rivière (partie 2)
17. De (drôles de) choses et d’autres…
18. Un des plus vieux métiers du Nouveau Monde
19. La traversée de deux mondes entre Montréal et Duhamel
20. Des auteurs qui nous disent au monde
21. Papa ours et la petite histoire
22. Nos glorieux à nous
23. Sur les traces de Talbot Papineau, héros de Passchendaele
24. Augustine Bourassa, une artiste restée dans l’ombre (à venir)

Comme je suis de la génération livre plus qu’Internet, je souhaite évidemment que le tout soit réuni dans un livre. Ce serait un beau cadeau de Noël... 2025!

samedi 23 novembre 2024

Encore

Encore une fois.
Une quatrième fois.
Le lundi, encore la circulation, les ralentissements sur les autoroutes: la 50, la 15, la 40. Ne pas paniquer pour les 15 minutes de retard.

À la clinique Angus : l’attente.
Ah! l’attente.
Attendre, regarder l’heure, écouter. 
Attendre d’entendre son nom.
Pour entrer dans la grande salle.
Pour être installée dans le cubicule 13 ou 14, celui des greffé.e.s de la cornée.
Pour être accueillie dans la salle d’opération, ensuite dans la salle de réveil.
Pour moi : retourner dans la salle d’attente, attendre, regarder l’heure pour avoir le droit de revenir après l’opération.
Attendre la venue du médecin, celle de l’infirmière. Attendre l’heure du départ. Encore 4 heures.
Rester calmes. Respirer. Espérer.

Seule. Savoir l’autre seule. Avoir mal de savoir que l’autre a mal.
Attendre la prochaine étape.
Être toute présente dans l’attente. Et seulement là.
Dans chaque après, on est encore en attente.
En fait, peut-être que ce que j’appelle l’attente n’est pas autre chose que vivre. Vivre le moment présent. Sans y prendre plaisir. Juste rester calme. Ne pas laisser venir les pensées négatives. Ne pas laisser venir le chaos, la peur. Pas vraiment subir mais observer la pluie en attendant le soleil. Se voir marcher sur une plage, entendre les vagues douces de la mer. Que la respiration redevienne et reste normale.
Ne pas tout chiffrer. Combien sur 10 le mal? Combien sur 10 c’est difficile? Combien sur 10 la hâte d’être après.

Finalement, partir, rouler lentement dans le noir des rues, guetter les feux rouges, les verts, surveiller les cyclistes, les piétons, jeter un coup d'oeil sur le GPS.
À l’hôtel, payer, demander un fauteuil roulant, monter au 6e. Retourner stationner le CRV-Honda-recherché-par-les-voleurs au sous-sol, plus à l’abri.
S’installer, donner des nouvelles, répondre au téléphone, parler tout bas, regarder la télé sans rien retenir. S’endormir tôt.

La nuit, étouffer un peu parce que les fenêtres ne s’ouvrent pas. Avoir chaud. Avoir peur. Réciter des Je vous salue Marie comme mantra. Expirer longuement. S’endormir sans s’en apercevoir.

Le matin, se préparer, aller déjeuner, y prendre plaisir. Se sentir presqu’en vacances, en voyage. Bavarder avec les serveuses. Jaser de Montréal, d’Habitat 67 en face, de notre ancienne vie sur l’île de Montréal.

Attendre que le temps passe, jeter un coup d’œil sur la tablette, jeter un coup d’œil sur nos montres, toutes les demi-heures.

Pour le suivi, à l’hôpital maintenant, comprendre la nouvelle façon de payer le stationnement. À l’intérieur, se mettre en file, donner son nom, attendre dans la grande salle, voir tous ces malades, réaliser, accepter que nous sommes comme eux, malade, tout en espérant redevenir comme avant, comme quand le mois de novembre voulait dire le sud, voulait dire belle retraite, beaux projets.
Écouter les noms et les numéros de la salle. Se forcer à être dans le ici et maintenant.

Voir la technicienne, lire au moins cinq lignes sur le tableau de Snellen. S’en réjouir. Penser que la dernière fois aussi... avant le rejet!

Retourner dans la salle... d’attente. Entendre difficilement son nom, salle 32. Revoir l’ophtalmologiste de la veille, celui qui parle en français. Cinq minutes. « Tout est beau, revenez jeudi ».

Reprendre la 40, la 15, la 50, le trafic, le ralentissement, la longue ligne rouge sur Google maps. Être patiente, combattre la fatigue.
Manger une frite à Lachute. Arriver à la maison. Chercher la chatte. Lui demander si elle va bien. Ne pas se pencher pour la flatter.
Écouter la télé, plus ou moins. À 21 heures se coucher, les gouttes, attendre cinq minutes entre chacune, la coquille.

Le jeudi, recommencer. Deux heures pour aller, trois pour revenir. Attendre, voir, écouter. Quinze minutes : « la greffe est belle, revenez dans deux semaines. »

Dans la nuit, rêver à un glissement de terrain. Devant, le chaos? Tout s’effondre?
Le lendemain, écrire non pour me souvenir, mais pour réunir mes moi, me retrouver, passer par-dessus l’avalanche d’images, le déferlement de pensées. Essayer de réunir mes moi dispersés. Le moi proche aidante, le moi conductrice dans une ville, le moi qui attend. 
En sommes-nous là? Les mot vieilles et malades s’annoncent, s’incrustent. Ne pas les laisser prendre racine.

Écrire ces trois jours, chaque mot pensé, chaque minute vécue. Comme chaque battement de cœur, chaque inspiration. Et expirer, évacuer, mettre de l’ordre dans nos vies. Se retrouver.
« Or, quand j’écris, quand je suis dans le texte, je trouve encore une forme d’apaisement, une impression de mettre de l’ordre dans le chaos du monde. » 
J.P. Chabot dans Le Devoir, 16 novembre 2024.
Au sujet du livre Voyage à la villa du jardin secret.