mercredi 31 août 2011

Être un auteur, ce n’est pas qu’écrire

La lecture des messages et des commentaires d’un groupe d’auteurs m’ébranle vraiment beaucoup. Il est question des réels problèmes et questionnements d’auteurs : chercher un éditeur, promouvoir son livre, organiser un lancement, payer pour les séances de dédicace dans les salons du livre, s’intéresser à la traduction. Pourtant, je ne peux pas croire qu’avec l’expérience que j’ai dans ce domaine, j’ai vraiment cru, naïvement, qu’un auteur pouvait se contenter… d’écrire. 

Parce que j’ai vu mon père publier chez Jacques Hébert et Pierre Tisseyre, où il n’avait pas besoin de s’occuper de rien d’autre que d’assister aux prestigieux lancements et d’accepter quelques entrevues dans les médias d’alors… 

Parce que je l’ai vu remplir avec succès tant et tant de demandes de subventions pour continuer à écrire… 

Parce que je l’ai vu fonder plusieurs sociétés qui, toutes, étaient dans le but de publier ses écrits ou ceux des autres… 

Parce qu’une fois adulte et en âge de travailler, je me suis jointe à lui pour divers projets : livres scolaires, dictionnaire, essais… et que j’ai ainsi connu les dessus et les dessous de l’édition… 

Parce que je l’ai beaucoup déçu, même s’il ne me l’a jamais dit, en refusant de prendre la direction de la maison d’édition qu’il avait fondée, tout en acceptant de demeurer graphiste-monteuse-en-pages… de journaux, livres, dépliants, ce qui m’a permis de garder des contacts dans le monde de l’imprimerie et celui de journaux hebdomadaires… 

Parce que de 26 à 30 ans, j’ai écrit, j’ai été publié chez des éditeurs reconnus, sans avoir à m’occuper de promotion, de ventes, ni de lancements. Je m’assoyais et j’écrivais… 

Parce que, par la suite, j’ai connu l’autoédition et décelé mes faiblesses en promotion et en demandes de subventions, j’ai donc cherché à renouer avec les éditeurs « reconnus », force fut de reconnaître que les entreprises ne sont pas toutes d’égale force, il y a les lignes majeures et les petites lignes presque de garage... 

Alors, j’ai peut-être cru qu’avoir la chance que son manuscrit soit accepté par un éditeur faisait de moi un auteur satisfait qui n’aurait plus qu’à écrire… comme à mes débuts. 

Devant les efforts que les plus jeunes déploient pour être publiés, pour vendre leurs livres, pour trouver la perle rare d’éditeur, j’essaie de secouer cette léthargie des dernières années qui n’était en fait qu’attente et réécriture du même manuscrit, je veux retrouver l’enthousiasme et la confiance en moi qui va de pair, comme des vases communicants, avec la confiance que je dois mettre dans un éditeur. 

Tout en restant lucide, réaliste. Mais participante. Qui sait, je recommencerai peut-être à écrire, quitte à ce que le titre de mon livre soit : Comment j’ai arrêté d’écrire à 60 ans.

18 commentaires:

  1. Quel beau billet. Juste et vrai. C'est pourquoi j'écris et j'écris et j'écris. Pour le reste, on verra plus tard ;)

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  2. À idmuse: j'ai oublié de dire que ces "jeunes" loups et louves, dont tu es, travaillaient souvent à plein temps alors où trouver le temps et la motivation pour écrire?

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  3. Excellent billet !

    Vu mon entrée tardive dans cette merveilleuse ligue d'auteurs et d'éditeurs, j'ai été moi-même surprise d'apprendre qu'il fallait traiter notre oeuvre comme si c'était une PME. Je compte faire le lancement de ma trilogie au printemps 2012 et s'ensuivra la tournée des salons du livre à travers le Québec. Grosse année si on considère que j'ai l'intention d'écrire un autre roman par-dessus le marché!

    Ma curiosité est titillée juste à lire le titre de ton prochain livre... Allez lucide et réaliste, sois donc participante! :-)

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  4. À Francine: quand on s'aventure dans l'auto-édition je peux comprendre que c'est une véritable PME, comme tu écris, mais quand on réussit à faire publier un manuscrit par un éditeur, quelque soit son envergure, j'aurais préféré qu'il prenne tout en charge. Visiblement, ce n'est plus le cas.
    Bonne chance dans ton entreprise Pour-Mieux-Être!

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  5. @ClaudeL : Hep, les subventions aux éditeurs et aux auteurs ont tellement été coupées que l'auteur qui ne fait qu'écrire, c'est de plus en plus rare.

    Cela dit, je ne me plains pas trop de la partie qui m'échoie.

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  6. "La partie qui m'échoie": du subjonctif d'un verbe défectif dans un commentaire de blogue! Qu'est ce que ce sera dans un roman?
    Pas de plainte non plus, ni nostalgie, juste comme une petite voix qui me dit que certains rêves s'envolent.
    D'autres se présentent, heureusement.

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  7. Moi aussi, je croyais qu'il suffisait d'écrire. Je pense que c'est le cas pour certains. Mais il faut aussi faire attention de ne pas publier avec n'importe qui, car là il y a un risque de se faire avoir et de se retrouver à faire tout le travail soi-même, d'être laissé carrément à soi-même... Il faut donc bien choisir son éditeur!

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  8. À Marie-Claude: tu as bien raison. Même bien conseillée, bien avertie, il reste qu'on est tellement contente quand un éditeur accepte enfin de publier notre roman, on ne se montre pas aussi difficile qu'un auteur aguerri qui peut se permettre de dicter ses exigences.
    J'aime bien que ce soit une collaboration, après tout c'est dans l'intérêt de tout le monde.

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  9. Je te suivais jusqu'à "subjonctif"... ;)

    M'en demande pas trop là... Pour moi, le français ça se joue à l'instinct! lol! J'suis pas encore sûre de la distinction entre essentiellement pronominaux et accidentellement pronominaux... ce qui fait rire tout le monde, parce que semblerait que je les accorde quand même comme il faut...

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  10. Ah, cette éternelle question de la "vente" du livre. Euh, la promotion tiens, c'est pas mal plus présentable comme moi. Ça fait moins consommation et dollars. Le fameux "après" fait couler plus d'encre que dans tous les livres réunis !!

    Ça dépend de la motivation à être lu. Et puis la maison d'édition a une grosse famille d'enfants écrivains à s'occuper. Pourquoi ne pas croire, plus que jamais, au fameux "jamais mieux servi que par soi-même". Mais appuyé, oui appuyé, c'est la moindre des choses qu'on attend des éditeurs.

    Bonne chance dans ton aventure.

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  11. "comme moi" ... hi hi, "comme mot" bien sûr !

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  12. À Gen: chanceuse d'accorder tes verbes peu importe ce qu'ils sont, c'est ma bête noire. Le fait de l'avoir enseigné aurait dû me l'apprendre, si un peu, mais je partais de trop loin. Surtout les verbes en "er".

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  13. À Venise: c'est rendu que peu importe le métier qu'on choisit, il faut d'abord être homme ou femme d'affaires et moins que ça encore, il faut être vendeur. Savoir vendre "sa salade". Qu'on soit agriculteur, étudiant à la recherche d'un emploi, musicien, journaliste, artiste peintre, éditeur, auteur, tout le monde. Évidemment pas tout le monde qui a la vente dans le sang. À moins que ça ait affaire avec la confiance en soi?

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  14. @ClaudeL : Non, rien à voir avec la confiance en soi, tout avec l'image. Les meilleurs vendeurs que je connaisse sont souvent des hyper anxieux, avec une estime d'eux-mêmes faible, mais qui se construisent un personnage.

    Moi j'ai pas deux cennes de talent pour la vente, mais je dois admettre que j'ai une bonne confiance en moi, alors ça compense un peu.

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  15. À Gen: L'image, je veux bien, mais encore faut-il qu'elle soit vue ou diffusée cette image. On ne connaît pas les mêmes personnes, celles qui s'imposent, non pas au public, mais aux médias, et au début, je pense que c'est le plus important, m'apparaissent souvent prétentieuses et agressives. Je préfère les sympathiques. J'espère n'être pas de la première catégorie et je ne suis pas certaine d'être de la deuxième.
    Bref, ça revient à ce que j'ai toujours pensé, parce que j'ai toujours préféré travailler dans l'ombre: à chacun ses talents, ses forces et que chacun fasse son travail.

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  16. ClaudeL: la motivation, c'est en soi qu'il faut la trouver. Pour ma part, si j'ai l'impression que c'est une obligation, je n'y arriverai pas. Il y a des creux aussi, mais j'y reviens constamment. On fait des choix: pas de télé, pas de radio, on se coupe du monde et on plonge. Et puis, nos personnages nous appelle aussi.
    On peut dire la même chose pour tous les arts. Le faire pour le plaisir, plus si affinités ;)

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  17. À idmuse: il faut croire qu'en moi, il y a eu un grand coup de vent. L'écriture de roman a foutu le camp, quelques branches encore de généalogie, le goût de voyager intact et pressant, en haut du château de cartes: la photo. J'ai les pieds solidement ancrés au sol, prête à d'autres vents qui ramèneront peut-être mes personnages qui jasent, seuls, dans un coin d'un fichier, toujours sur l'ordi.

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  18. Très beau billet . Sans être auteure, je suis tout de même capable de comprendre ce comment il peut être ardu et difficile le cheminemt d'un écrivain. Je ne peux que te souhaiter bonne chance dame Claudel.

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