samedi 8 mars 2014

Le jour où j'ai reçu un cahier bleu

(billet pour la page Facebook : Les descendants deFrançois Deguire dit Larose)

Comme il sied à un homme dans la soixantaine qui aime l’histoire, mon père s’est intéressé à son ancêtre, un soldat de Carignan, Jean Bricault dit Lamarche et à celui de son épouse, un soldat de Carignan aussi, François Deguire dit Larose. Ma quarantaine était alors encore bien loin et j’avais d’autres préoccupations que la généalogie, mais le respect filial me forçait à écouter les inlassables histoires au sujet de ces deux patronymes. Sans grande passion.
Jusqu’au jour où, en 2004, ma mère me remit un cahier bleu. Une sorte de livre imprimé et même illustré dans lequel ma grand-tante religieuse, Annie Deguire, a noté minutieusement des centaines de noms et de dates en plus d’écrire de longs textes sur ses grands-parents autant maternels que paternels.

Je l’ai pris des mains de ma mère vieillissante et, j’étais alors prête, j’ai plongé dans la généalogie familiale. Et je n’en suis jamais vraiment sortie.

Les recherches ont commencé, j’ai repris là où mon père avait laissé. Mon frère qui avait eu la patience d’entrer les centaines de noms et dates amassées au cours des années m’a généreusement offert sa base de données informaqtisée. Mon intérêt me mena bien au-delà de cette liste. De ma mère, Michelle Deguire, je sautai rapidement à sa grand-mère maternelle, une certaine Jenny Lynch, épouse de Philéas Deguire, de son vrai nom de baptême Margaret Jane. Il était écrit que ses parents, Bridget Bushell et Denis Lynch venaient d’Irlande. S’il ne fut pas difficile de trouver :

l’acte de mariage de Bridget et Denis, en 1855 à Montréal
les noms du frère et de la sœur de Bridget Bushell, leur mariage, leur descendance,
la vie de Jenny et de Philéas Deguire à Saint-Henri
la vie des parents de Philéas Deguire, à Saint-Laurent

  J’eus beau éplucher les listes des bateaux et les recensements, il fut beaucoup plus ardu et même impossible de trouver :
Sur quel bateau mes Irlandais étaient-ils arrivés?
En quelle année?
Avec qui? Ensemble? Avec leurs familles respectives?
Les parents, frères et sœurs de Denis Lynch

Ma grand-tante religieuse avait heureusement noté que l’une était originaire du comté de Roscommon et l’autre du comté de Leitrim. J’en conclus que c’était la grande famine (1846-1849) qui les avait contraints à choisir l’Amérique comme terre d’accueil. Je lus tout ce que je pouvais, en français, sur cette époque, la difficile traversée, le mildiou, le typhus, le passage obligé à Grosse-Île et l’arrivée pour les miens à Pointe-Saint-Charles.

Après un an de recherches sur de nombreux sites, des visites à la Société de généalogie de l’Outaouais, et des lectures instructives, faute d’obtenir toutes les informations, je décidai d’imaginer ce ma grand-tante Deguire n’avait pas écrit.

Ainsi est né le roman — publié en 2011, sept ans après que ma mère m’ait remis le cahier bleu —, Les têtes rousses.

mardi 4 mars 2014

Ne rien faire

Ne rien faire d’utile ou d’important.
Sans être en vacances ou plutôt l’être tout le temps. Il est de coutume d’appeler cela la retraite.
Juste guetter et, sil vient, écouter l’oiseau.
Juste lire un roman. Pas un essai où il faudrait réfléchir, juste un roman, une histoire, des émotions. Ressentir sans être en relation, sans conflit.
Juste aller nager ou pédaler ou faire de la raquette. Et parfois même pas.
Juste déguster un verre de vin.
Juste parler à une voisine. Ou se taire. Ne pas commencer de polémique, ne pas monter aux barricades.
Juste surveiller la prochaine vague ou le chien qui marche dans la rue.
Juste soupirer d’aise.
Juste regarder le ciel bleu ou la neige qui tombe en gros flocons ou la pluie qui tambourine. Et ne pas paniquer parce qu’on n’a pas à sortir.
Juste avoir l’esprit tranquille.
                Sans attente
                Sans inquiétudes
                Sans tension
                Sans appréhension
                Sans culpabilité
                Sans cœur brisé
Juste écrire un billet complètement inutile.

Ne vraiment rien faire? Je n'en suis pas capable. À moins d’être malade et attendre que le mieux revienne. Ce qui n'est pas le cas.
Était-ce permis chez vous de ne rien faire? Seulement le dimanche? Seulement en vacances?

(photo de l'auteure en train de rêvasser)