Je suis rentrée très rapidement pour ne pas laisser entrer le froid de janvier. Les deux personnes présentes jasaient comme si tout le monde se connaissait. Comme devant un bon café. Sans vraiment remarquer les détails, je vis tout de suite qu’il y avait de l’ordre. Ça ressemblait plus à une bibliothèque qu’à une librairie. Rien de commercial dans la disposition. Rien que des livres bien classés : ordre alphabétique, les québécois, les livres de poche, les biographies, les policiers. Une bouquinerie de livres d’occasion, comme ça fait longtemps que je n’en avais pas visitée.
Et on ne m’a pas demandé : « puis-je vous aider? » ce qui m’aurait fait partir presque aussitôt. Quand j’ai besoin d’aide, je le dis. À mon heure.
Je me suis promenée dans les « F ». Je cherchais Les piliers de la Terre de Ken Follett, mais je me doutais bien que la médiatisation du livre Un monde sans fin ferait que le livre de la suite était vendu depuis quelques mois.
J’étais si bien que j’en aurais enlevé mon chapeau et mon foulard.
Des habitués rentraient « Comme ça va ? Rien de nouveau? Ah! tu as pu avoir telle série? » Je me disais déjà que j’allais revenir jusqu’à ce que moi aussi je sois une habituée. Pourtant, je suis comme ces personnages anglais, j’aime bien aussi cette distance respectueuse qui ne permet pas trop de familiarités.
Et puis je me suis décidée : « Avez-vous La fille de l’Irlandais, j’ai oublié le nom de l’auteur ». Alors, le monsieur, sans doute le propriétaire, se tourne vers une jeune femme. Non, ça ne leur dit rien. L’auteur, personne ne s’en souvient. Comme moi, il se précipite aussitôt vers l’ordinateur et interroge Google. Réponse : Suzanne Fletcher. Recherche : non, il ne l’a pas. Commence alors le jeu de ce qui pourrait m’intéresser. Comme un jeu. Il me donne des noms, des titres. Je l’ai, je l’ai déjà lu, non, je n’aime pas tellement le genre. Il vient de lire celui-ci, Ah! oui et vous avez aimé. Trois fois j’ai pris Stupeur et tremblements de Amélie Nothomb à sa suggestion, l’ai feuilleté. Trois fois je l’ai remis sur la tablette. Je lui ai préféré Troyat et Jane Austen. La sœur de Judith de Liste Tremblay, dont je me souvenais avoir entendu du bien aussi.
Un bon vingt minutes de pur délice, de bien-être d’être là où on voudrait toujours être, où le monde nous est offert. Dix-huit dollars pour vingt minutes de plaisir. Sans compter celles à venir.
Ce qui me surprend, c'est qu'il n'y ait pas autant de bouquineries que de bilbiothèques. Que faites-vous de vos livres, une fois lus et relus, passés, perdus et retrouvés?
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