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mardi 30 juillet 2013

Au diable l'orgueil, j'avoue que je l'aime!

Je l’ai boudée, ô orgueil ! elle me frappe d’autant plus fort.

Il y a de ces rencontres qui n’ont jamais eu lieu et qui vous marquent pourtant.

Elle s’appelle Catherine Voyer-Léger. En 2010, je lisais son blogue Les Marées lumières. J’aimais bien. En août, j’allais passer quatre jours dans les Cantons de l’est, entendre les auteurs aux Correspondances d’Eastman. Et si possible, rencontrer trois blogueuses que je suivais sur Internet: Venise Landry du Passe-mot, Julie Richard-Gravel, dont j’avais lu et tellement aimé Entheos et Catherine Voyer-Léger qui m’intriguait par ses propos.

Venise Landry m’avait généreusement invitée à stationner mon véhicule récréatif chez elle. À côté de mon Pruneau (nom affectueusement donné à cette Van de couleur prune, loin d’être belle et à la mode, mais tellement utile), une petite auto noire. Une jeune femme en sort, rapidement, sûre de savoir où elle était et ce qu’elle était venue faire ici. Je savais que ce n’était pas Venise, mais je ne savais pas que c’était Catherine Voyer-Léger. Pas un mot.

Comment on se présente à des gens qu’on connaît virtuellement? Est-ce qu’on s’impose, qu’on s’avance? J’en ai voulu un peu à ma mère alors de m’avoir transmis ses gènes irlandais de retenue, de réserve, de discrétion, j’en voulais aussi à mon père de ne pas m’avoir transmis son bagou, quand je suis devant une ou deux personnes seulement.

Et l’orgueil s’en est mêlé. Qui suis-je moi pour qu’on m’adresse la parole? qu’on s’intéresse à moi? Je suis demeurée dans l’ombre, admirative devant tous ces auteurs et blogueuses. Croyais-je naïvement que c’était écrit dans mon front : « moi, je vous connais, je vous admire, je veux que vous veniez me parler ? » Aurais-je voulu qu’elles me reconnaissent une des leurs? À défaut d’être reconnue auteure, être au moins blogueuse ? 

Même si Venise n’avait pas beaucoup de temps, toute prise à couvrir, en photos et en entrevues, chaque rencontre d’auteur, j’ai quand même pu lui dire quelques mots. À Julie Richard-Gravel aussi, j’ai réussi à parler. Mais à Catherine Voyer-Léger, non. Il faut dire que je suis très primaire et très auditive dans mes sentiments : rien qu’au ton de ta voix, je sais tout de suite si je vais t’aimer ou non, si j’ai envie d’entrer en relation avec toi ou non. Pour les écrits, même chose : c’est le style de l’auteur qui me permet ou non de poursuivre la lecture de son livre.

En entendant Catherine Voyer-Léger poser ses questions aux auteurs présents aux Correspondances, à son ton de journaliste-ce-n’est-pas-parce-qu’on-est-l’été-qu’il-faut-être-léger (sans jeu de mots), du coup, je ne l’aimais pas et je l’ai boudée. Jusqu’à hier. Il était temps que j’en revienne. La curiosité (qui me sauve si souvent de cet orgueil complètement inutile) et la chance m’ont menée à emprunter son livre : Détails et dédales paru dans la même collection, Hamac, que l’Entheos de Julie Gravel Richard. Encore Septentrion à qui j’en veux aussi d’avoir refusé mes Têtes rousses. Décidément, je suis rancunière.

Devant un feu de fin d’après-midi qui me rappelle de si belles journées passées dans le sud en mars de je ne sais plus quelle année, un petit verre de rouge en guise d’apéritif, j’ai ouvert le fichier e-pub, et ce fut la claque. Le grand coup de poing. Le grand coup de cœur. J’aime son écriture, ses propos, ses sujets, son impudeur. « Il est toujours troublant de se reconnaître chez les autres » (page 181). Je lis avidement, je fouille dans la table des matières ce qui me rejoint le plus. J’essaie de ne plus rien lui envier, admirer seulement. Être contente qu’une écrivaine admette qu’il n’y a pas que le roman pour aimer écrire et espérer être publiée. Être intellectuelle, aimer les librairies de tous les coins de rue, en France. Et… et… et… Chaque billet me rentre dans le ventre, alors que pourtant elle veut plutôt frapper l’esprit.

Ce matin, devant un café cette fois, plus tête froide que cœur enthousiaste le matin (comprendre tempérament plutôt vespéral dans mon cas qui se traduit par une émotivité en hausse à mesure que la journée avance), j’ai lu les billets qui me rejoignaient moins. Non que j’ai déchanté, mais disons que le piédestal était moins haut, le regard plus circonspect. Et puis à force de lire que tout est complexe et ne se résume pas à une étoile à apposer, ni non plus à juger la personne, mais bien le produit, disons que je l’admire toujours, mais je ne me mesurerais pas à elle dans une discussion : elle a une force redoutable pour l’argumentation. Comme à certains Français, je laisserais le dernier mot avant de me perdre dans les méandres d’une discussion qui semble n’être qu’un exercice facile pour eux, mais bien trop intellectuel et émotif pour moi.

Cette année, elle sera du côté des invités, aux Correspondances d’Eastman.

Avec ce qu’elle écrit et comment elle écrit, je ne peux faire autrement et l’admettre : au diable l’orgueil, je l’aime.

Programme au Correspondances 2013>>>
Venise aux Lettres rebelles>>>
(illustration empruntée au site de Septentrion>>>)