mercredi 28 mai 2025

« Tesselle dans une grande mosaïque »


Au surlendemain de la clôture des célébrations du 350e anniversaire de la seigneurie de la Petite-Nation, tout est encore pêle-mêle pour moi.
Je croyais que l’événement était à 13h30, comme celui de Montpellier.
C’était à 11 heures
je suis arrivée à 12h30
tout était fini
presque.

J’ai eu le temps de voir l’emplacement de la capsule
j’ai surtout eu le bonheur d’avoir LE livre, Au fil de l’histoire.

Depuis, cul par-dessus tête, tourbillon et fouillis 
tous les mots se bousculent parce que je ressens tout à la fois :
reconnaissance, joie, orgueil sûrement.
Je veux dire merci, mais je trouve que ce n’est pas suffisant.
Je voudrais non pas dire, mais montrer
et pour ça je fais appel à l'autre moi, elle qui a la parole facile mais nerveuse

Elle s’avancerait vers ceux et celles par qui c’est arrivé, Marthe Lemery entre autres
Soit elle se mettrait à parler fébrilement
les yeux fuyants
les mains fouettant l’air
ou juste un grand sourire
ou même un trépignement comme une enfant qui vient de recevoir son bonbon préféré
son favori : sous forme de mots.

Soit elle oserait à peine les regarder
le ventre crispé
la gorge nouée  
de peur d’être devinée
de toute façon, ce serait trop
ce serait beaucoup
ce serait intense.
Alors qu’elle voudrait être comprise à mi-mots
peut-être un câlin qui dirait tous les mercis accumulés.
Elle a peur d’exagérer
de paraître orgueilleuse, prétentieuse
de ne pas mériter cette visibilité 
comme un compliment
de devoir expliquer pourquoi elle est si émotive
incorrigible sentimentale
compliments qui lui font plaisir pourtant.

Alors elle ne fait rien
elle attend
que le tourbillon cesse de tourner
elle se calme le pompon
pour y voir clair
pour trouver le ton juste
trouver les mots
dire qu’elle a depuis longtemps voulu laisser une trace
sans trop en connaître les raisons profondes
et voici qu’elle est dans un livre qui sera (qui est depuis le 27 mai) enfoui dans une capsule intemporelle
qui sera peut-être ouverte dans 10 ans.
Plus trace que ça...

Dans un livre!
Elle les aime tant
les livres, les mots, les phrases qui disent la vie, l'histoire dans ce cas-ci
qui apprennent la vie
elle les aime depuis toujours
elle a appris à se comprendre dans les livres, dans les mots
les siens, ceux des autres
elle cherche encore d’ailleurs
alors si ces personnes-auteures parlent de la Petite-Nation dans un livre,
si, en plus, elles parlent d’elle dans un livre
elle devient le cœur tout mou,
la parole hésitante
les yeux fuyants
vulnérable
elle se sent reconnue, comprise, aimée
c’est à son être profond, au meilleur d’elle-même, qu’elles s’adressent.

Mais peut-être n’est-ce qu’illusion
juste un hasard
elle se dit que c’est encore une émotion d’hypersensible
elle relativise
chacun·e son chemin, sa vie
elles ont croisé le sien
faut pas en faire tout un plat
pas minimiser non plus

Je veux dire la reconnaissance
mais je ne sais comment bien la mesurer ni l’exprimer.
Je veux dire aussi félicitations pour tout ce travail de recherche
bravo pour les textes
merci pour toute la visibilité pour ces « tesselles [d’une] grande mosaïque commencée il y a 350 ans avec la création de la seigneurie de la Petite-Nation. »

Dans ce livre, tu es « tesselle d’une grande mosaïque »
accepte et remercie
cesse de tout compliquer
retourne aux autres livres à lire
aux autres billets de blogue à écrire
et dis au monde que le livre Au fil de l’histoire est dans les bibliothèques de la région
et qu’on peut encore lire les 24 capsules sur le site Internet de la MRC Papineau.

Lien vers les capsules publiées sur Internet >>>
Reportage à TVA Gatineau sur cette capsule intemporelle à Montebello >>>



dimanche 25 mai 2025

Je ne suis pas née ici, mais je vais mourir ici


Il ne faisait pas chaud, mais il ne pleuvait pas.
Alors la cinquantaine de personnes réunies à Montpellier ont pu effectuer le parcours prévu par le Comité consultatif sur la culture et le patrimoine de la municipalité.

Un événement très bien organisé. Les musiciens Max et Frak nous guidaient de place en place. Le conseiller Guy Martel a terminé l'événement en beauté en chantant une de ses compositions.
Le comité, composé de Nicole Touchette, Richard Strasbourg, Nicolas L’Écuyer-Pilon et Lise Castonguay (absente sur les photos) a travaillé fort et depuis longtemps pour ce dévoilement de «plaques commémoratives valorisant la contribution de personnages historiques au sein de la communauté.»

Le parc municipal devient le Parc Joseph-Omer-Montpellier
La bibliothèque rend hommage à Maria Brault (dans les années 1940-1950, on la connaissait mieux sous le nom de Mme Gédéon Legault)
La place Joseph-Robineau
Et finalement le Centre communautaire Félicien-Bricault
Il fut question aussi du Jardin des souvenirs.

Les membres du comité nous apprenaient l’histoire de chacun·e et les visiteurs étaient invités à raconter quelques anecdotes au sujet de chacun. Les frères Montreuil ne se sont pas laissé prier, ils avaient des souvenirs à revendre. Des histoires de « snow », de chapelet autour du chat de leur grand-mère, d’hosties mangées que le curé Bricault allait chercher à Hull. « Ah les petits pendards! »

Quant à moi, ma petite contribution ne concernait que le curé Bricault.
Parce que je l’ai connu.
Autant à Montpellier qu’à Notre-Dame-de-la-Paix.
Parce que j’ai vécu une bonne dizaine d’été dans la Baie-de-l’Ours jusqu’à ce que mes parents décident d’y bâtir maison. J’y suis restée un an et demi avant de déménager à Notre-Dame-de-la-Paix où je vis depuis plus de 50 ans.

J’ai sans doute appris à quelques personnes présentes que l’ancêtre des Bricault, un soldat de Carignan, s’appelait Jean Bricault... dit Lamarche.
Eh oui, nous avons le même ancêtre! Bon, nos ancêtres communs remontent à huit générations dans les années 1770, mais tout de même. J’étais toute petite quand mon père nous le répétait chaque été : le curé Bricault est parent avec nous!
Et j’ai découvert encore mieux, sa mère était un Major et il se trouve que mon frère a épousé une Major de Saint-André-Avellin, alors nous sommes parents de ce côté-là aussi.

Je me souviens tout particulièrement d’une kermesse qu’il avait organisée, sans doute pour ramasser des fonds pour un de ses projets. Il y avait autant de jeux pour les enfants que d’activités pour les adultes.
Mon dernier souvenir de lui, c’est à Notre-Dame-de-la-Paix. En effet, quand j’y suis arrivé en 1972 j’ai su qu’il y habitait, je passais devant sa maison souvent. Je n’allais plus à la messe depuis longtemps, mais à la messe de minuit, je retrouvais mes messes d’enfant. Les sermons du curé Bricault n’étaient jamais longs ni ennuyeux.
Un été, j’étais en simple maillot de bain et je prenais ma douche, je me lavais la tête... dans la rue. Eh! oui, sous les jets d’eau puissants d’un arrosoir de pommes de terre. Qui passe en auto dans la rue? Qui ralentit? Le curé Bricault. Croyez-vous qu’il s’est indigné de nous voir en maillot de bain dans la rue? Pas du tout, il a trouvé que c’était une bonne idée. Avec un grand sourire, il a continué sa route.

Voilà, alors je n’oublierai jamais ni le curé Bricault, ni Montpellier. Qui oublie les étés de son enfance, de sa jeunesse?
Tout ce qui concerne l’histoire et le patrimoine de la Petite-Nation m’intéresse.
Je ne suis pas née ici, mais je vais mourir ici!

vendredi 16 mai 2025

Voyages d'encre





« À mi-chemin entre ici et là-bas, une journaliste, voyageuse et amoureuse des mots se questionne. [...] Oscillant entre l’essai poétique, le récit intimiste et le récit de voyage, l’autrice explore avec une plume sensible cet appel de l’ailleurs où l’on ne cesse de se découvrir, se nourrir et se confronter ainsi que cette nécessité d’un ici pour renaître autrement à soi. »
Site Internet des Éditons Somme Toute

Pour moi, le nom de Marie-Ève Blanchard n’évoquait rien.
Son nom pourtant sur bien des guides Ulysse.
Un guide Ulysse peut donner le goût de voyager
Sans même connaître le nom de l'auteur-e
Le nom du pays écrit en gros
Le plus important
Le plus attirant.

Mais pour les mots ailleurs, ancrage, voyage, bruissement du monde
Récit de voyage et récit intimiste
Les mots lire et écrire aussi
J’ai voulu savoir le nom de l'auteure
Marie-Ève Blanchard
Tout savoir du livre et d’elle ensuite
Découverte de son blogue
https://mawoui.com/
Depuis 2011
Lu plusieurs billets
Retour à son livre : Les bruissements du monde
Maison d’édition : Somme toute (Hamac maintenant rattaché à Somme Toute)
Directrice : Anne Peyrouse
Qui a écrit : Anne Hébert, si tu veillais ma tristesse

Comme un terrain familier
un style dans lequel je me reconnais, je m'identifie
Je zieute depuis tellement longtemps : tout autant la maison d’édition que la directrice
Leur montrer mon livre qui parle de voyages, d’ici et d’ailleurs, de chemins d'écriture
De déceptions aussi.
Impression d’être parmi elles
Les regarder par la fenêtre
Et je voudrais qu’elles me voient.

Pour l’instant, seulement un miroir de film policier
Je ne veux pas leur parler, trop nerveuse j’en bégaierais
Comme Marie-Sissi Labrèche quand elle a parlé de son livre Un roman au four

Je préfère leur écrire
Oser  
Plus que merci, plus que bravo
Ni avis ni critique
Simplement une impression de lire mes propres phrases.
Je rêve d’être lue comme je les lis
Plus que dans un blogue
Dans un livre
pérenne
Qu’elles voyagent dans mes mots comme j’ai voyagé dans les leurs.
Conversation par l’intermédiaire des livres
Complémentaires
Côte à côte
D’égal à égal ou non

Leur écrire: vos livres me font écrire
Et c est encore mieux que les livres qui font voyager.
Un voyage dans les mots
Dans le moi
Dans le vous
Et les elles
Dans les mots d’encre.


vendredi 9 mai 2025

La Petite-Nation, encore nommée

Encore une fois, entendre, voir « Petite-Nation ». 
Chaque fois, grand sourire et cœur qui bat un peu plus vite.
Tourisme Petite Nation (en fait, la MRC Papineau- note 1) est finaliste pour le prix Plumes d’excellence de l’Association des communicateurs municipaux du Québec, dans la catégorie « Campagne événementielle » pour l’événement 350e anniversaire de la Seigneurie de la Petite-Nation.(note 2)

Fière et reconnaissante de voir que d’autres que moi l’aiment aussi, la célèbrent, la promeuvent, la chantent, l’écrivent.
Ma Petite-Nation, mon « ici » choisi.

Petite-Nation
Le nom de la rivière qui serpente entre Duhamel et Plaisance
Le nom de la Seigneurie il y a 350 ans
Le premier nom suggéré pour la MRC en 1981 (je l’ai lu dans des procès-verbaux)
Une partie du nom du comté fédéral
Ni hameau ni secteur
Des raisons sociales  
Bien plus qu’une région touristique
Une région de cœur

Je rêve du jour où la MRC changera de nom
Je rêve même d’un gentilé
Gens de la Petite-Nation, nommons-nous
Créons notre gentilé
Petite-Nationien  Petite-Nationienne
Petite-Nationais 
  Petite-Nationaise
Weskarinien – Weskarinienne

« À défaut d’un gentilé spécifique, on a recours à des périphrases du type les habitants de..., les gens de..., la population de..., les citoyens de..., les résidents de..., etc. À l’inverse, dès qu’une poussée démographique sensible se fait sentir dans un noyau habité, les résidents éprouvent le besoin de se nommer, de consacrer dans une dénomination particulière le sentiment d’appartenir à une communauté distincte, dotée d’une personnalité originale. » (note 3)

Les critères :
la clarté, ça va.
la brièveté, ça peut aller
l’absence de marque péjorative, ça va aussi.
il reste la consonance harmonieuse : “par sa fonction même de mot nouveau, il est important que le gentilé présente une succession de sons sinon gracieux du moins non cacophoniques; toute forme désagréable ou curieuse à l’oreille pourrait se voir rejetée naturellement”.


En attendant, au moins continuer, encore et encore à nommer cette région chère a mon cœur.
D’où viens-tu?
De la Petite-Nation
Préciser ensuite, si besoin est : en Outaouais, autour de Montebello, à une heure de Gatineau, entre Lachute et Gatineau.
Mais toujours en premier : la Petite-Nation.

dimanche 13 avril 2025

Amoureuse

« Si je me réveille la nuit, je sais que je peux replonger dans la lecture et que le sommeil va me cueillir à nouveau, embarquée loin dans l’écriture d’autres que moi et parfois ramenée si près de moi que j’en suis bouleversée, comme si le livre n’était que pour moi. Je ne sais pas comment font les auteurs pour arriver à ça mais c’est magnifique. »
Jeanne Benameur, Pas assez pour faire une femme

« cet espace vide
est celui où j’aventure aussi mon pas

c’est là que la pensée m’attend
chaque jour
et chaque jour je tente de rassembler l’épars

j’y mets du temps
et du silence
ma solitude fertile

c’est ainsi que je désire ma vie »

Jeanne Benameur, Les pas d’isis



Je les veux tous, je veux tous les lire.
Le premier : L’enfant qui
C’est Laurence qui me l’a conseillé. Sachant probablement que j’aimais les livres écrits au « tu ».
Comme on présente un possible fiancé.
Je suis devenue amoureuse dès les premières pages.
Il y a des jours et des nuits (de pleine lune, toute rose soit-elle) où je ne pense qu’à eux.
Je vois les couvertures, le format.
J’ai hâte de toucher le papier.

Je me lève, je cherche dans ma bibliothèque, il me semble que je l’avais celui-là : La patience des traces.
Chez Prêt numérique ou chez l’éditeur, je lis les extraits.
À la BAnQ ou chez Biblio Outaouais, j’emprunte tout ceux que je peux, qu’il me reste à lire.
Et relire encore ceux que j’ai aimés.
Tous.
Quand j’aime, ce n’est pas à moitié.

Je me cherche dedans
Je m'y trouve souvent
Parfois, ça m’étreint la poitrine
L’esprit engorgé des mots qui poussent vers la main
Pour écrire à mon tour
Comme elle, laisser venir les mots
Pour raconter un personnage qui s’impose, qui se promène dans ma tête depuis des mois, des années
Une émotion qui point
Des images qui reviennent
Du temps où je n’avais pas le temps

Aujourd’hui, il me faudrait y mettre le temps
Chercher le silence
Et fertiliser ma solitude.

lundi 13 janvier 2025

2025, l'année où un éditeur publiera mon prochain livre


Je n’ai rien publié sur ce blogue depuis un gros mois. On a même eu le temps de changer d’année. J’ai eu le temps de
fêter en famille
chercher des illustrations de « funny old ladies » pour envoyer des vœux originaux
donner et recevoir des cadeaux (des livres bien sûr)
être engluée dans des embouteillages à plus finir sur la 15, la 40
célébrer la nouvelle année et les 64 ans d'une amie 
traîner une grippe un bon huit jours (merci Lyse)
changer mon profil de Facebook (merci Guylaine) et de n’en pas revenir des 80 et plus « clics »

Pas vraiment eu le temps ni le goût d’écrire.

Mais j’ai lu. J’ai lu pour me redonner le goût de travailler le manuscrit en cours. Mais la belle affaire, ce que je lis me scie, me gèle, me paralyse les doigts sur le clavier!
Exemple : Genèse d’une révolution sans mort ni sacrifice. Bon, disons que ce n’est pas le titre qui m’a attirée. C’est le nom de l’auteur : Steve Gagnon. Écriture théâtrale que j’adore.
Scénarios catastrophiques d’Alexie Morin, dont j’avais aimé Ouvrir son cœur.
Aussi : Entre l’île et la tortue de Karine Rosso que je ne connaissais pas.

Tous des textes comme j’aime lire ces années-ci : fragments ou prose poétique, qu’importe le nom que les éditeurs donnent à ce genre plus ou moins nouveau de petits textes courts.

Ça devrait m’encourager de voir que des éditeurs publient ce genre de texte. Oui, je prends des notes, je sais à qui envoyer mon prochain manuscrit pour qu’il réponde à la fichue politique éditoriale.
Reste à le travailler pour me faufiler dans l’embouteillage de l’autoroute de l’édition québécoise.

C’est le vœu que je me souhaite pour l’année 2025.
L'écrire dans le titre, c'est comme attirer la chose, non?

(Si vous commentez ici, n'oubliez pas une petite signature ou initiales.)



samedi 7 décembre 2024

Comme un miroir



«Nous avons enfin pris connaissance de la vraie nature de l’existence humaine : la parole sans emballage fonctionnel, dans sa pluralité et sa liberté. De formes, de genres, de ponctuations, de syntaxes, d’adverbes et de brides délacées.
Rien ne sera catégorisé. Tout sera diffusé. [...] Nos jours deviendront fragments d’écriture.»
Anne Hébert, si tu veillais ma tristesse, Anne Peyrouse
«Écrire, c’est l’inassouvi à quoi nous redonnons place.
Nous ne serons jamais rassasiés d’écriture. L’écriture n’est pas là pour ça. Elle ne comble pas. Elle cerne l’inassouvi. Elle le désigne sans plainte ni peur.
Écrire c’est savoir qu’on est un être fini, limité, et porteur pourtant de quelque chose d’immense.
C’est accepter de s’installer dans ce hiatus et y trouver son propre souffle.
Cela met en branle tout l’être.»
Vers l’écriture, Jeanne Benameur


Ça y est, c’est revenu. (voir note 1)
Ça finit toujours par revenir.
Lire et, après quelques lignes, quelques pages, vouloir écrire. Écrire comme. Écrire sur le même sujet : les livres, l’écriture, les écrivains. Soi. Moi.
Sauf que je n’ai pas d’histoire en route. Je ne suis pas une conteuse d’histoire, pas de personnage qui s’impose. Que moi. Ma vie. Les bientôt 75 ans de ma vie.

Il a suffi que je lise quelques lignes de Jeanne Benameur et d'Anne Peyrouse, et c’est parti tout seul.
Écrire. Sans forme précise, juste comme les pensées surgissent.
«Rien ne sera catégorisé. Nos jours deviendront fragments d’écriture.»
Relire, oui; retravailler, réécrire, oui pour que de méandre tortueux, torrent ou ravin, l’ensemble coule jusque dans le cœur des lecteurs (et oui, oui, des lectrices).

Mais encore faut-il écrire sur... Sur mes lectures? Mes voyages? Ma région? Je le fais déjà sur mon blogue, sur mon site.
Prendre le risque d'écrire sur les gens autour de moi, les gens à l’intérieur de moi. Transformés, déformés. Forcément. Plutôt les morts que les vivants pour ne blesser personne.
Dominique Fortier écrit sur Emily Dickinson ou Herman Melville.
Julia Kirninon sur Gertrude Stein.
Martine Delvaux sur Hollis Jeffcoat, Joan Mitchell et Jean Paul Riopelle.
Anne Peyrouse sur Anne Hébert. Sa mère littéraire. J'aurais plutôt des soeurs littéraires. En quittant le miroir, en regardant par les fenêtres, je trouverais bien. Je les nommerai.
De tous, Anne Hébert remporte. Souvenir de ma Belles-lettres, du huit clos dans les Chambres de bois, de Kamouraska, des fous de Bassan. Des lieux aussi, de la France, du Québec.

Pourquoi veux-je plus? Encore. Parce que ledit blogue va disparaitre avec moi?
Ce n’est pas de littérature dont j’ai besoin, mais de psychanalyse? Pour comprendre une bonne fois pour toute pourquoi je veux tant un "vrai" éditeur, et lâcher prise ou aller voir ailleurs si j’y suis. Dans le sentier de raquettes ou de vélo. Sur la plage. Ou une librairie!
Je me dis que c’est trop tard. Je me dis tant pis.

Finalement toute ma vie, j’aurai eu besoin d’une obligation. Un devoir. Qu’on me dise quoi faire.
Alors si personne ne m’appelle, ne m’oblige, ne me veut... Je ne fais d’efforts que si on me signifie clairement, contrat en main, que oui, on veut les publier tous mes fragments inclassables. Sinon, je frustre, je procrastine, je me dis à quoi bon. Je continue pour moi seule.

Et, finalement, sereine, je me réjouis de me voir dans le miroir d’une Jeanne Benameur, d’une Anne Peyrouse. Le temps de quelques pages.

Note 1:
En 2018, c'était là aussi: Je deviens elles >>>

Mise à jour/ajout:
Si j'avais une mère littéraire, ce serait Louky Bersianik. J'avais 26 ans lors de la publication de L'Euguélionne. J'ai pris deux années de sabbatique et j'ai écrit. Elle, devant.
J'en parlerai jusqu'à la fin de ma vie.  Une fois, en 2017 >>>

dimanche 24 novembre 2024

Coup de coeur de 2024



Décembre bientôt. Suivra 2025.
Il y a un an, après la parution du très beau livre (montage graphique de Jean-Luc Denat) sur le moulin disparu de Papineauville, je rêvais d’un livre sur l’histoire de la Petite-Nation. Et voilà que début 2024...

Qu’est-ce qui est en tête de ma liste d’événements à retenir en 2024, mon gros coup de cœur, ce dont j’ai eu envie de vous parler chaque mois et surtout entre mai et octobre, ce que je retiendrai, ce qui me rend fière, ce qui me touche vraiment pour:
— le graphisme
— l’ampleur du projet
— la réussite du projet
— et surtout parce qu’il est question de ma chère Petite-Nation

Réponse :
Le 350e anniversaire de la Seigneurie de la Petite-Nation

Dès la première annonce, j'ai aimé le graphisme :
Dans le cas du 350e, je ne connais pas qui a créé le matériel promotionnel, l’image de marque, mais chapeau! Les couleurs, les formes, les fontes, le logo, j’aime tout. Et pour avoir travaillé dans le domaine, je sais qu’un visuel fort crée une émotion et invite à poursuivre plus loin. Ce fut mon cas, dès le début, j’ai dit Wow! Et j’ai surveillé chaque annonce dans les réseaux sociaux, dans le site de la MRC, sur les véhicules, sur les oriflammes.  Je n'ai pas assisté à tous les événements, à deux ou trois seulement. En revanche, j'ai lu chaque capsule.

J’aime la présentation Web, l’implication de la MRC :
Les vidéos réalisées par Agnès Créations sur les 25 municipalités de la MRC Papineau ont permis «d’offrir un bref aperçu des traces du passé, un regard rapide sur le présent et un clin d’œil vers l’avenir.»
Martine Caron et Jessy Laflamme de la MRC Papineau ont assuré la publication sur le site de Tourisme Petite Nation (lien>>>).

Et enfin, et surtout, j’aime notre Histoire :
Marie-Josée Bourgeois et Marthe Lemery ont créé un recueil de citations pour les 25 municipalités, et de plus, elles ont rédigé 24 capsules historiques. Tous ces textes permettent d’aller bien au-delà de la Seigneurie, de parler bien plus que des Papineau et Bourassa, et c’est à travers des personnes, plus que des dates ou des lieux que l’on découvre un peu de notre passé et même de notre présent. Plus que découvrir, apprendre. Les auteures disent « capsules », je dis véritable chronique fouillée, digne d’un texte dans une encyclopédie. Bravo et merci pour cet immense cadeau.
Les titres des 24 capsules :
1. Notre seigneurie, à ses débuts!
2. Notre seigneurie, à l’ère des Papineau
3. Seigneur, mon régime!
4. Les Papineau et les Bourassa Fils de soldats, cultivateurs et hommes politiques
5. Weskarinis, un peuple d’ici!
6. Dans tous nos cantons, y a des… colons!
7. Nos « augustes veilleuses » de rangs…
8. L’orme, l’arbre favori de Papineau
9. Louons maintenant nos grandes femmes!
10. Les pistes de portage, ces premiers chemins de terre
11. Il y a 100 ans Victor Nymark arrivait au Québec
12. Fille de fermière et femme de carrière
13. Arthème, Nelphas, Léon et Hyacinthe, nos divins gosseux!
14. Il y a 350 ans arrivait le premier touriste français!
15. J’ai vu la Rouge, la Blanche et la Lièvre
16. J’ai les couleurs d’une rivière (partie 2)
17. De (drôles de) choses et d’autres…
18. Un des plus vieux métiers du Nouveau Monde
19. La traversée de deux mondes entre Montréal et Duhamel
20. Des auteurs qui nous disent au monde
21. Papa ours et la petite histoire
22. Nos glorieux à nous
23. Sur les traces de Talbot Papineau, héros de Passchendaele
24. Augustine Bourassa, une artiste restée dans l’ombre (à venir)

Comme je suis de la génération livre plus qu’Internet, je souhaite évidemment que le tout soit réuni dans un livre. Ce serait un beau cadeau de Noël... 2025!

samedi 23 novembre 2024

Encore

Encore une fois.
Une quatrième fois.
Le lundi, encore la circulation, les ralentissements sur les autoroutes: la 50, la 15, la 40. Ne pas paniquer pour les 15 minutes de retard.

À la clinique Angus : l’attente.
Ah! l’attente.
Attendre, regarder l’heure, écouter. 
Attendre d’entendre son nom.
Pour entrer dans la grande salle.
Pour être installée dans le cubicule 13 ou 14, celui des greffé.e.s de la cornée.
Pour être accueillie dans la salle d’opération, ensuite dans la salle de réveil.
Pour moi : retourner dans la salle d’attente, attendre, regarder l’heure pour avoir le droit de revenir après l’opération.
Attendre la venue du médecin, celle de l’infirmière. Attendre l’heure du départ. Encore 4 heures.
Rester calmes. Respirer. Espérer.

Seule. Savoir l’autre seule. Avoir mal de savoir que l’autre a mal.
Attendre la prochaine étape.
Être toute présente dans l’attente. Et seulement là.
Dans chaque après, on est encore en attente.
En fait, peut-être que ce que j’appelle l’attente n’est pas autre chose que vivre. Vivre le moment présent. Sans y prendre plaisir. Juste rester calme. Ne pas laisser venir les pensées négatives. Ne pas laisser venir le chaos, la peur. Pas vraiment subir mais observer la pluie en attendant le soleil. Se voir marcher sur une plage, entendre les vagues douces de la mer. Que la respiration redevienne et reste normale.
Ne pas tout chiffrer. Combien sur 10 le mal? Combien sur 10 c’est difficile? Combien sur 10 la hâte d’être après.

Finalement, partir, rouler lentement dans le noir des rues, guetter les feux rouges, les verts, surveiller les cyclistes, les piétons, jeter un coup d'oeil sur le GPS.
À l’hôtel, payer, demander un fauteuil roulant, monter au 6e. Retourner stationner le CRV-Honda-recherché-par-les-voleurs au sous-sol, plus à l’abri.
S’installer, donner des nouvelles, répondre au téléphone, parler tout bas, regarder la télé sans rien retenir. S’endormir tôt.

La nuit, étouffer un peu parce que les fenêtres ne s’ouvrent pas. Avoir chaud. Avoir peur. Réciter des Je vous salue Marie comme mantra. Expirer longuement. S’endormir sans s’en apercevoir.

Le matin, se préparer, aller déjeuner, y prendre plaisir. Se sentir presqu’en vacances, en voyage. Bavarder avec les serveuses. Jaser de Montréal, d’Habitat 67 en face, de notre ancienne vie sur l’île de Montréal.

Attendre que le temps passe, jeter un coup d’œil sur la tablette, jeter un coup d’œil sur nos montres, toutes les demi-heures.

Pour le suivi, à l’hôpital maintenant, comprendre la nouvelle façon de payer le stationnement. À l’intérieur, se mettre en file, donner son nom, attendre dans la grande salle, voir tous ces malades, réaliser, accepter que nous sommes comme eux, malade, tout en espérant redevenir comme avant, comme quand le mois de novembre voulait dire le sud, voulait dire belle retraite, beaux projets.
Écouter les noms et les numéros de la salle. Se forcer à être dans le ici et maintenant.

Voir la technicienne, lire au moins cinq lignes sur le tableau de Snellen. S’en réjouir. Penser que la dernière fois aussi... avant le rejet!

Retourner dans la salle... d’attente. Entendre difficilement son nom, salle 32. Revoir l’ophtalmologiste de la veille, celui qui parle en français. Cinq minutes. « Tout est beau, revenez jeudi ».

Reprendre la 40, la 15, la 50, le trafic, le ralentissement, la longue ligne rouge sur Google maps. Être patiente, combattre la fatigue.
Manger une frite à Lachute. Arriver à la maison. Chercher la chatte. Lui demander si elle va bien. Ne pas se pencher pour la flatter.
Écouter la télé, plus ou moins. À 21 heures se coucher, les gouttes, attendre cinq minutes entre chacune, la coquille.

Le jeudi, recommencer. Deux heures pour aller, trois pour revenir. Attendre, voir, écouter. Quinze minutes : « la greffe est belle, revenez dans deux semaines. »

Dans la nuit, rêver à un glissement de terrain. Devant, le chaos? Tout s’effondre?
Le lendemain, écrire non pour me souvenir, mais pour réunir mes moi, me retrouver, passer par-dessus l’avalanche d’images, le déferlement de pensées. Essayer de réunir mes moi dispersés. Le moi proche aidante, le moi conductrice dans une ville, le moi qui attend. 
En sommes-nous là? Les mot vieilles et malades s’annoncent, s’incrustent. Ne pas les laisser prendre racine.

Écrire ces trois jours, chaque mot pensé, chaque minute vécue. Comme chaque battement de cœur, chaque inspiration. Et expirer, évacuer, mettre de l’ordre dans nos vies. Se retrouver.
« Or, quand j’écris, quand je suis dans le texte, je trouve encore une forme d’apaisement, une impression de mettre de l’ordre dans le chaos du monde. » 
J.P. Chabot dans Le Devoir, 16 novembre 2024.
Au sujet du livre Voyage à la villa du jardin secret.



jeudi 14 novembre 2024

Mon cadeau de Noël

J’avais écrit un billet de 500 mots où, un peu frustrée, un peu revancharde, je radotais.
Je ne le publierai donc pas.

J’étais déçue que Hamac et Lévesque éditeur ne publie plus de carnets (ce qu'une source sérieuse m'a dit en tout cas), mon style d’écriture préféré ces années-ci. Autant pour lire que pour écrire. 

Je me contenterai de citer Christian Bobin :
« Ce n'est pas pour devenir écrivain qu'on écrit. C'est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour. »
Probablement mon cadeau de Noël.


lundi 21 octobre 2024

Ces photos que l'on garde longtemps,
que l'on regarde si peu

Jour tout de ciel bleu, de feuilles tombantes et de doux temps.
Jour de ressac « roman dense et touffu, à l’écriture serrée et aux phrases longues qui s’étalent parfois sur deux pages » est-il écrit dans La Presse . Qui me rappelle ces fécondes années où je notais dans un cahier les belles phrases ou expressions. C’est certain que, admirative, j’aurais noté :
« son iris gauche opacifié d’un glaucome »
« pluie fine hachurait la ville »,
« le vent forçait, le crachin fouettait les vitres »

Des phrases que j’aurais consultées, des mots que j’aurais empruntés et glissés dans un des romans en devenir. C’était en quelle année déjà? Qu’ai-je donc fait de ces cahiers? Où sont-ils donc? Les ai-je jetés?

Demain jour de bac bleu ou de bac vert?
Jeter, donner, classer. Que faire de tous ces cahiers, de tous ces albums photo, des CD qui ne servent plus, qu’on ne peut plus lire ou écouter de toute façon? Tout est rendu USB.
On nous intime de vivre au présent.


Pourtant, hier encore, jour de souvenirs en photos trouvées au fond des armoires : toutes ces expositions, symposiums auxquels Louise Falstrault a participé et moi qui ai regardé, accompagné. Pas que des expositions, des voyages, des paysages, des dépaysements, des amitiés. Des tableaux pour elle, des mots à écrire pour moi.

L’artiste a encore des tableaux à vendre, son atelier est ouvert sur rendez-vous. Les yeux « opacifiés » de glaucome qui souffrent de sécheresse oculaire, l’artiste ne peint plus, mais sur Facebook, elle surveille encore les artistes peintres qu’elle a connus lors des symposiums. Elle reconnait des noms. Elle se réjouit que Marie-Claude Courteau soit l’invitée d’honneur au Symposium de peintre de Gatineau en couleurs qui a lieu les 25-26-27 octobre. Elle a feuilleté quelques albums photos, a vérifié sur son site Internet en quelle année elle était à Gatineau, à Ottawa, à Baie-Comeau, à Maniwaki, au Massachusetts, à Kamouraska. Et puis, sereine, elle revient à aujourd’hui et maintenant. Elle veut vendre, donner. Des revues, des livres, des pinceaux, des chevalets. Elle est prête, elle veut se sentir légère.

Quant à moi, encore le goût d’écrire. Court. Petits billets. Publiés facilement sans attente, sans stress. Dans ce blogue qui a déjà porté le titre « De nos pinceaux et de nos stylos », qui se voulait une fenêtre sur la Petite-Nation et qui finalement tient plus du carnet de lectures. Je suis aussi prête à donner des livres, des albums de bandes dessinées. Le problème n’est pas tant d’être prête à se départir de ses biens, mais accepter, vouloir vraiment, ne pas croire que sa vie est finie, ne pas espérer que tout se fasse par magie. La solution, c’est d'aller chercher le bac vert, le bac bleu et de remplir la première boîte de carton.

jeudi 17 octobre 2024

Elles méritent un prix

 



Il faut que j’en parle. Que j’écrive là-dessus.
Le tout — le visible pour nous, parce que le travail en amont a sûrement eu lieu bien avant — a commencé mi-février 2024. La MRC de Papineau profite du 350e anniversaire de la Seigneurie de la Petite-Nation «pour explorer avec vous, en mots et en images, l’histoire et l’identité de son territoire.»

Depuis février, donc, j’ai participé à quelques événements, j’ai vu une ou deux vidéos mais surtout, je lis des capsules, 21 jusqu’à maintenant.
Avec plaisir, avec délectation! Avec reconnaissance, avec fierté.
Tourisme Petite Nation a réalisé et effectue encore un travail colossal.
Dès le début, j’ai adoré l’image de marque (je ne tiens pas spécialement à utiliser le terme «branding»). Le choix des couleurs, le design. J’ai vu les annonces sur des véhicules, des pancartes, des oriflammes. La même partout, remarquable.

Quant aux capsules illustrées, documentées sur l’histoire, les personnages, les personnes, les coutumes, les municipalités, je n’ai que des félicitations à adresser à Marthe Lemery et de Marie-Josée Bourgeois. Quelles recherches, quelle documentation et quels textes!
Je les connaissais, je les aimais déjà, mais là, elles méritent un prix. Un prix qu’il faudra inventer. Un prix qui touche l’histoire, l’écriture, la créativité. Un prix provincial.

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lundi 2 septembre 2024

Lectures d'août

 

Pas tellement pour lire le texte comme pour voir la disposition des paragraphes.

Chaque fin de semaine de la fête du Travail me (nous, sûrement) rappelle les mêmes souvenirs : le départ du chalet, le retour en ville, la rentrée scolaire. S’il faisait frais comme aujourd’hui, nous n’avions aucun regret de quitter le chalet-pas-vraiment-isolé. J’avais hâte de retrouver mon vélo, mes amies, les bancs de l’école : dans cet ordre.

Me rappelle aussi plus près : la tournée des ateliers des Créateurs de la Petite-Nation. On espérait du beau temps, encore quelques fleurs pour décorer... et des clients. Aujourd'hui, 2 septembre 2024, c'aurait été tranquille... quoique, les clients et vistieurs n'auraient pas été pressés de quitter l'atelier!

Fin de l’été, de nouveaux livres bientôt.
Alors survol de mes lectures — toutes numériques sur ma liseuse Koko — du mois d’août.
— Avide
— Avant de brûler
— Dents de fortune
— Prendre son souffle


Dans tous les cas, ce que j’ai adoré, c’est l’écriture. Appelons ça le style. Je dirais plutôt la façon (nouvelle? ou influence des cours en création littéraire? ou à la mode, depuis Charlotte de David Foekinos?) de présenter la narration. Des phrases courtes, des phrases qui tiennent lieu de paragraphes. Presque des fragments. Comme j’aime parce que dans ma tête, c’est comme ça que je pense. Et puis, c’est « punché », comme des coups directs sans fioriture, ce qui donne de la force au texte, surtout en fin de chapitre.

Plus précisément, tout le reste : l’histoire, le sujet, les personnages, c'est différent pour chacun.
Avide : j’ai aimé le sujet, une chasse au trésor, une longue marche dans la nature, ses relations avec les gens et même la fin, le climax, ne m’a pas déçue. Évidemment, il a fallu que j’aille voir la fin, mais je suis revenue aux premières pages, signe que c’est très intéressant.

Avant de brûler : Je ne comprends pas encore vraiment la raison, mais dès la page 60, j’ai décroché. Pourtant Les falaises, son précédent roman, j’avais aimé. Tout aurait dû me plaire puisque l’écriture me comblait. Mais cette histoire de bête... mon cerveau n’a pas compris. Je ne voyais plus les personnages, l’histoire n’était plus la même. Et puis cette alternance entre les personnages... j’aurais dû aimer, j’ai déjà procédé de cette façon. Il faut croire que ce n’est pas parce que je vis entourée de forêts, de champs cultivés, que je vois des chevreuils plusieurs fois dans l’année, que j’entends des oiseaux tous les jours, que j’aime connaitre tous les détails du parcours d’une bête.
Je suis allée voir la fin :
Farah et moi essuyons d’un même mouvement la couronne de cendres sur nos fronts et on se relève,
arpente les dégâts pour
retrouver le sentier,
chercher l’orée d’autrefois la forêt,
s’assurer qu’il y a un monde à refaire.
Mais cette fois, pas de retour aux pages précédentes.

Dents de fortune : choix de mon « 12 août ». J’ai tout aimé : l’histoire, les personnages, les lieux (Îles de la Madeleine et le Montréal des années 1930), le vocabulaire propre à cette époque et ces insulaires. J’en aurais pris plus : savoir ce qui a mené Laura à vouloir quitter son île et je l’aurais suivie plus longtemps entre son premier et septième enfant.

Prendre son souffle : alors là, pas de description d’un décor, d’un paysage, pas de métaphore autour d’une bête ou d’une fleur. Que des émotions. Amour contre maladie. Reste, pars? Et les personnages n’ont pas 70 ans, mais 30-40. Le cœur à l’envers souvent, à me demander ce que j’aurais fait, ce que je ferais si...

Il y eut aussi, une belle surprise: 50 ans de la maison d’édition Québec Amérique.
Très très beau magazine, graphiquement parlant. Lecture très très intéressante. De beaux portraits.
Bien assise sur ma galerie arrière, café le matin, verre de vin en fin d’après-midi. Tablette et carnet à côté pour prendre des notes sur les livres qui me tentent, sur les auteur. e. s que je connais moins (je ne me décide pas à écrire auteur.trices). J’ai dévoré. Lu avidement.
50 ans, donc 1974. Je n’étais plus à Montréal pour voir vu les débuts de cette maison d'édition. J’ai plutôt été témoin des Éditions du Jour, éditions Cercle du Livre de France parce que mon père, Jacques Lamarche y a publié ses premiers livres. J’ai entendu des noms comme Gilbert LaRocque, Jacques Hébert, Pierre Tisseyre, Andrée Maillet, Nicole Brossard, Robert Soulière et plusieurs autres.
Dans le très très intéressant et très très bien fait magazine de 160 pages de Québec Amérique, j’ai tout de même re-trouvé avec un plaisir non dissimulé le monde de l’édition.

Lien vers le magazine en numérique >>> 

Que l’automne vienne, d’autres livres m’attendent. Des escapades aussi. Des fêtes : ce n’est pas croyable le nombre de personnes conçues pendant les fêtes de Noël!

dimanche 4 août 2024

Où un article de journal me tient éveillée...

« Où je me sens libre, c’est dans l’indéfinition. Être plus d’une chose, plus d’une identité, plus d’une personne. Fondamentalement, on est construit comme ça [...] Vraiment, j’en suis persuadé : je n’ai pas l’impression d’être une seule personne, d’avoir une identité fixe ou stable. Je cherche à m’approcher de ce “ni l’un ni l’autre” que je sens en moi. »

 Kevin Lambert

Lire ça à deux heures du matin, tu n’as qu’une envie, c’est de te lever et d’écrire.
De dire que c’est tout à fait ça. Tu es plusieurs personnes. Je suis je, je suis tu, tu es nous, nous sommes elles et parfois il.

Dans ma tête, j’établis un plan : un chapitre par personnage: la fille, la femme, le garçon manqué, l’étudiante, la professeur, la graphiste, la voyageuse, l’amoureuse, l’amie, la sportive, la sœur, la jeune, la sociable, la verbo-moteur... et plusieurs encore. Le «je» du jour, le «tu» qui peine à se reconnaître devant le miroir, le «il» qui ne porte ni robe ni jupe, ne se rase pas, le «elles» quand je me sens féministe et solidaire...

Et comme Kevin Lambert, comme dans tous mes livres, 
« J’ai ce besoin d’un projet à l’autre de métamorphoser la forme. Je pense chaque forme de manière indépendante, par rapport à l’histoire que je veux raconter. Je n’adapte pas mon sujet à mon style. Pour chaque sujet ou personnage qui m’intéresse, j’adapte mon écriture. »
La forme serait par fragments. Paragraphes, espaces, alinéa. Comme Foekinos dans Charlotte. Comme Nuit de foi et de vertu de Louise Gluck que Ruth Major vient de me faire découvrir. Comme les poèmes que j’écrivais à 15 - 17 ans.

Et comme Kevin Lambert encore :
« Mon inspiration vient beaucoup de la littérature. La littérature me donne accès même à des souvenirs. J’ai l’impression de ne pas me connaître quand je ne lis pas. J’ai besoin de me nourrir d’autres écritures. […] Il y a toujours une partie de choses que j’ai connues dans ce que j’écris. 
Dans la vie, on comprend rarement les actions ou les motivations des autres. »
En lisant les autres, je me, je nous, je vous comprends mieux.

« L’identité ne m’intéresse pas, parce que l’on est aussi ces masques que l’on a mis en chemin pour se protéger. »
En revanche, l’identité m’intéresse.
Mon premier livre publié, Je me veux, disait déjà que je cherchais à savoir qui j’étais. Pourtant je n’aime pas les étiquettes si elles sont jugement ou amalgame réducteur, comme si on était qu’une identité.

Je n’ai jamais senti le besoin de dire devant tout le monde qui je suis. Ma mère, par son exemple, m’a appris la discrétion. Les années 60-70 nous demandaient la pudeur, la réserve. Chez nous, autour de nous, on ne parlait ni de nos amours, ni de nos sentiments. On parlait de nos actions, nos études, notre travail. De cuisine ou de sports. Même mes lectures étaient visibles mais pas commentées. Libres par contre.

Dans les livres, je me, je te, je nous, je vous cherchais. 
Je me suis crue philosophe en lisant L’Être et le néant de Sartre.
Je me suis vue actrice en lisant et en jouant la bonne dans La cantatrice chauve de Ionesco.
Je pouvais aimer garçon et fille en lisant Virginia Woolf, Anaïs Nin, Simone de Beauvoir.

À chaque livre, j’étais une nouvelle personne.
Je voulais être écrivain pour être entière, tout à la fois. Et comprendre qui je suis. Ou en tout cas essayer.

Et finalement, il est six heures du matin, la chatte ronronne à mes pieds, mes pensées s’enfuient à mesure que le soleil éclaire le jour. Je m’endors enfin, le cœur un peu plus calme, avec l'impression d'avoir fait le tour de la question. Les espoirs de les écrire pour vrai ces chapitres, enfuis. Je sais que je n’ai plus le souffle pour écrire une centaine de pages, ni les contacts pour être publiée. Le blogue me permet d'écrire court, même quand je pense long!

Le jour, entre les repas et les baignades, j’irai voir quel livre j'achèterai le 12 août.

Et j’écrirai. Encore.
Mais si Kevin Lambert crée des personnages pour exprimer qui il est, je n’en suis plus là. Je suis dans les explications, les constatations. Je n’irai pas jusqu’à dire l’analyse, je n’ai jamais été forte dans les dissertations, les essais. Je préfère la romance.

Aujourd’hui, c’était la blogueuse.
Et ce soir, elle se couchera tôt!

mardi 9 juillet 2024

Fragmentée-s

Presque chaque matin, survol des nouvelles acquisitions à la BAnQ et Biblio Outaouais / Prêt numérique. Presque chaque semaine, un regard vers ce qui se publie au Québec.
Volontairement vers le féminin.
Ce matin, les mots écrire, écriture, avant le mot littérature.
Qui me mènent au livre  Écrire au féminin au Canada français.

J’y passe l’avant-midi. Parmi ces universitaires qui ont un vocabulaire que je n’ai/n’aurai jamais. Devant leurs mots que je ressens plus que je ne comprends.
Je note les noms, nouveaux pour moi, qui existent pourtant depuis longtemps, si près (au Canada) : Lise Gaboury-Diallo, Andrée Christensen, Simone Chaput.
Je note des thèmes : l’identité fragmentée ou cette impression de duplication du soi.
Je retiens les mots : fragments et double.

            mon id / entité n’est qu’une série
            d’approximations
            une foule d’éventualités
            fragmentées
            mes réactions
            une litanie changeante selon la mesure
            de l’urgence
            moi toujours à refaire
            à rattacher à mon esprit volage
                                            Lise Gaboury-Diallo

Être tant de personnes dans une seule, avoir tant d’identités. Les accepter, les aimer toutes. Sans toujours les comprendre.

L’après-midi, encore la preuve : pourquoi avoir tant tardé pour aller voir le dentiste?
Un an que mon dentier du bas me fait mal. Pas tout le temps, pas à chaque repas. Juste à droite.

Du déni, certes. De l’orgueil sûrement. Ça va passer, ça ne fait pas si mal.
Toujours cet autre moi (un des) qui ne sait pas décider, qui ne sait pas ce qui est bien pour elle. Dépendante et indépendante à la fois, qui veut prouver quoi à qui? qui attend que ça passe, qui passe après les autres. Comme ma mère.

Même pas une question d’argent, l’ajustement fut gratuit. Même après un an.
Je suis de diable et d’ange. De bourreau et de martyre. D’accusations et de pardons. De beaucoup de mots et de peu d’écoute pour moi-même. De tout et de rien. De mal et de bien. 
Compartimentée-s, fragmentée-s.

mercredi 3 juillet 2024

Le dedans et le dehors

Tableau de Louise Falstrault: Du dehors au dedans. (Collection F. Leduc)

« Je fais partie de ces personnes pour qui les questions par plusieurs jugées abstraites et nébuleuses semblent les plus proches, les plus exaltantes. » 
ou
« La grande question de l’existence est celle des rapports entre le dedans et le dehors.» 
Chimères, Frédérique Bernier
Je fais partie de ces personnes qui ont l’impression que si on ne lit pas ce que j’écris ou a écrit ne peuvent pas m’aimer vraiment. Si on ne cherche pas à savoir ce que je lis ne peuvent pas savoir ce que j’aime ou qui je suis. Ne voient que le dehors. Comme si je n’étais que mes mots écrits.
J’aime pourtant aussi « mon dehors » et peut-être finalement que je ne montre que lui.

Très souvent on me dit que le fait d’avoir tant déménagé m’a traumatisée. Chaque fois, je dis que non, mais je dois admettre que de la naissance à vingt ans, quinze écoles et presque autant de maisons ont dû marquer mon rapport à l’attachement.
Attendre d’être choisie
Attendre d’être aimée
Avant de m’attacher
Avant de montrer mon dedans

Et sans doute pour l’avoir montré une fois ou deux, d’avoir aimé en premier, d’avoir été celle qui attend, pire, délaissée, j’ai fermé la porte du dedans.
Faire passer des tests avant d’y donner accès.
Rendre la tâche complexe à qui s’approche.
Et puis, finalement, comprendre que moi non plus, je ne cherche pas à voir le dedans de tout le monde. Trop engageant. Nous sommes multiples. Nous sommes tous plus ou moins des personnages dans notre propre vie. Constamment en représentation. Même en dedans.

Alors, je vis compartimentée : la campeuse, la voyageuse, la campagnarde, la généalogiste amateure, la fille de, la sœur de, l’amie de, celle qui connait beaucoup de noms d’auteu. re. s, celle qui écrit pas pire, celle qui publie ses photos de voyage ou de couchers de soleil, celle qui aime et choisit le français en toute chose, celle qui parle beaucoup, mais ne dit rien de son dedans, celle qui préfère l’écrit pour pouvoir réfléchir et bien dire ce qu’elle veut dire, celle qui pleure rarement devant les autres, qui pleure par en dedans, celle qui cherche à comprendre, mais qui a du mal à expliquer simplement, celle qui a toujours des réponses longues à des questions même courtes. Parce que rien n’est simple ni noir ou blanc pour elle.

Accepter que chacun.e montre son dedans à sa manière. Ou pas.
Il ne faudrait pas non plus confondre le dedans et le dehors  comme si c'était le meilleur et le pire.
Parfois, aimer le dehors, c’est déjà beaucoup. Ça peut prendre une vie.


vendredi 28 juin 2024

Laisser venir ce qui vient

Ennui
Un mot de jour et non de nuit
Pas nécessairement les jours de pluie
Pas nécessairement le dimanche après-midi
Comme quand nous étions petits

Pas ennui comme questions
Celles qu’on n’a pas le temps de se poser
Quand on travaille
Quand on a des enfants
Quand on a une maison à entretenir
Quand on a 30 ans

La question ennui parfois derrière le mot retraite
Temps de penser
D’hésiter
De choisir
De tourner en rond
De prendre le temps de ne rien faire
De se chercher
Avec un peu de chance, se (re)trouver
Le temps d’écrire
Ce qu’on n’a pas dit
À moins d’avoir oublié
D’avoir pardonné
À moins de comprendre, de réaliser qu’on n’a plus le temps

Peut-être tranquillité d'esprit finalement
Paix du cœur
Et le sentir
Et dansle silence, le confondre

La retraite
On a plus de temps et pourtant moins de temps, devant
Il faut regarder le présent
Les feuilles vertes au printemps
La mer ou le sable en été
Le chevreuil un matin
La vie toute l’année
Ne pas s’attarder au mal des os, aux plis de la peau, aux cheveux blancs
Parler aux gens
Ne pas craindre le vent
Le mot retraite qui dit l’argent, qui chuchote le sud en hiver, qui rêve de voyages
qu’on entend à 55-60 ans

Après 70, j’entends plutôt le mot vieillesse
Tendresse aussi
Les parents, les ami. e. s disparaissent
Encore des sorties
Encore des printemps
Plus tout à fait la retraite 
Plutôt des nuits d’insomnie
Viennent des ennuis 
Moins de questions
Sans réponses pourtant

Juste laisser venir ce qui vient
Comme un chevreuil, un matin.




mercredi 12 juin 2024

Entre le 2 et le 11 juin 2024

Avant que viennent les mots à ajouter aux photographies, il me faudra le silence. Faire le tri dans tous ceux qui se bousculent encore de tout ce que j’ai vu, senti, entendu les dix derniers jours.
Entre vagues, brume, vent, frais, anses, golfe, rochers, barachois, bleu du ciel, bleu de la baie.
Entre déceptions, plaisirs.
Entre guédilles, galvaude, pêcheur, cafés.
Entre autoroutes, piste cyclable, mauvais état des routes.
Entre conversations, écoute, lecture à voix haute d'Un animal sauvage de Joël Dicker.
Entre Chandler, Maria, Carleton-sur mer, Mont-Joli, Sainte-Flavie, Rimouski, Saint-Casimir.
Peut-être qu’après avoir nommé les plus marquants, ne retiendrai-je que les images et les odeurs de bord de mer, que l’accueil du préposé à l’accueil du motel à Saint-Flavie, que les très bons services des gens du camping de Pabos, que les yeux fermés de ma compagne de voyage, toujours aux prises avec cette greffe de cornée qui n’en finit pas de guérir, que les émotions de mon amie nouvellement retraitée.

Peut-être déjà tout ça n’est que souvenirs parce que Mika retrouvée, le gazon à couper, la revue Lettres Québécoises numéro 193 à lire, le costume à aller chercher pour la rencontre du 15 juin à Ripon occupent tout mon présent.
Déjà d’autres images, d’autres sons, d’autres odeurs, d’autres plaisirs.
Finalement les mots seront ceux-là.



jeudi 16 mai 2024

Le 16 mai 1674...

 


En 1674, j’étais de ce grand territoire de 25 lieues désormais nommé Seigneurie de la Petite-Nation.
Avant-avant, j’étais argiles marines dans la mer de Champlain,
Avant, j’étais forêt, rivières et ruisseaux, terrain de chasse et de pêche des Weskarinis.
Je ne savais pas alors:
que je faisais partie de la chaîne de montagnes Laurentides,
que j’allais me détacher de deux voisines fondées bien avant moi,
que j’allais devenir paroisse au début du vingtième siècle.

Je suis de frêne blanc, de tilleul et de noyer cendré,
Je suis de pins rouge, blanc et gris et de couchers de soleil orangés.
Je suis de buttes et de collines, de roches métamorphiques.
Je suis de la Petite rivière Rouge et des ruisseaux Sam, Pearson et Suffolk.
Et surtout, je suis de dépôts sableux et de terre légère, sol idéal pour la culture de la pomme de terre.

En 1902, Ariste Bock, Anthime Paiement, Moïse Charron et Anthime Cloutier se rencontrent, discutent et s’adressent à l’archevêque d’Ottawa, Mgr Thomas Duhamel.
Saint-André-Avellin et Notre-Dame de Bonsecours me laissent aller et, enfin, en 1902, 
je suis constituée canoniquement d’abord, puis civilement. 
J’existe enfin, nommée, désirée, choisie.
Je ne suis plus ce vague territoire du nord de la seigneurie de la Petite-Nation.
De monts et de vaux, je deviens plateau.
Je suis terre d’avenir, terre d’espoir. 
Je suis forêt à défricher, champs à cultiver, maisons à bâtir,
aussi de messes à chanter, mariages à célébrer, familles à établir.

De Labelle ou de Prescott, de Saint-André-Avellin ou de Montebello, sont venus les Lauzon, Bock, Deschambault et Lanthier; ils choisissent le rang Saint-Augustine. 
Les Pilon, les Laporte, les Lalonde s’établissent au village, entre rang Gustave et rang William. 
Les Bédard, Brazeau, Bigras, Deschâtelets, Legault, Perrier, Rieux et Robillard dans le rang Thomas. 
Les Pharand et les Chartrand, dans le rang Procule.
Sont venus aussi des Gauthier, des Perrier.
Les Tessier deviennent Lavigne, les Deguire deviennent Larose.

Je suis de ces hommes et de ces femmes qui ont fait et font encore qui je suis.
J’ai encouragé les commerçants, les hôteliers, les restaurateurs, les mécaniciens.
J’ai vu naître des maires, préfet et député, des policiciens.
J’ai vu se former des organisations, des clubs, des comités.
J’ai vu s’établir des artistes peintres, des artisan.e.s, des auteur.e.s et même des inconnu.e.s.
Plusieurs étudiant.e.s sont parti.e.s, sont revenu.e.s.
Quelques discrètes célébrités vivent ailleurs leur vie quotidienne, 
mais ne renient pas leur origine pacificienne.

Je vois tout ce beau monde s’entraider et s’entredéchirer, se reproduire ou s’ignorer.
Pour un coin de terre, pour un principe. 
Certains fonceurs, d’autres plus craintifs.
Chacun avec ses idées, ses ambitions et ses choix.
Toujours pour le meilleur. Enfin, je crois.

Je me réjouis de toutes les saisons, des semences aux récoltes, des vents froids aux étés chauds.
J’ai vécu des carnavals d’hiver, des Festival de la patate en été.
J’ai vu les jeunes jouer à la balle molle, au soccer, au hockey, à la ringuette.
Était-ce un fantôme ou ai-je entraperçu Jack Rabbit, cet homme qui a conçu le saut à ski du Seigniory Club à Montebello, dans la forêt enneigée qui borne la municipalité?
J’ai deux ou trois bâtiments dignes d’intérêt, publiés dans un livre sur le patrimoine. 
Au fil des ans, les commerces se sont raréfiés, la caisse populaire a fermé, l’école n’est plus une école. J’aurais voulu plus, mais l’important, c’est que je sois accueillante. 
Que de jeunes familles aient envie d’y venir. 
Pour travailler, pour cultiver, pour y vivre plus que les étés.
Je suis triste de voir les octogénaires mourir alors que naissent peu de bébés.

Je suis un peu morte quand l’église a passé au feu, quelques mois avant son centenaire.
J’ai été dévastée de voir la démolition du presbytère. 
Pour se recueillir et parler à nos morts, il reste le cimetière.

Je veux qu’on me nomme, qu’on ne m’oublie pas, que je ne disparaisse pas.
J’étais là, indéfinie il y a 350 ans, au temps de monseigneur Laval.
Bientôt 125 ans 
que j’ai un nom bien à moi, 
que je souhaite fierté aux Pacificiens et Pacificiennes,
que je veux vivre et prospérer... dans la paix,
que je veux laisser bien plus que de merveilleux et célèbres couchers de soleil.

Je suis Notre-Dame-de-la-Paix!




dimanche 12 mai 2024

Attentes


En attendant d’obtenir Liste de mes envies 2, je relis La liste de mes envies 1.
En attendant de lire À quoi songent-ils, ceux que le sommeil fuit?, je lis Ce matin-là.

J’ai vu que dans À quoi songent-ils, ceux que le sommeil fuit? les chapitres sont courts. Deux ou trois pages. Chaque fois un personnage et ses histoires, ses souvenirs. Chacun·e sa nuit.

Alors m’est venue l’idée de l’attente. Je pourrais conter tous ces moments où on attend. Où j’attends.

Comme aujourd’hui : rien de particulier à faire. Pas d’obligation. Ni assez beau ni assez chaud pour un tour de vélo. Un peu de pluie qui m’empêche de peinturer les marches de la galerie.

Impression d’attendre.

Remontent des souvenirs de mes attentes. De mes nuits et de mes envies également.
Comme Jocelyne dans le livre de Grégoire Delacourt, je pourrais faire la liste de mes attentes. Pour certain·e·s auteur·e·s, ça pourrait faire un livre. Pour moi, au moins un billet de blogue?

Il y a les parfois courtes et plutôt banales : attendre que la visite arrive, attendre qu’elle parte. Attendre l’heure polie de tirer sa révérence.

Il y a les stressantes : attendre le verdict d’un docteur. Que le vent cesse lors de tempête. Que la pluie diminue quand je conduis sur une autoroute. Que ton équipe compte un but. Que l’aube se lève et chasse les idées noires.

Il y a les frustrantes : attendre ton tour de parler, attendre que l’autre se taise. Attendre que le trafic diminue. Attendre que l'autre comprenne. Attendre après des formulaires. Attendre qu'un humain réponde au bout du téléphone.

Que la fièvre baisse, que la douleur diminue. Que l’électricité revienne.
Attendre de revoir, de pouvoir, de savoir. De guérir, de revenir à la normale ou comme avant.
Attendre patiemment, sagement, silencieusement.
Attendre sans attentes.

Il faudrait être plus précis. Personnaliser l’histoire. Raconter un souvenir.
Quand j’avais quatre ans, mon frère, mon aîné de deux ans, a eu son premier bicycle. En vouloir un. Il fallut attendre d’être plus grande.
Quand nous avions un répondeur et que j’attendais une date pour une opération. Chaque fois que je revenais d’une sortie, je regardais si le bouton rouge clignotait. Je n’ai plus de répondeur, mais il m’arrive encore de regarder dans la direction de l’objet absent.

Il faudrait montrer à l’aide de verbes d’action, de vrais lieux, les cinq sens, et non raconter.
Mais ça, ça ne me tente plus. Je préfère lire les auteur·e·s qui ont la patience, la persévérance.
Alors attendre les livres de la bibliothèque. Parce que... attendre de gagner à la loterie pour me payer tous les livres que je voudrais!

Heureusement entre chaque attente, et même dans, il y a la joie, la fierté, la satisfaction, la paix, l'espoir de la réconciliation, la respiration, le sang qui bat, qui coule, l’amour des livres, du voyage, du paysage, de soi, des autres, de l'autre.  Le silence dans la tête, la petite musique douce. La vie.
Et je n’en suis pas à attendre la mort.