Des lieux déjà visités, retrouvés, dont on ne se lasse pas.
Des nouveaux qui donnent l'impression de prolonger les jours et les rêves.
Dix jours de temps à soi.
Du lac Champlain, au fleuve Saint-Laurent, à la mer à Sainte-Flavie, cette bien-aimée que je nommerai sûrement dans mon prochain roman.
Et comme je ne suis pas poète, pour certaines légendes, j'ai emprunté les mots de Gatien Lapointe, de sa si belle Ode au Saint-Laurent.
Texte intégral de l'Ode au Saint-Laurent >>>
samedi 25 juin 2016
vendredi 24 juin 2016
« Rapaillage »
Comme à chaque retour de voyage, je veux tout. La même journée si possible.
Comme retrouver la parole écrite. Tout dire ce que j’ai tu, ce que j’ai gardé pour moi. Libérer les pensées retenues. J'ai beaucoup « rapaillé » ces dernières semaines.
Je veux:
Trier les photos du voyage, les redimensionner, les ajuster, publier les meilleures. Raconter le fleuve, la mer, le lac, dire le contentement, l’émerveillement. Le plaisir.
Envoyer un courriel à ses amies et à sa famille pour dire que je suis de retour.
Lire quelques blogues.
Laver les vêtements.
Ranger le matériel de voyage.
Tondre le gazon, arroser les plantes qui ont manqué d’eau.
Ramasser toutes les branches tombées, il a venté fort, personne n’a besoin de me le dire, ça se voit.
Dépouiller le courrier.
Acheter lait et bananes, aller chercher le panier hebdomadaire de légumes bio.
Vérifier si j’ai bien Les vaisseaux du cœur de Benoîte Groult, décédée pendant mon mini-voyage, répondre à Madame lit qui en a parlé sur son blogue. Oui, je l’ai, cadeau reçu en 1988, feuilleter les premières pages. Être désolée de ne se souvenir de rien sinon que j’avais aimé comme j’ai tout aimé de Benoîte Groult. Avoir hâte de relire.
Commencer la lecture de l’Album Anne Hébert acheté à Trois-Rivières, raconter l’anecdote entourant l’achat. Essayer de comprendre pourquoi j’ai du mal avec l’écriture de cette auteure : en voyage, j’ai essayé de (re) lire Les fous de Bassan. Sans grande conviction. Déçue de mon moi intellectuel qui peine à la tâche.
Réagir au billet d’Audrey Whilhelmy où il est question de la relation entre lire et écrire.
Terminer la lecture du livre La langue rapaillée d’Anne-Marie Beaudoin-Bégin qui m’a fait réagir fortement. Rapailler mes idées pour en parler ultérieurement.
Constater que je ne réussis pas à lire, écrire et voyager en même temps. Bref, ai peu lu en voyage. Ai contemplé. Le lac Champlain à Burlington, la mer à Sainte-Flavie, le fleuve à Cap-de-la-Madeleine.
Tout ça d’égale importance pour moi.
Calmer mon impulsivité. Prendre le temps. Une heure à la fois. Me discipliner. Ne pas sautiller comme la petite fille énervée qui retrouve ses amies après les vacances d’été.
Vous dire d’abord bonjour comment allez-vous, et vous, comment se sont passés ces dix derniers jours?
Respirer.
Souhaiter une bonne fête nationale à tous et à toutes.
Lien vers le blogue Madame Lit>>>
Lien vers le blogue d'Audrée Whilhelmy>>>
lundi 6 juin 2016
Louise Falstrault: toujours plus de couleurs
Le 6 juin 2003, dans un carnet de voyage, j’avais écrit :
L’artiste peintre avait traîné six tableaux depuis notre départ dans le seul but de rencontrer un galeriste à Calgary, à la suite d’un contact. La rencontre n’ayant pas donné les résultats escomptés, elle entre dans la galerie d’à côté, et le co-directeur aux origines allemandes tout comme Louise Falstrault, fut enchanté et pris ses six peintures. Dès lors, elle n’avait plus qu’une envie: rentrer chez elle. Et peindre.
Treize ans plus tard, les tableaux de l’artiste sont toujours à Calgary, chez Stephen Lowe maintenant. Mais les belles années de vente sont bel et bien terminées depuis la crise du pétrole. Eh! oui, en Alberta, la baisse du prix du pétrole ne fait pas que des heureux!
Mais un cœur créatif ne s’arrête pas de battre aussi facilement. Louise Falstrault aime toujours autant les couleurs. Elle peint moins, elle expose moins (quoique son atelier est toujours ouvert au public et elle participera au 20e Rendez-vous des arts à Papineauville, fin août), mais elle ne cesse pas de créer pour autant. Pourvu que ce soit en couleurs. Elle travaille présentement sur un projet d’envergure. Par envergure comprendre non pas la grandeur du tableau, mais le temps pour l'imaginer, ramasser le matériel et le créer. Elle y mettra le temps qu’il faut.
Depuis qu’elle a vu la galerie d’art sur Amelia Island en Floride, Louise veut avoir sa mosaïque.
Recherche de vaisselle à casser, de vieux morceaux de poterie brisés (d’où la visite décevante à Williamsburg l’hiver dernier), des morceaux de verre trouvés sur les plages de la Gaspésie. Du bois d’échoueries.
Et ces jours-ci, il lui manque du rouge. Avis lancé.
Lien vers Stephen Lowe art gallery>>>
mercredi 1 juin 2016
Carnet du roman (6)
Démotivée
Noir
Pluie
Moitié vide
Clichés
Ne plus croire en moi
Au moment où le moral flanche...
Quand je lis que Le livre des Baltimore de Joël Dicker est mal écrit, mais publié à 280,000 exemplaires. Si le sien est mal écrit, que sera le mien!
Quand je repense à La femme qui fuit, je sais que je ne parviendrai jamais à ce concerto des mots, ce crescendo puissant.
Je devrais cesser de lire pendant que j’écris. Pendant que je réécris. Peut-être devrai-je cesser d’écrire!
Quand je trouve l’histoire de mon manuscrit bien ennuyeuse, sans rebondissements, sans grand drame. Et le style n’est justement que des clichés. Pas de poésie, pas de force, Pas de puissance. Je redoublerais la cinquième secondaire avec un style pareil!
Quand je ne vois pas le jour où il sera prêt à être présenté à l’éditeur. Qui m’encourage mais ne peut rien me promettre.
Que je jure que c’est le dernier, j’ai mieux à faire.
À ce moment, ce même éditeur m’envoie la photo ci-contre. Les livres de Vents d’ouest en offensive à la Librairie Réflexion des Galeries de Hull.
De plus, un réviseur d’un bulletin que je monte, et pour lequel je me permets quelques suggestions de révision, écrit : « Notre graphiste est formidable. Prenons-en soin. »
Mon roman n’est peut-être pas meilleur, sûrement pas, mais
Le courage revient
Le noir se grisonne
Les nuages se dissipent
Le verre se remplit
Les trouvailles suivront bien.
Ne pas compter sur la confiance, seulement la persévérance
Mais tout de même, je le jure, c’est le dernier.
Je me contenterai de mon blogue qu’il soit imparfait, où se glissent quelques fautes, mais dont le rythme de parution me convient, le nombre de mots me satisfait, et où je peux m’exprimer, même si ce sont des platitudes, je n’ai pas à suivre de règles. Que les miennes.
(Mise à jour le 3 juin: aucun commentaire ici, mais 56 "réactions" sur Facebook où je n'ai publié que la photo et le lien vers ce billet, un record dans mon cas. Certains croient que c'est une nouvelle publication, mais qu'importe mon livre est vu donc il existe et par le fait même l'auteure aussi.)
(Mise à jour le 3 juin: aucun commentaire ici, mais 56 "réactions" sur Facebook où je n'ai publié que la photo et le lien vers ce billet, un record dans mon cas. Certains croient que c'est une nouvelle publication, mais qu'importe mon livre est vu donc il existe et par le fait même l'auteure aussi.)
samedi 28 mai 2016
Complètement accro
Du meilleur, du plus important, du plus cher à mon cœur, je n’ose pas dire. Je n’ose pas exposer au grand jour. Non par peur du jugement, ou du regard, mais pour le garder intact, privé, beau pour moi-même. Ne pas exposer à la critique. Garder dans le silence et dans l’ombre, comme un joyau précieux. Ce n’est pas sujet de bavardages futiles. Ni excès de snobisme intellectuel, n’allez pas croire, mais pour moi c’est du sérieux et il ne faut pas tout prendre à la légère.
Et pourtant ce plaisir, je voudrais le présenter maintenant, non pas pour l’exhiber ou même le promouvoir. Seulement en parler parce que j’en suis fière. Mais encore là, je laisse venir tout doucement la manière, les mots. Sur la pointe des pieds, sur le bout de la langue. Ouvrir la porte en petits gestes retenus.
Le groupe existait déjà quand j’en ai entendu parler au hasard d’une conversation entre deux membres. Dès lors, ma curiosité fut piquée, excitée. Un tel groupe existait? Enfin je pourrais parler de mon sujet favori (et favori est un euphémisme dans mon cas, c’est LE sujet, bien haut sur la liste de mes envies), de ce sujet dont il est rarement question même avec mes meilleures amies dont les intérêts sont tout autre.
Le livre.
La lecture.
J’étais prête à toutes les bassesses pour faire partie du groupe dont il avait été question dans cette conversation. Ai-je supplié? Me suis-je mise à genoux? Ai-je bien expliqué les raisons pour lesquelles je le voulais à ce point? Et quand j’ai entendu le « oui », fut-il fort ou hésitant? Qu’importe, j’ai embrassé, j’ai remercié et je déborde encore de gratitude envers ces deux femmes qui m’ont fait une petite place au sein de leur bande.
Nous sommes donc une douzaine de ferventes (permettez que j’utilise le féminin, il n’y a qu’un homme!), mais rarement les douze en même temps.
Pour l’instant, nom temporaire : Cercle de lecture.
Opinion émise qui n’est pas de moi, mais qui résume tout :
«Quelle richesse de personnes, de cultures, de points de vue, de découvertes et d’échanges».
Des trentenaires, des soixantenaires. Des Québécoises, des Belges. Une malvoyante qui lit en braille et écoute des livres audio. Certaines aiment les polars, d’autres lisent en anglais. On apporte nos livres, à tour de rôle, on en parle, on les prête ou on les recommande.
Des découvertes comme réaliser n’avoir jamais lu Amélie Nothomb. En profiter pour parler du vedettariat. Faire connaitre des auteurs québécois comme Louky Bersianik et son célèbre L’Euguélionne (qui n'avait l'air célèbre que pour moi), et ne réussir tout au plus qu’à piquer la curiosité. En profiter pour digresser sur le féminisme.
La saison dernière, avoir lu, toutes, le même livre : La peste d’Albert Camus. En discuter. Trouver que le climat social n’a pas tellement changé.
Voir passer les deux heures fixées trop rapidement. Céder au plaisir de rester encore un peu. Bavarder, sympathiser, s’embrasser.
Avoir hâte au mois prochain.
Le lendemain, échanger des courriels pour ajouter quelques commentaires complémentaires aux discussions de la veille. Où on partage encore notre plaisir de lire.
Ivresse dans mon cas. Complètement accro.
vendredi 27 mai 2016
Escapade au Parc de Plaisance
Quatre jours magnifiques. À tous points de vue.
À quarante minutes de chez nous, mais comme si j'étais ailleurs.
Parc de Plaisance, Sepaq.
Chez nous des corneilles le matin, des grenouilles le soir, mais là, des chants d'oiseaux toute la journée. Très nerveux par contre, les pics, l'oriole de Baltimore, les chardonnerets, j'ai eu du mal à en photographier un seul tant ils avaient la bougeotte.
Devant notre emplacement -- le 98--, un plan d'eau. Des tortues, des rats musqués, des castors venus nous saluer.
Et oh! miracle, même en ce mois de mai, pas de maringouins ni mouches noires. Pourtant des marécages autour. Des quenouilles et des lys à venir.
Un paradis.
Chaque jour au moins une heure de vélo, jamais le même sentier. Un matin, trente-cinq kilomètres.
Chaque jour au moins deux heures de lecture: Marie Major de Sergine Desjardins qui m'a appris comment vivaient probablement mes ancêtres: François Deguire dit Larose et Jean Bricault dit Lamarche et plus encore "ma" Fille du roi, Marie Rose Collin.
Tous les repas pris à l'extérieur, les yeux rivés sur la baie qui donne sur la rivière des Outaouais.
Premier essai chez FlickR. Contrairement à Jalbum, je ne parviens pas à intégrer l'album directement dans ce billet. Un lien seulement. Je verrai à l'usage si je ne reviens pas à Jalbum.
Donc un montage seulement et le lien vers mini-album>>>
À quarante minutes de chez nous, mais comme si j'étais ailleurs.
Parc de Plaisance, Sepaq.
Chez nous des corneilles le matin, des grenouilles le soir, mais là, des chants d'oiseaux toute la journée. Très nerveux par contre, les pics, l'oriole de Baltimore, les chardonnerets, j'ai eu du mal à en photographier un seul tant ils avaient la bougeotte.
Devant notre emplacement -- le 98--, un plan d'eau. Des tortues, des rats musqués, des castors venus nous saluer.
Et oh! miracle, même en ce mois de mai, pas de maringouins ni mouches noires. Pourtant des marécages autour. Des quenouilles et des lys à venir.
Un paradis.
Chaque jour au moins une heure de vélo, jamais le même sentier. Un matin, trente-cinq kilomètres.
Chaque jour au moins deux heures de lecture: Marie Major de Sergine Desjardins qui m'a appris comment vivaient probablement mes ancêtres: François Deguire dit Larose et Jean Bricault dit Lamarche et plus encore "ma" Fille du roi, Marie Rose Collin.
Tous les repas pris à l'extérieur, les yeux rivés sur la baie qui donne sur la rivière des Outaouais.
Premier essai chez FlickR. Contrairement à Jalbum, je ne parviens pas à intégrer l'album directement dans ce billet. Un lien seulement. Je verrai à l'usage si je ne reviens pas à Jalbum.
Donc un montage seulement et le lien vers mini-album>>>
samedi 21 mai 2016
Un « Tu » puissant et percutant
Vous ne me croirez pas, ça
m’intimide d’en parler.
— Parce que tant d’autres en ont
déjà fait l’éloge, il suffit d’écrire le titre du livre, et ajouter «blogues», au
besoin pour voir l’abondance des appréciations sur le roman La femme qui fuit.
Qu’aurais-je à rajouter de plus ou même de différent?
— Parce que plus un livre me
touche, plus j’aime, moins je trouve les mots pour en parler comme si je
n’étais pas à la hauteur du sujet.
— Parce que je retarde le moment
d’en parler comme pour rester encore un peu entre les pages du livre. Dès que
j’aurai fini d’en parler, comme une longue expiration, ce que j’ai ressenti
s’évanouira-t-il?
— Et bizarrement, parce que le
livre n’était pas (et n’est toujours pas) disponible en numérique chez
pretnumerique.ca je n’ai pu l’emprunter dès sa sortie, j’ai attendu que ma
nièce me passe son cadeau de Noël. Un plaisir d’autant attendu que le
ravissement en fut décuplé. Doublé du bonheur de tenir dans ses mains ce format
4 sur 8 que j’aime tant.
J’ai attendu un peu pour voir si
le besoin d’en parler allait décroître. Eh non! Donc, impressions.
Un roman qui commence par « La
première fois que tu m’as vue, j’avais une heure. Toi, un âge qui te donnait du
courage. »
Qui fait l’unanimité chez les
chroniqueurs, blogueurs, lecteurs de tous les milieux
Qui tient plus que les trois mois
habituels sur les tablettes des librairies
Qui remporte des prix
Qui parle d’un temps dont j'entendais parler dans ta jeunesse
Où il est question de peinture, de
poésie, mes arts favoris… Qui m’a rendue curieuse des tableaux et des poèmes de
Suzanne Meloche d’abord, et de ceux des Borduas, Barbeau et de quelques autres
que j'avais un peu oubliés.
Qui me rend curieuse de cette
Manon Barbeau qui m’a tant impressionnée quand j'ai partagé avec elle des ateliers de théâtre, alors que nous avions toutes deux seize ans…
Qui traite de la liberté, de
l’abandon, des femmes, sujets qui me touchent, qui m’interpellent…
Je dis souvent que je ne lis pas
comme les autres parce que je prétends être auteure. J’ai peur des mots des
autres. Du doute qu’ils glissent en moi. En fait, je devrais cesser de radoter
à ce sujet, je me suis renforcée au fil de mes lectures et de mes écritures, je
sais maintenant qu’ils me font plutôt du bien, les mots des autres. Et je suis
capable d’admirer, capable d’aimer sans me sentir rejetée ou me considérer nulle.
Et puis finalement chacun lit et réagit avec son vécu, son expérience, ses yeux
de professeur ou de cinéaste ou d’écrivain ou de femme ou d’homme. Je l’ai bien
vu en lisant les blogues au sujet de ce livre.
Je voulais lire La femme qui fuit
pour l’histoire, pour savoir en quoi ce roman était exceptionnel. Qu’on me
raconte le temps du Refus global, qu’on m’explique le choix de Suzanne Meloche
d’abandonner ses enfants. Ce que j’ai finalement aimé c’est le style, les
chapitres courts qui donnent un rythme à la vie décrite, j’ai été atteinte par
cette force des mots, par ce « Tu » employé, qui martèle chaque phrase comme un
clou qu’on enfonce et qui fait mal.
- Présence fauve, saignante
- Tu peins avec des griffes, la salive en écume, le geste en bataille. Tu déploies un cri rouge sur la toile humide.
J’aurais pu citer plusieurs
phrases par page. J’ai quand même noté celles-ci :
- Habiter l’instant
- Un geyser dans le ventre
- Ta calligraphie s’est ensauvagée
- Tout de toi raconte un adieu
- Il est effilé et se meut avec finesse. Il voudrait être l’ombre, mais capte malgré lui la lumière, qui se vautre paresseusement sur son corps anguleux.
Et j’ai reconnu l’époque de mes
vingt ans quand les mots que j’écrivais déjà faisaient écho à ceux que les
poètes et les femmes avaient le furieux besoin de cracher. Depuis, les miens se
sont adoucis, mais il faut continuer d’entendre les cris des autres, des
jeunes, des minorités, des intimidés, des abandonnés. Des femmes, encore.
On plonge dans les mots, on se les envoie sales et bruts, volatiles et mutilés, on les avale et les recrache, on les fait s’envoler, on les love, les caresse et les viole.
Les deux livres que j’ai lus en
avril et mai ont tous les deux remporté le Prix des libraires : La femme qui fuit pour les romans
québécois et L’amie prodigieuse pour
le roman hors Québec.
Un peu comme si j’avais gagné mes
élections : mes deux livres préférés pour l’année 2016.
samedi 14 mai 2016
Écrire ou laver la vaisselle
Et Holly pensa alors : je dois écrire avant que cela ne m’échappe. Elle avait déjà ressenti ça plus jeune — l’envie presque paniquée d’écrire à propos d’une chose qu’elle avait entraperçue, de la fixer sur une page avant qu’elle ne file à nouveau.
Esprit d’hiver, Laura Kasischke
Je me suis dit que j’allais écrire sur l’insignifiant, le petit, même si c’est ennuyeux, même si ça n’est pas digne d’être raconté. Souvent, les écrivains fabriquent une imitation de la vie en partant d’un point de vue philosophique. J’ai fait l’inverse.
Les tâches domestiques, cet ennuyeux travail de femme, le frustrent, lui qui voudrait consacrer ses journées à écrire une grande œuvre. Mais il ne faut pas dire ces choses-là.
Citation de Karl Ove Knausgaard, paru dans Bibliobs, chronique de David Caviglioli
Écrire plutôt que les tâches domestiques, le lavage de la vaisselle par exemple, je connais.
Se lever au beau milieu de la nuit parce qu’on ne dort plus, hantée par cette phrase à écrire, par cette phrase qu’on a peur d’oublier, qu’on trouve importante et même parfois géniale, je connais. Et même si on sait qu’elle ne le sera probablement plus au matin, elle nous tient éveillée.
Écrire pour écrire, sans structure, sans étiquette de roman ou nouvelle ou chronique ou billet. Juste enchaîner les associations d’idées. Noter tout ce qu’on fait, tout ce à quoi on pense. Avoir un crayon dans la main plutôt qu’une voix qui peut parler, je voudrais.
Lire aussi au lieu de laver la vaisselle. Lire tout le temps. Et écrire sur ses lectures.
Je suis contente de vivre la période présente. Dans les années '80, j’étais récalcitrante à cette technologie nouvelle : l’ordinateur qui nous restreignait à la position assise et nous privait d’utiliser l’exacto, instrument que je maniais comme un chirurgien esthéticien.
Pourtant, dès que j’ai pu, j’ai troqué la machine à écrire contre un Commodore, puis un Tandy, un IBM jusqu’au portable.
Et quand vint l’Internet, je n’ai eu de cesse de m’informer sur la possibilité de l’obtenir chez nous, dans ma petite campagne éloignée, de harceler Télébec pour obtenir un modem et un service de qualité.
Avant Internet, je connaissais quelques noms d’écrivains vus sur les couvertures de livres de la bibliothèque familiale. Je me faisais un devoir de lire les auteurs québécois.
Je ne sentais pas le besoin de les rencontrer, de leur parler. Dans les Salons du livre ou des rencontres organisées, les rares fois où j’y suis allée, ça ne m’intéressait pas de faire la ligne pour leur dire quelques banalités. Je préfère les livres aux auteurs. C’est en lisant ce qu’ils écrivent, c’est en étant émue, touchée, dérangée par leurs écrits, c’est à travers leurs histoires que j’ai l’impression d’entrer en relation avec eux. Qu’ils m'offrent ce meilleur d’eux-mêmes que j’accueille avec respect et admiration, tout comme je donne le meilleur de moi-même quand j’écris, beaucoup plus que si j’ouvre la bouche pour dire des fadaises.
Mais là, maintenant, en 2016, avec Internet, sur Facebook entre autres ou dans un blogue s’ils en ont un, je peux les observer, les découvrir, lire leurs billets, leurs messages, leurs commentaires, leurs opinions. Entrer dans leur univers. Sans obligation d’intervenir. Et le temps que je veux. Et sans attendre dans une file. Sans gêne. Ou interagir, m’immiscer dans leurs conversations. Aussi souvent que m'en vient l'envie.
Qui aurait cru que je « parlerais » à Élise Turcotte, Paule Baillargeon, Lynda Dion, Louise Dupré, Mylène Gilbert-Dumas et quelques autres, plusieurs autres.
Je me sens presque des leurs. Parce que je pense souvent comme elles (je dis elles parce que dans les ci-nommées, il n’y a que des elles).
C’est à la suite d’une citation de Karl Ove Knausgaard, notée par Élise Turcotte sur Facebook que j’ai pris connaissance de quelques noms d’écrivains dont j’ignorais tout cinq minutes avant. Et, comme à mon habitude, j’ai aussitôt ouvert deux autres onglets, celui de la BANQ/pretnumerique et celui de ma librairie indépendante préférée pour voir si un de ces romans pourrait m’intéresser. J’ai eu la chance de pouvoir emprunter Esprit d’hiver de Laura Kesischke que j'ai entamé aussitôt. Quant à la brique de Karl Ove Knausgaard, j’ai feuilleté Un homme amoureux, mais prendrai-je le temps de lire cette énorme autobiographie?
Parce qu’après tout, il y a aussi la vaisselle à laver!
Mais tout de même, j’ai tenu à l’écrire d'abord.
lundi 9 mai 2016
Écrire sa mère
Encore une auteure qui me jette par terre. Elle a écrit sa grand-mère, sa mère et elle, en tant que mère, aussi.
Des phrases que je lirais à voix haute comme un rap, comme
un slam, comme Speak White.
Le sujet des enfants abandonnés, de La femme qui fuit : un sujet puissant, mais dans le choix des mots, dans le choix même de la
ponctuation, des répétitions, c’est le style qui donne toute sa force au roman.
Le « tu » qui frappe. Les courts paragraphes qui martèlent.
Le format aussi que j’ai toujours aimé tenir dans mes mains.
Me touche d’autant que j’ai connu la mère de l’auteure, quand j’avais 16 ans et que nous étions au même collège. Rencontre de quelques
heures dont je garde un souvenir indélébile, et ce, même si son nom n’était pas
devenu public par la suite.
Écrire sa mère.
Hier, fête des Mères. Je fêtais plutôt l’anniversaire
de mon frère, comme depuis des années. Et puis ma mère, elle n’était pas là, j’ai plutôt fêté l’anniversaire
de sa mort la veille, le 7 mai. Morte il y a quatre ans, en 2012. Je ne suis
pas prête d’oublier la date, j’avais une perruque sur la tête, entre deux
traitements de chimiothérapie.
Je ne suis pas mère, mais j’en ai eu une, bien sûr.
J’ai écrit mon père, mais je ne réussis pas à écrire ma
mère.
Dans mon prochain roman, il y a Mireille, la mère de
Dominique.
Au début de la trilogie, en 2004, je croyais écrire sur ma
lignée zigzagante de Bridget à Jenny, à Annie, à Michelle jusqu’à moi. Donnant
la parole à chacune. Je n’ai pas pu. Une fois rendue à mon grand-père que j’ai
connu, les visages sont devenus flous, les paroles confuses et les lieux ont bougé.
Je n’ai entendu que leurs silences et je n’ai jamais su leurs secrets.
J’ai écrit une femme, une épouse une sœur et même une mère,
mais pas la mienne.
La mienne m’appartient à jamais. De toute façon, chacun a la
sienne, même les enfants d’une même famille ont souvent l’impression de ne pas
avoir eu la même.
Le souvenir n’est pas la vérité, mais qui se soucie de la
vérité quand il est question d’émotions qu’elles soient bonheurs ou blessures,
amour ou ressentiment.
Dans mes romans, j’écris des émotions. Je ne crois pas que j’écrirai
ma mère, jamais. Probablement parce que je ne l’ai jamais tout à fait comprise.
Peut-être parce que je suis une fille, une sœur, mais pas une mère.
(Le livre dont il est question, c'est, vous l'avez reconnu: La femme qui fuit d'Anaïs Barbeau-Lavalette aux Éditions Marchand de feuilles. J'en reparlerai sûrement quand je l'aurai terminé)
(Le livre dont il est question, c'est, vous l'avez reconnu: La femme qui fuit d'Anaïs Barbeau-Lavalette aux Éditions Marchand de feuilles. J'en reparlerai sûrement quand je l'aurai terminé)
vendredi 29 avril 2016
Comme l'oiseau, recommencer chaque printemps
Quand tu lis sur un réseau social — et non dans un courriel personnel : « Tous ceux et celles dont les textes ont été retenus ont été contactés, et le processus d’accompagnement commencera sous peu. » et que tu n’as pas été contactée, tu viens de comprendre que :
malgré que tes textes ont toujours été retenus lors des précédentes parutions de ce collectif
malgré que la maison d’édition est la même que celle qui publie tes romans
malgré que la réviseure est la même que celle qui corrige tes romans
eh non, ton texte n’y sera pas.
Tu crains de contracter cette petite maladie de la déception qui peut mener à une conclusion aussi inutile que fausse : je ne vaux plus rien. D’autant que les textes étaient sous pseudonyme, alors ce n’est pas personnel si ton texte a été refusé, pas plus que c'aurait été personnel si ton texte avait été retenu. Donc, c’est vraiment ton texte qui n’était pas bon, pas toi.
Mais, toi, tu sais que c’est toi qui l’as écrit, pas un pseudonyme!
Mais toi, tu as beaucoup de difficulté à différencier la qualité d’un texte et la compétence de son auteur.
Et tu lis ce message au même moment où tu es en train de relire ton manuscrit en cours. Il te reste à continuer, à corriger, sans juger, sans comparer. Juste l’améliorer, être meilleur que la version précédente, réécrire au besoin, reformuler.
Comme l’oiseau qui reconstruit son nid au printemps.
Et tu lis ce message au même moment aussi où tu as acheté un livre où il est question de Wordpress, tu sais ce système de gestion de contenu qui t’obsède depuis plusieurs années, que tout le monde vante et te dit que c’est bien meilleur que Blogger que tu utilises depuis huit ans.
Tu as un site et un blogue et ça fait des années que tu voudrais bien les uniformiser, mieux, les marier, tout regrouper dans un seul site plus au goût du jour, plus dynamique, moins obsolète.
Tu aimes bien fouiller, chercher, apprendre, essayer des nouveautés, réussir. Tu te sens utile et en vie.
Recommencer chaque printemps, comme l’oiseau qui est venu voir si son vieux nid était encore là.
Mais ce n’est pas aussi simple, bien des difficultés t’attendent, bien des questions déjà se présentent dont la principale est : es-tu compétente? Es-tu capable? Est-ce que ça vaut la peine? Tout ce temps à chercher, essayer, échouer, rester éveillée à te poser des questions. Alors que tu as déjà un site, déjà un blogue. Pourquoi tous ces efforts, ces essais et erreurs? Auras-tu plus de lecteurs, plus de retombées. Simle satisfaction personnelle? Et tout ce temps que tu auras mis à jouer dans le langage informatique, ce sera moins de temps pour être dehors à les observer ces oiseaux que tu aimes, du temps de moins à profiter du soleil qui est de plus en plus chaud, moins de temps pour écrire ton blogue et réviser ton manuscrit.
Le couple de phœbe est jeune, lui. Il peut encore fonder une famille, encore créer, ça vaut la peine de faire des efforts, ça vaut la peine d’espérer, d’essayer, d’affronter les difficultés qui se présenteront.
Mais toi, tu as l’âge de la retraite et au lieu de prendre tous ces aléas comme des petits deuils, prend-les comme des signaux : au printemps, tu n’es pas obligée de recommencer.
Seulement jouir de ce que tu as construit depuis soixante-six printemps.
mardi 26 avril 2016
Deux romans d'Elena Ferrante
Je fais partie d’un club de lecture, mais rien de bien structuré. Nous ne discutons pas intellectuellement « de la construction du roman, de la manière dont le sujet est traité, de la qualité de l’écriture, de la qualité et l’originalité de la narration et finalement, du caractère novateur du texte et la promesse littéraire que pourrait représenter l’auteur. e » (en référence au billet de Gabrielle Doré, voir le lien à la fin du billet). Nous échangeons sur nos lectures, nous proposons aux autres les romans que nous avons lus. Nous nous prêtons nos livres. D'âges et de nationalités différentes, nos goûts diffèrent. Parfois une aime, l’autre pas ou moins. Certaines lisent polars, d'autres, dont moi, lisent surtout québécois. Aussi, j’espère les surprendre un peu en leur proposant les deux romans de l’Italienne Elena Ferrante : L’amie prodigieuse et Le nouveau nom, suite du premier. Le 1er avril dernier, j’ai écrit un billet sur la lecture du premier tome, j’avais hâte de lire le second. C’est fait. Je peux prêter les deux romans.
Ce qui fait que j’aime ou non un livre tient souvent dans le style, l’écriture, mais aussi dans l’identification à un ou deux personnages. Même si l’histoire se passe à Naples, en Italie, dans un quartier ouvrier, ce qui n’est pas du tout mon cas, j’ai reconnu dans la relation entre les deux amies, surtout quand elles étaient à l’école, ce que j’ai vécu dans ma propre adolescence: ce rapport d’admiration pour une première de classe, ce sentiment de n’être pas aussi bonne qu’elle et de ne jamais la rejoindre, de l’aimer plus qu’elle pouvait m’aimer.
Une fois bien accrochée à l’histoire, l’auteure peut m’amener dans des avenues que je n’ai jamais connues et ce n’est plus l’élève que j’ai été qui a lu la suite, mais une lectrice qui est intéressée par l’histoire qu’on me raconte, par la relation entre Lila et Elena. Le titre est bien L’amie prodigieuse, mais c’aurait pu être Les deux amies parce qu’on s’intéresse autant à l’une qu’à l’autre.
Les hommes, frères ou pères, se battent beaucoup dans cette Italie des années 50, et on menace de tuer tout autant. On se protège en gardant ses secrets et en prétendant toujours le contraire de ce qu’on pense vraiment. Ainsi Lila n’ira pas à l’école aussi longtemps que son amie, mais, sans le dire à personne, elle empruntera des livres de latin, de grec pour apprendre et en savoir autant qu’Elena qui, elle, étudiera plus longtemps que ses parents et que tous ses ami-e-s du quartier. Quant à Elena, non, non elle n’aime pas Nino, s’en défend énergiquement, mais passe des nuits à l’imaginer dans ses bras. On garde secret qui on aime, on jalouse ceux qui ont de l’argent.
Et puis, pour qui ne connait pas Naples, on a droit à un tour de ville et même au bord de la mer, à Ischia.
Et puis, pour qui ne connait pas Naples, on a droit à un tour de ville et même au bord de la mer, à Ischia.
Dans Le nouveau nom, Elena se pose vraiment beaucoup de questions, c’est peut-être là que j’aurais coupé un peu, mais le procédé est efficace puisque l’histoire avance quand même en profondeur.
Dans le deuxième tome, la fin m’a rejoint encore puisque Elena publiera un roman en 1968. Mais à la hollywoodienne, le rêve de tout écrivain : du genre premier jet écrit à la main, aussitôt accepté par l’éditeur et la jeune auteure inconnue reçoit même une avance (200,000 lires, ce qui a l’air d’équivaloir à 300 $ CAN).
Bref j’ai beaucoup aimé parce que l’auteure a vraiment bien décrit les relations entre les amies, mais aussi celles des amoureux, celles avec la fratrie et celles avec les parents.
Un seul oubli, qui est probablement délibéré : en prologue Lila disparait. On ne saura jamais où, même si on devine pourquoi.
Vous ai-je convaincu de les lire? Convaincrai-je les membres de mon club de lecture?
Pour les curieux et curieuses: je suis encore amie avec cette première de classe de mon adolescence mais je n'ai plus ce sentiment d'infériorité!
Pour les curieux et curieuses: je suis encore amie avec cette première de classe de mon adolescence mais je n'ai plus ce sentiment d'infériorité!
Billet de Gabrielle Doré dans le blogue Le fil rouge >>>
Premier billet au sujet de L’amie prodigieuse>>>
vendredi 22 avril 2016
Je suis brune
Qui n’a pas eu de petit cahier noir dans lequel on couchait les mots dans l’urgence de dire l’émotion? Parfois en prose comme un journal intime, parfois en lignes courtes qu’on se targuait de nommer poème. On se croyait auteur en herbe, mieux encore, futur poète. On s’attendrissait à lire Rimbaud. On croyait comprendre les textes d’Aragon. On apprenait par cœur du Prévert.
Et on continuait de noircir des pages lignées.
J’ai cessé d’acheter et de remplir de ces petits cahiers noirs quand, en 1969, j’ai rencontré Nicole Brossard.
En lisant Aube à la saison, j’ai su que je ne serai jamais poète. Pire, que ce ne serait pas mes lectures préférées. Même après trois lectures de ses poèmes, je ne « voyais » pas l’histoire, je ne saisissais pas le sens et je butais sur la typographie. J’aurais pu au moins admirer le style, aimer les mots, la musique. Même pas. Bon, si un peu, pour certains poèmes.
sur ma prunelleje veux des nuages effilés de brasje veux des flots d’azur frappés sur le hublot de mes songesje veux la plaine des jourstirée comme une joieau cœur de mon paysage
J’aimais les livres, j’aimais les mots. Je lisais tout Tchekhov, je lisais tous les Spirou, je lisais des lettres, des journaux, des essais, mais à part les auteurs «obligés», je ne lisais plus de poésie.
J’avais honte mais je n’étais pas du genre d’élève à me forcer en espérant qu’à force de lecture, je comprendrais. J’étais prose probablement comme on est brune: ça ne se commande pas.
Mais voilà que, près de cinquante ans plus tard, je jette encore un coup d’œil, comme on essaie de goûter à un légume qu’on détestait dans son enfance. Et si j’allais aimer?
Aussi, par curiosité de Nicole Brossard, j’ai fouillé dans ma bibliothèque et j’ai trouvé Le Centre blanc que l’auteure avait dédicacé à mon père en 1980, et j’ai emprunté Les femmes rapaillées dans lequel je n’ai reconnu que trois noms : Nicole Brossard, Hélène Dorion et Louise Dupré.
Il faut beaucoup de phrases pour arriver à exister. Il faut parfois même les traduire et ce n’est pas simple car ça passe par l’estomac, l’haleine des mots, le type de salive qu’elles sécrètent dans une langue et pas dans l’autre.
Nicole Brossard
Le voyage dure encore,
Qui me mène au commencement de moi-même,
Et la traversée ne connait aucun port.
Hélène Dorion
un regard, un seul
regard
autour de toi
et te voilà pénétrée
par la douleur
des femmes
Louise Dupré
Je comprends mieux qu’à vingt ans, j’admire encore plus, j'essaie de retenir les noms, mais je ne peux pas dire que j’aime parce que ça ne m’émeut pas. Et je n’ai plus honte d’être seulement brune (quoique c’est une image parce que je suis plutôt grise!)
Tout de même, je me suis inscrite pour le brunch du 1er mai au Centre d’action culturelle. J’irai écouter Claude Larouche, qui se dit « passeur de beauté » nous lire des textes poétiques de chansonniers québécois tels Gilles Vigneault et Félix Leclerc, mais aussi des poèmes de Baudelaire, Rimbaud et Aragon.
Lien vers La matinée de poésie>>>
Lien vers La matinée de poésie>>>
samedi 16 avril 2016
Une autre façon de publier
Au Salon du livre de l'Outaouais 2016 (emprunt au site http://matv.ca/) |
La ronde des Salons du livre se poursuit. Mi-avril, celui de Québec. Ronde, tournée, tourner en rond, ronde folle, y aller ou non. Jouer le jeu ou non. Le monde du livre est un jeu de hasard. Comme gagner à la loterie.
Rien à voir avec écrire.
Un jeu pour les grands. Les grands éditeurs, les grands auteurs. Grands dans le sens de gros, de connus, de ceux qui ont les moyens. Pour leur assurer une certaine visibilité ou présence, les petits éditeurs se rabattent sur le distributeur, comme Prologue. Les auteurs moins connus investissent de leur poche pour se payer l’hôtel, les repas, l’essence. D’autres ne jouent plus. Fréquentent plutôt les bibliothèques, donnent des conférences à des groupes ciblés, se rendent dans des expositions régionales. Ou restent chez eux.
Rien à voir avec écrire.
Parce que ceux qui écrivent, ce qu’ils veulent, eux, c’est écrire. Mais ce qui les épuise bien souvent c’est d’attendre, d’espérer. Attendre après l’éditeur, après l’acceptation de leur manuscrit. Espérer être découvert, être aimé, être lu, être vu. Et ils voudraient bien en vivre, ne faire que ça, parce qu’ils aiment ça, écrire. Le reste, c’est du social, du collatéral, du promotionnel. Quelques-uns voudraient bien être comme Elena Ferrante qui a dit à son éditeur : « De tous vos écrivains, je serai celle qui vous importunera le moins. Je vous épargnerai jusqu’à ma présence. » Mais ici au Québec, nos livres peuvent-ils être lus si l'auteur reste chez lui?
Je connais des auteurs qui jouent autrement. Et qui, en apparence du moins parce que sait-on jamais s’ils ne se sont tout simplement pas résignés à emprunter cette voie, faute de rouler sur l’autoroute — pourtant raboteuse comme toutes les routes — majeure de l’édition.
Certains, des plus jeunes, s’aventurent dans le numérique, dans le epub, ils sont à l’aise avec les logiciels et l’Internet. D’autres, des plus vieux, se sont frayé un autre chemin dans cet univers aux multiples avenues.
Le 30 avril j’assisterai au lancement d’un livre. Lors de la petite fête, tout aura l’air d’un lancement ordinaire : des invités, des amis, d’anciens collègues professeurs. Il y aura des fleurs, du vin et des petites bouchées, peut-être. Et surtout, un livre à fait normal : ISBN en page 4 ou 6, couverture soignée, reliure allemande, imprimé chez un professionnel.
On a pu ou pourra voir l’auteure au Salon du livre de l’Outaouais parce que l’auteure est membre de l’Association des auteurs et auteures de l’Outaouais.
Mais tout de même ce sera différent des autres événements du genre.
Un, l’auteure a 86 ans.
Deux, c’est un livre autoédité.
Trois, le lancement ne se fait ni dans une bibliothèque ni dans un restaurant ni dans un Centre culturel, mais à sa résidence de personnes autonomes.
Le livre ne sera pas en librairie, quoique l’auteure réussira sûrement à convaincre quelques libraires indépendants de mettre son livre sur les tablettes. Peut-être même plus longtemps que le trois mois habituel. Mais pas dans toutes les librairies du Québec parce que le livre n’est pas publié chez un éditeur reconnu.
L’auteure aura tout payé : le montage, l’imprimerie, la livraison, les affiches. Elle aura tout orchestré du début à la fin. Elle aura demandé à une amie de faire le montage, à d’autres d’écrire des présentations, aura fait imprimer son livre, aura été le chercher à l’imprimerie, aura envoyé des communiqués de presse aux journaux de la région, aura eu une belle couverture dans l’hebdomadaire régional. Elle ira porter son trésor dans quelques librairies, aura envoyé des courriels, lancé les invitations. Et au final, les huit livres écrits dans les quinze dernières années lui rapporteront probablement plus que les deux ou trois publiés chez un éditeur reconnu, parce qu’elle a un bon réseau parce que si elle a eu toutes les dépenses, elle aura eu aussi tous les revenus.
Elle sera fatiguée, mais fière. Heureuse d’avoir publié son huitième livre, tous autoédités. Heureuse d’écrire encore, de publier encore, de réaliser ses rêves, d’avoir des lecteurs et lectrices. Combien? Qu’importe, l’important pour elle c’est d’écrire, de laisser sa trace, de raconter ce qu’elle a vécu à ses enfants et petits-enfants.
Et moi, je suis heureuse de la connaître, elle me rappelle sans cesse que point n’est besoin de jouer dans la cour des grands, de courir après tous les Salons, de vouloir son nom dans tous les médias, de voir son visage sur de grandes affiches. De toujours vouloir plus : après la famille, le village, après la région, la province, puis la France et les traductions, les voyages en Europe, la télévision, le monde entier.
Rien à voir avec l’écriture finalement.
À chacun son parcours, mais le mien ressemble de plus en plus à celui de mon amie de 86 ans : je laisserai ma trace. Qu’importe la profondeur du sillon, qu’importe le temps qu’elle restera visible.
vendredi 15 avril 2016
Cette année encore: Myrtle Beach et les environs
Cette année encore, nous avons opté pour Myrtle Beach afin de devancer un printemps qui s'est avéré tardif au Québec. Quoique finalement ayant quitté le 17 mars et de retour le 9 avril, pas tellement moins de neige entre l'aller et le retour!
Ci-après l'album photo de cette année, un peu trop large pour ce blogue et si vous désirez voir plus d'oiseaux ou plus de levers et couchers de soleil ou tous mes voyages, rendez-vous sur mon site, ce sera beaucoup mieux. C'est par là >>>
Ci-après l'album photo de cette année, un peu trop large pour ce blogue et si vous désirez voir plus d'oiseaux ou plus de levers et couchers de soleil ou tous mes voyages, rendez-vous sur mon site, ce sera beaucoup mieux. C'est par là >>>
dimanche 10 avril 2016
Onze heures plus tard, chez nous
Le cerveau est une drôle de bibitte. L’être humain au complet, disons. Pas vraiment logique. À moins bien sûr, — c’est plus que certain —, que je ne saisisse pas toutes les nuances de son raisonnement ou de son comportement sûrement teintés, l’un comme l’autre, d’émotions dont le propre est d’être irrationnelles. À preuve, pourquoi être revenue ce 9 avril alors que partout sur la route du Maryland à la Pennsylvanie, c’était annoncé « Winter wheather, use caution »? Sachant qu’à la maison, il y avait eu de la neige les jours précédents et qu’il en resterait sûrement. Qu’il ferait dans les moins 10 la nuit et un timide 0 le jour?
Nous sommes deux. Une qui a toujours peur de prendre les mauvaises décisions, qui pitonne sur sa tablette à chaque wi-fi rencontré pour vérifier les conditions routières de la 1-81 empruntée, et l’autre qui fait confiance, qui se dit qu’elle s’arrêtera si elle juge qu’elle n’est plus capable d’affronter ce qui se présente. Mais les deux s’entendent pour rentrer à la maison, les vacances sont finies. Plus le goût d’être dans le sud. Quand c’est rendu tu remarques le prix (élevé) des campings, que celui des State parks n'est pas bien mieux, que tu trouves bien longues les deux heures de pluie, que tu te dis à quoi bon aller là, qu’il vente trop pour aller à Cap Hatteras que tu as déjà vu, aussi bien rentrer. Quand tu commences à penser à ce que tu feras une fois à la maison, que ta tête y est déjà, ton corps te le dit, ton cerveau te le dit : allez, monte. Tu ne raisonnes plus. Tu t’entêtes, tu avances.
Et oh! petite merveille du corps qui s’inquiète la nuit et se fait des scénarios, ce même corps, le jour, trouve la force, le courage, l’énergie d’agir. Et une fois le jour venu, les raisonnements, les peurs, les hésitations se transforment en adrénaline et ce cerveau qui a créé l’inquiétude se met en mode adaptation et il réussit à prendre les bonnes décisions.
Samedi 9 avril, route I-81, Pennsylvanie |
Le matin, à Hagerstown, Maryland, au lever du rideau, la trace de neige prévue à l’aube n’a pas eu lieu, la route est à peine mouillée. Tu pars. Une petite heure après, un long nuage de brouillard se profile à l’horizon, une petite neige dans les champs. Une route mouillée pour l’instant. La neige tombe, fine puis floconneuse. Tu actives les essuie-glaces. Tu ralentis, tu ne dépasses plus, mais tu avances. À l’intersection de la 81 et de la 78, d’un seul coup, la voie de gauche est enneigée, tu ralentis encore. Tu ralentis encore, de 90 à 70 à 50km/h. Tu ne dépasses pas. Ça monte vers Hazelton. Tu connais la route et les montagnes de la Pennsylvanie. Tu connais tes repères. Tu réfléchis rapidement, tu pourrais arrêter au camping de Lickdale, ouvert toute l’année. Et puis, tu vois un camion 18 roues. Tu les aimes parce qu’ils sont informés, ils ouvrent les routes, ils assèchent la route. En voilà un qui te dépasse, ça te rassure, tu le suis. Et puis un long segment de construction, une seule voie. À la queue leu leu, à 70 km à l’heure, tu roules pendant plusieurs kilomètres en suivant le camion. Ton cœur se calme, ta respiration redevient normale. Tu te sens en contrôle. Et pas toute seule. Après Hazelton, il neige toujours, mais la chaussée redevient double et libre de neige.
Il faudra attendre l’état de New York pour qu’il cesse complètement de neiger, retrouver une chaussée sèche. Le thermomètre restera autour de 0 degrés jusqu’à la maison, six heures plus tard. Le passage de la douane n’est jamais assez rapide ou facile à notre goût, d’autant que notre anglais n’est pas fameux, mais finalement un petit quinze minutes d’attente, quatre ou cinq questions d’un douanier qui ne te regarde même pas et te voilà enfin à trois heures de chez vous. Tu y seras avant le coucher du soleil qui, heureusement, au printemps, se couche de plus en plus tard.
Après onze heures de route, chez nous. |
Ce soir-là, l’inquiétude fera place à la fatigue, mais tu seras fière de toi, contente de ton véhicule récréatif qui ne t’aura causé aucun pépin et aura fait son travail de trois quarts de tonne comme un pro.
Cesseras-tu pour autant de t’inquiéter et de surveiller les conditions météorologiques lors de tes déplacements? Cesseras-tu de voyager aux États-Unis en mars-avril?
Cesseras-tu d’être qui tu es?
Réponses au prochain voyage.
vendredi 1 avril 2016
Jour de pluie, qu'ai-je donc lu?
Jour de pluie. Jour idéal pour lire ou pour parler de lecture.
Il est des livres que je retarde de lire, que je retarde de finir également. Pour étirer le plaisir.
C’en fut un. Parce que j’attendais de me procurer la suite pour les lire un après l’autre. Je n'ai pas pu résister.
Je l’avais commencé en numérique, mais d’autres travaux ont retardé la lecture, j’ai dû remettre le fichier à la BANQ avant d’avoir dépassé les trente premières pages. Après avoir relu un extrait, je décidai de l’acheter. Ainsi, j’aurai tout le temps pour le lire. À mon rythme.
Comment en ai-je entendu parler? J’ai oublié. L’important, c’est qu’il s’imposait. Il insistait. Il se représentait régulièrement devant mes yeux.
Je ne connaissais pas Elena Ferrante. Elle m’intrigua un peu, mais pas autant que ce roman. Pressée de me rendre plus loin dans le roman, je me suis contentée de lire un article dans Bibliobs (lien à la fin du billet).
Le prologue à lui seul suffit à piquer la curiosité : une personne, une amie qui disparaît sans laisser de traces. Moi qui veux tant en laisser, paradoxalement. Intrigant. La narratrice, une certaine Elena Greco, sent le besoin de raconter la vie de cette amie, de raconter leur amitié. Leur enfance et leur adolescence. Ce qu’elles ont vécu, partagé: les poupées, les jeux, l'école, les garçons.
Si je n’ai pas senti le besoin de savoir si c’était la vie réelle de l’auteure, j’ai tout de même ressenti une grande affinité avec ma propre expérience de l’amitié. Et c’est ce qui m’a rendu le roman très intéressant, en ce qui me concerne.
L’histoire se passe à Naples, dans un quartier pauvre où les études ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Mais ç’aurait pu être dans une paroisse de Montréal ou de Québec, quoique dans les années cinquante, la guerre est encore un peu en arrière-plan et, dans ce cas, les Italiens n’ont pas les mêmes références que les Québécois. En fait, le lieu, l’époque sont bien là où ils sont. Bien présentés et je m’en satisfis grandement.
Tout l’intérêt de l’histoire tient surtout dans la façon dont l’auteure raconte en détail l’enfance et l’adolescence de ces deux fillettes. On les voit grandir dans leurs familles respectives, dans leur école, dans leur quartier. On sent bien l’évolution de l’une et de l’autre. Elles vivent ce que tous les enfants vivent : la jalousie, la violence, le rejet, le doute, la compétition, l’admiration, la recherche de la liberté, de l’autonomie, la volonté d’améliorer son sort.
Si je n’ai rien vécu de ce que les deux enfants ont vécu socialement, j’ai vécu tous ces sentiments si bien décrits.
Et si Lina a l’air d’être l’héroïne du roman, comme si elle était le personnage le plus intéressant, personnellement, j’ai préféré la narratrice qui doute, qui se questionne, fine observatrice qui sait si bien expliquer ce qu’elle ressent. En fait, le titre aurait pu être : les deux amies prodigieuses.
J’ai donc hâte à la suite. Et mieux encore, je lirai avec plaisir d'autres romans d'Elena Ferrante.
Et je n’attendrai probablement pas un jour de pluie pour le faire.
Et vous, lisez-vous les jours de pluie?
mardi 8 mars 2016
Journée internationale des femmes:
« mes » écrivaines, mes modèles
Pourquoi soulignai-je la journée du 8 mars cette année?
Je ne l’ai jamais fait ni sur mon blogue ni ailleurs, j’ai vérifié. En fut-il plus question les derniers jours? En ai-je entendu plus parler et je veux y ajouter mon grain de sel? Qui sait et qu’importe. Prétexte? Sautons dessus. Pas pour débattre, oh! non, je laisse à d’autres ce soin, cette tâche ou ce plaisir, c’est selon!
« À ma manière » (pour parodier la ministre québécoise Lise Thériault), je souligne donc cette journée (entre vous et moi, c’est rendu une semaine, et ce sera bientôt un mois!) en dressant la liste des auteures que j’aime, que j’ai lu, que je lis.
Comme je n’ai pas toujours tout acheter, ou tout garder, j’ai cherché dans ma bibliothèque mais aussi sur Internet pour me rafraîchir la mémoire, ce qui m’a fait réaliser que… je ne suis plus jeune. Non, disons plutôt que j’en connais des écrivaines! Et si j’ai parlé à quelques-unes lors de Salon du livre, pour vrai, en chair et en os, je m’enorgueillis (d’autant que malgré tous mes efforts, justement parce que je l’ai connue, je ne parviens pas à comprendre ce qu’elle écrit) d’avoir connu et côtoyé… Nicole Brossard. C’était à l’autre siècle, je n’avais pas vingt ans! Tout de même.
D’entrée de jeu, je le mentionne : pas de nationalité, pas d’ordre d’importance, pas de catégorie-genre littéraire, pas de pétales de marguerites: un-peu-beaucoup-énormément. Seulement des auteures dont j’ai aimé les écrits. Pour certaines, je n'ai lu qu'un ou deux romans, pour d’autres : tous.
Donc, une ligne pour chaque auteure, chacune unique, chacune importante:
Simone de Beauvoir
Colette
Marie Cardinal
Benoîte Groult
Flora Groult
Mazo de la Roche
Charlotte Brontë
Emily Brontë
Daphné DuMaurier
Charlotte Brontë
Emily Brontë
Daphné DuMaurier
Christine Rochefort
Annie Ernaux
Anaïs Nin
Hélène Ouvrard
Françoise Loranger
Claire Martin
Gabrielle Roy
Germaine Guèvremont
Anne Hébert
Denise Boucher
Nancy Huston
Madeleine Gagnon
Louky Bersianik
Simonne Monet-Chartrand
Francine Noël
Madeleine Ouellette-Michalska
Arlette Cousture
Marie Laberge
Suzanne Aubry
Katherine Pancol
Louise Dupré
Lynda Dion
Hélène Dorion
Mylène Gilbert-Dumas
Lysette Brochu
Nicole Balvay-Haillot
Loïse Lavallée
Nicole Balvay-Haillot
Loïse Lavallée
Michèle Bourgon
Sans nécessairement avoir lu beaucoup de leurs œuvres, même vraiment très peu, j’ai aimé lire des biographies sur ces écrivaines :
Marguerite Yourcenar,
Virginia Woolf
Marguerite Duras
J’aurais bien aimé, j’ai essayé plusieurs fois, je ne suis parvenu qu’à lire une vingtaine de pages de quelques-uns de leurs livres, donc admiration, mais j’assume :
Nicole Brossard
Marie-Claire Blais
Marguerite Yourcenar
Virginia Woolf
Marguerite Duras
En ai-je détesté? Non, aucune, pas plus que je ne déteste aucun écrivain. Seulement, plusieurs qui ne m’intéressent pas. Je ne les nommerai donc pas. Elles risquent simplement de se retrouver parmi celles que j’aurai oublié de nommer.
Je vous ai épargné des titres, mais je suis certaine que vous saurez en trouver, point n’est besoin aujourd’hui de se rendre dans une librairie ou une bibliothèque avec une liste, comme nous faisions à la rentrée scolaire au temps jadis. Google est là!
Et vous, quels sont vos auteures préférées?
samedi 5 mars 2016
Le souffle coupé
photographie prise à Kuujjuaq par Sylvie et Pierrôt (voir lien à la fin) |
« La vie, ce n’est pas seulement respirer. C’est aussi avoir le souffle coupé. »
Alfred HitchcockLe souffle coupé
presque littéralement
par le vent qui cisèle les congères
par la neige à pelleter, à souffler
par la beauté du bleu azuré, par la pureté du blanc scintillant
par le temps qui file trop vite
par la course, disons la marche pour le rattraper, en profiter, sans trop le calculer
par cet hiver qui s’impose tardivement
Le souffle coupé
au figuré
au figuré
par tous les livres à lire encore, les récents, les plus anciens
par tous les livres vus au Salon du livre
par tous les romans suggérés par des blogueurs, des chroniqueurs
Le souffle court
pour le manuscrit à écrire qui… s’essouffle, interrompu par d’autres activités, pour d’autres priorités.
Et pourtant, je respire, j’expire, je soupire.
Et pourtant, je vis heureuse de chaque jour, de chaque saison, de chaque mot.
Heureuse de voir des paysages photographiés par d’autres, de lire les voyages vécus par d’autres. On a peut-être qu’une seule vie, plus ou moins longue, mais elle s’enrichit de celles des autres.
Merci à tous ces autres : blogueurs, voyageurs, forumeurs, auteur-e-s d’enrichir la mienne.
lundi 29 février 2016
Mon Salon pour les gens et les livres
Si je n’en parle pas aujourd’hui, après ce sera trop tard, déjà une autre actualité retiendra l’attention. Je sais bien qu’un blogue, une page Facebook n’est pas un journal, je n’ai pas d’heure de tombée. Tout de même, aussi bien en parler pendant que moi aussi, je suis encore toute là. Quoique la température aussi m’inquiète. Le lundi matin, c’est jour de piscine. J’y vais ou non?
C’est d’ailleurs la question que je me suis posée chaque jour du Salon du livre de l’Outaouais. Il faut croire que d’autres ont moins hésité que moi puisque le Salon a connu une augmentation de 12 % ai-je lu.
Donc jeudi, je devais participer à une Table ronde animée par Catherine Voyer-Léger. Les yeux rivés entre l’application Meteo media/conditions routières et la route 323 qui passe en avant de chez moi, pendant tout l’avant-midi, j’ai finalement décidé de rester chez moi. À quarante ans, je n’aurais même pas regardé la météo, j’aurais foncé. Mais voilà, je ne les ai plus. Je ne regrette pas. D’autant que j’ai appris que l’animation avait été coupée de six minutes!
Reste le samedi et dimanche. Finissons-en avec la température que je termine ce billet sur le véritable intérêt du Salon du livre. Samedi, belle route sèche, aller-retour. Dimanche, petite neige à l’aller qui restait au sol, ralentissement et prudence, mais j’étais en sens inverse du trafic, les gens montaient à Tremblant, je descendais à Gatineau. Au retour, malgré les alertes en rouge de Meteomedia, et malgré que c’était l’inquiétude de bien des auteurs, il ne neigeait ni ne verglaçait, la chaussée était mouillée, besoin de bons essuie-glace et de lave-glace. Sans plus. Encore une fois, j’ai pensé à mes quarante ans quand ces questions bassement pratiques ne me dérangeaient pas, ne troublaient pas mon travail ni mes loisirs. Ou si peu. Ou moins longtemps.
Alors ce Salon? Tu as aimé ou non? Oui bien sûr. Comment une auteure doublée d’une lectrice pourrait ne pas aimer. C’est le seul que je fréquente, je ne vais pas bouder mon plaisir ou commencer à lui trouver des défauts, des lacunes. J’y allais parce que mon roman Les têtes bouclées a paru en octobre. Donc le présenter à qui ne le connait pas déjà, au stand de Vents d’Ouest et au stand de l’Association des auteurs de l’Outaouais. Côté lecteurs, ce fut assez tranquille. Plusieurs regardent, certains s’avancent, quelques-uns lisent l’affichette, quelques autres lisent la quatrième de couverture et quelques rares encore m’ont posé des questions. Une seule vente à un monsieur à qui j’avais donné rendez-vous pour une tout autre raison.
Donc si j’ai aimé le Salon, ce n’est pas pour les ventes.
C’est pour les gens. Pour jaser livres avec des personnes qui aiment lire. Pour jaser avec des auteurs qui aiment écrire. Aller au-devant d’eux, leur demander des nouvelles, leur poser des questions. J’ai aimé rencontrer Isabelle Lauzon (lien vers son livre ci-après) dont je lis le blogue depuis ses touts débuts, il y a huit ans. J’ai félicité Nicole Castéran pour son prix littéraire Le Droit (bien sûr que j’aurais aimé être au moins finaliste). Sur Facebook, j’ai félicité Marie Noëlle Gagnon pour son prix Jacques-Poirier (bien sûr que j’aurais aimé…). J’ai parlé de nos ancêtres communs à Suzanne Aubry. J’ai parlé de Baie Saint-Paul à Sylvie Catherine De Villy alors que son chalet est au Lac-Saint-Jean! J’ai dit bonjour à sa sœur Corinne. J’ai aussi confondu Mylène Viens avec Marie-Josée Martin. Un peu mêlée la madame! J'ai embrassé chaudement Lysette Brochu. Je n’ai pas pu embrasser Marie Potvin parce qu’elle était grippée. J’ai diné avec Andrée Poulin toujours aussi affable. J’ai remercié Claude Bolduc et Michel Lavoie chez Vents d’Ouest, pour leur présence, leur soutien. Et aussi Valérie Perreault et toute son équipe, qui ont travaillé vaillamment au stand de l’Association des auteurs et auteures de l’Outaouais.
C’est pour les livres. Je me serais peut-être laissée tenter par le dernier Michel Tremblay, mais pas de stand pour Léméac. De Catherine Voyer-Léger, j’avais aimé son Détails et Dédales alors je me suis procuré son Désordre et désirs. J’ai commencé à le lire, j’aime beaucoup : des courts billets qui viennent d’un ex-blogue qui parlent de sujets qui m’intéressent, qui me touchent de près. J’aurais bien voulu acheter L’amie prodigieuse et la suite Le nouveau nom, d’Elena Ferrante, mais un peu trop dispendieux pour mon portefeuille. Le premier est en livre de poche, mais il n’y en avait plus au Salon et le second vient tout juste de paraître. En attendant, j’ai téléchargé la version numérique disponible à pretnumerique.ca. Mais il y a de ces livres que je veux version papier, et plus qu'un prêt de trois semaines. J’ai noté aussi quelques titres pour de prochains emprunts à la bibliothèque.
Et dernier tour de piste : j’ai posé plusieurs questions pour un projet à venir qui, je l’espère, verra le jour en 2016.
mardi 23 février 2016
Route glissante
Mon père a écrit près d’une centaine d’ouvrages, de la plaquette à quelques romans. Dont un lui a valu le prix Jean-Béraud Molson en 1979. La famille a fondé une petite maison d’édition qui a bénéficié de subventions pendant quelques années. J’écris, j’ai essuyé bien des refus, mais certains de mes livres sont publiés. Est-ce que je connais le monde du livre pour autant? Plus que d’autres, mais pas tout. Je ne sais rien par exemple de la traduction, des droits d’adaptation. Pas grand-chose sur les organismes et les subventions. Et à part pouvoir en nommer quelques-uns, je ne sais absolument pas comment sont attribués les prix littéraires.
Je ne peux donc pas émettre d’opinion sur ces sujets. Même pas perdre mon temps à essayer de les comprendre, à quoi bon m’aventurer sur cette route subtile. Alors juste dire mon ressenti. Juste me poser des questions. Au sujet du destin.
Au moment même où j’écris la suite et fin des Têtes rousses et des Têtes bouclées dans lesquels, dès le début, j’ai voulu interroger le destin, voilà qu’il vient encore me tracasser. Des associations d’idées, des coïncidences questionnables.
Les têtes bouclées n’ont remporté ni le prix Jacques-Poirier ni le prix littéraire Le Droit. Hier encore, j’ai compris qu’une nouvelle que j’avais même oublié avoir écrite ne gagnait pas non plus un des trois prix accordés. Tous des prix décernés en Outaouais. Pas au Québec, pas au Canada ou dans le monde entier, juste en Outaouais où je demeure, et mes écrits n’y sont pas retenus. Où le seront-ils? J’aurais aimé. Qui n’aimerait pas? Je suis heureuse pour les gagnant-e-s.
Bon, pas grave, la vie continue. Le Salon du livre bientôt. Où je devrais être à l’aise puisque des gens, comme moi, qui aiment écrire et lire. Des sujets qui m’intéressent. Le seul où je vais. Et voilà que la température annoncée me fait hésiter : neige, pluie, verglas. Est-ce que je vais risquer ma vie en roulant 75 minutes à l’aller et 75 minutes au retour pour un vingt-cinq minutes de jasette sur l’univers livresque? Du coup me revient l’année 2012 en tête : deux semaines avant le Salon du livre où je voulais lancer Les têtes rousses, l’oncologue me disait qu’il valait mieux commencer mes traitements de chimiothérapie au plus tôt. Exit le Salon de 2012.
Ai-je un mauvais karma avec les Salons du livre? Avec les routes difficiles, les vraies comme les symboliques?
Pas plus important que ça, mais la confiance en moi est ébranlée. Facilement ébranlée me direz-vous. Eh oui! Je suis ainsi faite. La confiance ne s’achète pas au magasin, mais elle peut être ravivée avec un peu de reconnaissance. Ou des routes sèches.
Et puis, le destin, encore? Arriva un courriel. Un tout petit, anodin. Une ligne. Cinq mots : Inscription des têtes qui frisent.
L’espoir, la reconnaissance ne font pas le talent ni le mérite, mais ils peuvent encourager au travail.
Cinq mots ont suffi pour me montrer la route à suivre : celle du travail et du plaisir d'écrire. La seule sûre.
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